Cette proposition de loi soulève quatre difficultés.
Tout d'abord, nous sommes face à un problème de sincérité, dont vous n'êtes pas responsables : vous souhaitez que l'on ne finance plus le charbon au moment même où le ministre de Rugy annonce que la fermeture des centrales à charbon de Bretagne pourrait être reportée. Je réclame un peu de cohérence ! On ne peut se contenter de déclarer qu'il faut sauver la planète. L'amour est beaucoup plus fort avec des preuves d'amour. Notre politique nationale doit être cohérente avec les leçons que nous donnons à la planète.
Le deuxième sujet est celui de l'efficacité. Vous le pointez, je suis d'accord avec vous. Nous devons être attentifs non pas au blanchiment d'argent, mais à son « verdissement ». Que met-on sous le label « vert » ? Vise-t-on les investissements qui permettent de réduire les émissions de CO2 ? Peu importe que les projets soient verts, bleus ou rouges ; il faut financer des projets qui ont un impact écologique.
Ma troisième préoccupation est liée à la transparence. Sur ce point, nous ne sommes pas d'accord. Vous évoquez à la fois le livret A et le LDDS. Or chaque outil doit viser un objectif clair : financer le logement social, ce n'est pas financer les PME. De même, financer les économies d'énergie, c'est très bien, mais si vous économisez une énergie décarbonée, l'impact sur la réduction des émissions de CO2 est nul... Quels outils souhaite-t-on utiliser, pour quels objectifs ? Le livret A ne vise pas les mêmes objectifs que le LDDS ; il conviendrait de mieux les distinguer.
Enfin, nous divergeons fondamentalement sur l'objectif de clarté. Qu'est-ce qu'un hydrocarbure ? C'est du carbone et de l'hydrogène, donc cela inclut le charbon, que l'on s'attache pourtant toujours à viser spécifiquement. En outre, les hydrocarbures ne peuvent tous être considérés sur le même plan au regard de nos objectifs de réduction des émissions de CO2 : investir dans le charbon n'est pas équivalent à un investissement dans le pétrole ou le gaz !
Même si vous ne traitez pas de ce sujet, je maintiens que l'épargne populaire devrait financer les investissements dans les gaz verts et la recherche en matière d'hydrocarbures verts. En outre, faisons attention au biais électrique : les énergies vertes sont aussi électriques, et contestées du fait de leur intermittence – dans certains pays, elles sont parfois couplées avec des énergies fortement carbonées, ce qui explique les hausses d'émissions de CO2.
Je ne suis pas opposé à la mobilisation de cette épargne, mais à condition que cela soit utile et cohérent avec nos autres outils. C'est pourquoi votre proposition de loi me gêne : c'est le résultat qui compte, non les moyens...