Il ne faut jamais oublier que les populations locales sont les premières victimes du terrorisme. C'est pourquoi nous leur apportons également un soutien concret : en 2018, au Sahel, 300 soins ou visites médicales ont été effectués quotidiennement.
Nous avons déjà eu l'occasion d'échanger sur le fait que la solution à la question du terrorisme dans la région ne peut pas être uniquement militaire. La sécurité ne peut pas s'installer dans le temps si la mise en oeuvre des accords de paix n'est pas soutenue, en parallèle de nos efforts, par toute la communauté internationale, ainsi que par les acteurs locaux.
En Centrafrique, grâce à l'opération Sangaris, dans laquelle nous avons été engagés entre 2014 et 2016, nous sommes parvenus à stabiliser le pays et à accompagner le déploiement des missions des Nations unies et de l'Union européenne, la MINUSCA et l'EUTM RCA. Notre engagement se traduit aujourd'hui par la formation de l'armée centrafricaine. Il sera renforcé au second semestre de l'année 2019, lorsque nous prendrons le commandement de l'EUTM RCA. Car, comme au Sahel, notre intervention a vocation à demeurer temporaire en aidant à la montée en puissance des forces armées locales.
Notre présence au sein des missions de la communauté internationale s'étend également sur les bords de la Méditerranée avec l'opération Daman, qui est la composante de la Force intérimaire des Nations unies au Liban (FINUL). Afin de stabiliser le sud du pays, 650 soldats sont encore mobilisés, et notre position nous permet d'y entretenir la coopération riche et historique qui nous lie au Liban.
Enfin, je voudrais dire un mot de la sécurité maritime, puisque nous maintenons dans le cadre de la mission Corymbe une présence quasi permanente dans le Golfe de Guinée, où nous nous efforçons d'améliorer la coordination entre les marines européennes. En Méditerranée, nous participons à l'opération européenne Sophia, qui lutte contre les trafics de migrants et contre les trafics d'armes, au large de la Libye, ainsi qu'à l'opération Sea Guardian de l'Organisation du Traité de l'Atlantique Nord (OTAN).
Avant de conclure sur ce point de situation relatif aux opérations extérieures et de poursuivre avec un éclairage sur nos relations avec l'Europe et l'OTAN, je voudrais m'arrêter quelques instants sur la gestion budgétaire 2018, en particulier sur les aspects financiers des opérations extérieures (OPEX) et des missions intérieures (MISSINT).
Comme chaque année, la dernière gestion a été marquée par la question du financement du surcoût de nos engagements. Comme chaque année, cela a fait l'objet d'interrogations, de débats. Je pense utile d'y revenir pour vous donner une vision à la fois claire et fidèle du bilan pour le ministère.
En 2018, le montant des opérations extérieures et des missions intérieures s'est élevé à 1,37 milliard d'euros, dont 1,22 milliard au titre des opérations extérieures et 156 millions d'euros pour les missions intérieures. La baisse de 170 millions d'euros par rapport à 2017, soit 11 %, s'explique essentiellement par la réduction des coûts liés à l'opération Chammal au Levant.
Daech affaibli, la lutte contre le terrorisme n'est pas achevée pour autant. Lorsque l'on fait la somme des coûts liés aux opérations Chammal et Barkhane, on constate qu'elle représente 86 % des coûts OPEX.
La baisse des coûts liés aux missions intérieures, passés de 215 millions à 156 millions, est due notamment à la rénovation du dispositif Sentinelle, à l'automne 2017, qui a permis de maîtriser l'évolution courant 2018.
Le montant des coûts à couvrir en 2018 s'est donc élevé à 1,37 milliard. Le bouclage du financement a été grandement facilité par la hausse des provisions que nous avions proposée, et que vous avez votée en 2018. Nous avons bénéficié de 650 millions d'euros dans le cadre de la provision OPEX et MISSINT, au lieu de 450 millions d'euros en 2017, soit 200 millions de plus auxquels s'ajoutent 100 millions d'euros pour la masse salariale des MISSINT et 40 millions d'euros de contributions internationales.
Ce sont donc 790 millions d'euros qui avaient été pré-identifiés pour assurer le financement des surcoûts. Ce n'est pas rien : avant même les travaux de fin de gestion, nous disposions de près de 60 % de la facture – nous savions comment payer 60 % des OPEX et des MISSINT. En 2017, nous n'avions pré-identifié que 30 %, puisque la provision était de 450 millions d'euros : il avait fallu, en gestion, trouver un milliard d'euros.
À ces ressources pré-fléchées se sont ajoutées des marges qui n'avaient pas été anticipées en gestion. Elles s'élèvent à 175 millions d'euros, dont 155 millions d'euros qui correspondent à une sous-consommation de la masse salariale du ministère. Je le dis tout de suite : ce n'est pas une bonne nouvelle.
Cela montre que la difficulté que nous avions identifiée dans le cadre de nos débats sur la loi de programmation militaire (LPM), à savoir la fidélisation et l'attractivité des carrières des personnels militaires, dont les compétences sont très recherchées par les entreprises et le secteur privé, n'est pas théorique. Il faudra donc apporter des réponses rapides – nous avons déjà établi un certain nombre d'orientations. Mais on ne peut pas non plus se dissimuler le fait que cette sous-consommation a facilité les conditions du bouclage pour 2018. J'espère ne pas avoir à me présenter devant vous l'année prochaine avec une sous-consommation équivalente.
Au-delà des provisions pré-identifiées et des marges que je viens de mentionner, il fallait trouver 404 millions d'euros pour assurer le bouclage complet du financement des opérations extérieures et des missions intérieures. C'est sur la réserve de précaution qui avait été constituée en début d'année que nous les avons trouvés.
Beaucoup a été dit à l'époque, des remarques malveillantes, voire des contre-vérités. Il ne s'agissait pas de 800 millions d'euros, comme j'ai pu parfois l'entendre, mais bien de 404 millions, qui ont été redéployés.
Rappelons quelques vérités. La mission « Défense » en 2018 n'a pas subi d'annulation dans le cadre du projet de loi de finances rectificative, qui prévoyait 600 millions d'euros d'annulations sur le budget de l'État. La mission « Défense » n'a pas non plus contribué aux dépenses exceptionnelles des autres ministères. Enfin, la somme de 404 millions d'euros représente 1,2 % du budget des armées, et environ la moitié de la réserve de précaution que nous avions constituée en début de gestion, précisément pour faire face aux aléas.
Je rappelle également que le ministère des Armées est l'un des rares ministères à avoir bénéficié d'un dégel de crédits, soit 272 millions d'euros dès le mois de novembre, que nous avons pu consommer.
Je crois pouvoir dire que la situation de la fin de gestion 2018 est bien meilleure que ce qu'a pu connaître ce ministère dans le passé, avec une loi de finances initiale respectée et une exécution qui s'élève à 34,65 milliards d'euros.
Quelles sont les conséquences de cette annulation, en fait un redéploiement, de 404 millions ? Cette annulation a porté sur la réserve de précaution, qui avait été constituée en mobilisant des lignes budgétaires considérées comme les plus indolores.
Nous avons mobilisé 240 millions d'euros sous forme de décalages de dépenses, ou de moindres versements à la trésorerie de l'Organisme conjoint de coopération en matière d'armement (OCCAr). Je rappelle que la trésorerie de cet organisme est très excédentaire et qu'il n'y a pas de raison que le budget de l'État verse par anticipation des sommes qui ne lui sont pas utiles. Mais nous étudions les modalités pour reprogrammer ces dépenses, en prévision du jour où l'OCCAR aura besoin de cette contribution.
Le solde, soit 164 millions d'euros, correspond à des moindres dépenses en gestion qui résultent, je le souligne avec fierté, de gains sur des négociations qui ont été menées sur le missile à moyenne portée (MMP), sur des drones tactiques et sur les véhicules blindés de combat d'infanterie (VBCI).
Nous ne sommes pas au mois de mars, et il est encore un peu tôt pour fournir un bilan définitif de la gestion 2018. Si votre commission le souhaite, je reviendrai volontiers – inutile de me convoquer par voie de presse.