Ce que je peux d'ores et déjà vous dire, c'est que la capacité de nos forces n'a pas été entamée : il n'y a pas eu de décalage dans les commandes ou dans la livraison des matériels qui sont attendus par nos forces. Ainsi, les hypothèses d'entrée en loi de programmation militaire sont préservées. Le montant du report de charges n'est pas encore arrêté, mais il devrait être inférieur à 3,4 milliards d'euros, comme cela était prévu dans les hypothèses d'élaboration de la LPM. Nous maîtrisons donc les conséquences des annulations et des redéploiements que nous avons réalisés.
De cette fin de gestion comme de ce début de LPM, je tire un enseignement positif : l'intérêt pour le ministère de porter les provisions des OPEX et des MISSINT à un niveau plus proche de la réalité des coûts finaux.
À cet égard, je ne peux qu'être satisfaite de loi de finances initiale pour 2019, dans laquelle les provisions approchent le milliard d'euros – 850 millions de provisions OPEX-MISSINT, 100 millions pour la masse salariale des MISSINT –, auxquels s'ajoutent les contributions internationales de l'Union européenne (UE) et de l'OTAN, ce qui facilitera d'autant le financement des surcoûts OPEX et MISSINT en 2019.
Et puisque je mentionne les contributions internationales de l'UE et de l'OTAN aux OPEX, je voudrais vous dire quelques mots de l'Europe. La résurgence des stratégies de puissance, les nouvelles menaces auxquelles nous devons faire face et l'appel de notre allié américain à un meilleur partage du fardeau au sein de l'OTAN rendent d'autant plus nécessaire la construction de l'Europe de la défense. Elle prend aujourd'hui corps. Depuis deux ans, nos initiatives ont permis de passer d'une idée ambitieuse, voire révolutionnaire à un projet concret.
J'étais cet après-midi aux côtés de la ministre allemande, Mme von der Leyen, sur le site Safran de Gennevilliers, afin d'officialiser la coopération entre le motoriste allemand MTU et Safran concernant les études sur le prochain moteur de notre SCAF et notifier, comme promis, son contrat d'architecture. Le SCAF est au premier rang des projets concrets qui rapprocheront nos armées. Nous pouvons en être fiers, comme nous pouvons être fiers du fait que les industriels ont été au rendez-vous pour permettre cette finalisation du premier contrat d'architecture, qui enclenchera tous les autres.
Cette coopération est emblématique de ce que doit être la refondation de la défense européenne. J'insiste ici sur le fait qu'avec l'Europe de la défense, nous ne tournons pas le dos à l'OTAN. Au contraire, nous réaffirmons que l'Alliance est, et restera, la pierre angulaire de notre défense collective, mais souhaitons désormais l'adosser à un pilier européen plus fort, plus solide, plus crédible, responsable et capable de s'engager pour assurer la sécurité de nos concitoyens.
L'Europe de la défense ne pourra réellement voir le jour que lorsque nous serons capables de nous engager ensemble, rapidement, là où nos intérêts sont en jeu. Cela requiert plusieurs choses : une solide volonté politique, la définition d'une stratégie commune et la convergence de nos intérêts. C'est toute la vocation de l'Initiative européenne d'intervention (IEI). Elle permettra aux armées des dix États européens parmi « les plus volontaires et les plus capables » de s'engager ensemble, si la situation l'exige. S'il devait y avoir un autre Serval demain, j'espère que nous serions en mesure de le déclencher d'emblée avec nos partenaires européens.