Oui, mais vous vous souvenez qu'on y arrivait extrêmement vite. Le Gouvernement a donc été conduit à introduire un mécanisme de plafonnement dans la loi de finances pour 2013, le dispositif voté en août 2012 ne s'appliquant pas à l'ISF de la même année – c'est pourquoi le Conseil avait laissé passer la mesure. Le plafonnement s'est élevé à 1 milliard d'euros dès l'année 2013, plus il a atteint 1,4 milliard deux ans plus tard. Le coût était donc très supérieur à celui du « bouclier fiscal » de la législature antérieure.
Chaque année, j'ai demandé à disposer d'une identification des bénéficiaires sous la forme d'un tableau très simple, à double entrée : qui bénéficiait des 1,4 milliard d'euros de plafonnement au titre de son revenu, et qui en bénéficiait au titre de son patrimoine. Il est apparu que 90 % des 1,4 milliard d'euros étaient concentrés sur les patrimoines supérieurs à 10 millions d'euros. Par ailleurs, je me faisais communiquer la liste nominative des principaux contribuables concernés. C'était, de manière éclatante, vraiment de très gros contribuables, qui bénéficiaient d'un quasi-remboursement de l'ISF.
Pourquoi rappeler tout ça ? Tout simplement pour dire qu'un tel impôt ne peut pas être abordé avec des a priori idéologiques. Il faut regarder la question d'une manière absolument rigoureuse. Pour ma part, je n'ai jamais eu de préventions contre l'idée d'un impôt sur le patrimoine, mais encore faut-il qu'il fonctionne. Le même bon Français, lorsqu'il payait l'impôt sur les grandes fortunes en 1982, avait des obligations d'État rapportant 17 % ou 18 %, et le taux marginal de l'IGF était de 1,5 % : on ne lui prenait donc que 10 % de son revenu. Il faut en tenir compte. La commission des finances est là pour faire des choses un peu rigoureuses, c'est-à-dire qui marchent. On doit sortir de l'idéologie. Voilà le rappel que je voulais faire.