Intervention de Adrien Quatennens

Réunion du mercredi 11 octobre 2017 à 16h30
Commission des affaires sociales

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaAdrien Quatennens :

Peut-être avez-vous vu le reportage télévisé que l'émission Cash Investigation a consacré aux conditions de travail dans les entrepôts de l'enseigne Lidl. On y apprend que non seulement les magasiniers sont affublés d'un casque à travers lequel une intelligence artificielle leur dicte tous leurs mouvements, mais qu'en plus ils portent des charges lourdes – jusqu'à 8 tonnes par jour. C'est pourquoi les dos lâchent, les nerfs craquent et la souffrance au travail génère des maladies professionnelles.

La preuve est faite que la pénibilité n'est pas une vieillerie de l'époque des mines de charbon et de l'« âge d'or » du travail à la chaîne. Dans notre économie tertiarisée, des ouvriers usent toujours leurs corps à produire et leurs conditions de travail empirent. Pourtant, votre Gouvernement semble nier cette réalité, ou la mépriser. Les ordonnances réformant le code du travail n'osent-elles pas nous présenter la suppression des CHSCT comme un progrès alors que cette instance permettait aux salariés d'expertiser en toute indépendance les risques auxquelles ils sont confrontés quotidiennement ?

La fin du compte pénibilité qu'entérine ce PLFSS va dans le même sens : votre nouveau « compte professionnel de formation » conditionne le départ anticipé au fait d'être déjà malade, et il exclut quatre critères de pénibilité de la nomenclature actuelle, parmi lesquels l'exposition à des produits chimiques et le port de charges lourdes. Les salariés de Lidl apprécieront.

On aurait pu croire que votre Gouvernement s'arrêterait là, mais non ! Cerise sur le gâteau, le PLFSS modifie les règles d'indemnisation et de prise en compte des maladies professionnelles. Il instaure une limite de départ de l'indemnisation qui pénalisera celles et ceux dont la maladie sera détectée tardivement et satisfera les entreprises pathogènes, qui ne seront pas inquiétées. La boucle est donc bouclée pour la santé au travail : d'une part vous détruisez les instances de régulation et de détection sanitaire des salariés, d'autre part vous réduisez leurs possibilités d'indemnisation en cas de maladies professionnelles. Est-ce cela, la santé au travail sous Emmanuel Macron ? Il avait expliqué pendant la campagne électorale qu'il n'aimait pas le terme « pénibilité », parce qu'il induirait que le travail serait une souffrance. Je dirais plutôt qu'il veut rendre la pénibilité invisible et ne veut pas que l'on reconnaisse cette souffrance. Mais à défaut de reconnaître la maladie, vous risquez de faire disparaître les malades et leurs droits.

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