Les normes sont parties intégrantes de tous les accords commerciaux que nous signons. Avec le Mercosur, nous n'avons pas encore réussi à trouver un accord tout simplement parce que nous estimions que nous n'étions pas sur un pied d'égalité et que nous étions aussi en désaccord sur un certain nombre de points, notamment au sujet des normes.
Nous avons conclu un accord très positif avec le Japon, qui inclut non seulement les normes en matière d'alimentation, mais aussi les standards dans le domaine de l'environnement et du bien-être animal. C'est dans ce sens que nous continuerons de travailler. La France dégage aujourd'hui, dans le secteur agroalimentaire, un excédent commercial de 13 milliards d'euros vis-à-vis du reste du monde. Cela crée beaucoup d'emplois et je ne vois pas d'alternative, dans les zones rurales, à ce secteur alimentaire orienté vers les exportations et pourvoyeur d'emplois substantiels.
Je ne crois pas qu'il y ait besoin d'instaurer des taxes à l'importation. C'est tout à fait à l'encontre de cet esprit de commerce et d'ouverture. Mais nous pratiquons en revanche des restrictions quantitatives sur les importations, notamment sur les marchés de produits dotés de labels. C'est du donnant-donnant. Pour l'accord économique et commercial global avec le Canada, nous avons ainsi pu, en autorisant l'entrée de viande bovine sur le marché européen, obtenir des débouchés pour les produits fromagers européens au Canada. Dans l'ensemble des accords de libre-échange que nous nouons, nous essayons donc d'atteindre un équilibre raisonnable.
Dans l'accord avec le Japon, des avancées ont été obtenues sur la question de la viande bovine qui pourront, je l'espère, compenser les pertes consenties dans le CETA. Peut-être cela permettra-t-il aussi de rééquilibrer certaines concessions que nous pourrons faire dans le cadre d'un accord avec le Mercosur. Il est nécessaire de comprendre ces équilibres, même s'il s'agit, bien sûr, de questions particulièrement sensibles.
Les organisations de consommateurs sont essentielles pour améliorer le résultat des négociations. Bien entendu, nous essayons de permettre aux coopératives et aux organisations de producteurs de faire entendre une voix forte. Nous les promouvons, nous nous efforçons d'en créer davantage et leur apportons un soutien financier lorsqu'elles souhaitent s'établir.
Quant à la date d'entrée en vigueur de la nouvelle PAC, la décision n'est pas entre mes mains, mais dans celles du Conseil de l'Union européenne et du Parlement européen. Je suis conscient qu'il faudra une réforme après 2020.
Je vois trois piliers constitutifs d'une politique agricole commune : économique, environnemental et social. Le pilier environnemental recouvre la problématique des contraintes naturelles, car il n'est bien sûr pas possible de mener les mêmes activités en plaine et en montagne. Mais le pilier économique est le plus important : il s'agit de garantir aux exploitants le meilleur niveau de vie possible, même s'il y aura toujours des périodes difficiles à traverser ; s'agissant du pilier social, je rappelle que non moins de 44 millions de personnes sont directement ou indirectement employées dans le domaine de l'agriculture, premier employeur d'Europe, dont dépendent beaucoup d'individus et d'entreprises.
Si la population mondiale croît de 40 % dans les trente-cinq prochaines années, et si la classe moyenne se développe, alors nous devons persévérer dans le domaine de l'agriculture, de la sécurité alimentaire et de l'alimentation de qualité, au sein de l'Union européenne et dans le monde.
Nous essayons de comprendre comment améliorer la mobilité pour les jeunes exploitants. L'Union européenne doit apporter de la valeur ajoutée, elle ne doit pas interférer, par exemple, sur des questions de fiscalité qui relèvent des États membres. Des incitations à des aides peuvent contribuer à mieux impliquer les jeunes dans la gestion des exploitations, de façon qu'ils puissent poursuivre le travail de leurs parents.
La question des loups se pose avec une acuité croissante et fait l'objet de discussions entre nous, mais elle relève moins de l'Union européenne que des États membres.
S'agissant de la position des exploitants dans la chaîne alimentaire, nous cherchons à bannir les pratiques déloyales et à améliorer la transparence. Nous constatons également que vingt-deux États membres ont eu le sentiment qu'ils devaient eux-mêmes se pencher sur la question, ce qui signifie qu'il y a un problème. La question qui se pose est de savoir comment harmoniser les systèmes au sein de l'Union européenne afin d'avoir un marché où tout le monde joue sur un pied d'égalité. Voilà le type de démarche que nous suivons. Une proposition sera déposée en 2018 à ce sujet.
Nous devons nous emparer de la question de l'agriculture de conservation, celle qui améliore le potentiel agronomique des sols. Nous nous faisons le chantre des pratiques respectueuses de l'environnement et nous continuerons dans cette voie. Dans le cadre du deuxième pilier, les États membres disposeront d'une flexibilité accrue pour apporter leur soutien à l'agriculture traditionnelle, s'ils souhaitent le faire. Des groupes leaders travaillent en ce domaine dans les États membres, pour comprendre comment venir en aide aux exploitants pour qu'ils puissent compter sur un soutien à leur revenu leur permettant de continuer à vivre dans leur zone rurale. Parfois, ils ne disposent pas de toutes les compétences, mais les compétences traditionnelles sont très intéressantes. Peut-être pourrions-nous, à cet égard, étendre notre offre culturelle et patrimoniale. Je soutiens donc tout à fait l'agriculture traditionnelle et je souhaite que nous la préservions.
Une proposition de réforme du marché du bio devrait bientôt être soumise aux institutions, l'objectif étant de diminuer les restrictions au commerce et d'étendre un certain nombre de dérogations. Notre objectif est aussi de réduire autant que possible le niveau des pesticides employés. Nous avons engrangé beaucoup de progrès au cours des dernières années, sans qu'il y ait de distorsions de marché, mais en offrant une certaine souplesse.
J'ai l'impression que la location de terres dans le Nord de la France par des Belges ou des Néerlandais pose beaucoup de difficultés. Mais je ne suis pas sûr d'avoir tout à fait suivi le problème. Peut-être serait-il utile de disposer d'une définition de l'agriculteur actif. Nous allons l'intégrer dans la consultation en cours auprès des exploitants, à qui nous demandons toujours de se définir. Il serait alors possible d'annoncer qu'aucune aide ne sera versée aux exploitants qui ne respectent pas cette définition de l'agriculteur actif. Cela pourrait permettre de régler cette question. Le règlement « omnibus » dans le domaine de l'agriculture sera achevé et présenté cette semaine. J'espère qu'il pourra entrer en vigueur dès le 1er janvier 2018. Il prévoira qu'aucun soutien ne soit apporté aux exploitants agricoles qui ne respectent pas un certain nombre de critères préalablement définis.
Le prix de la tonne de beurre atteindra bientôt 7 000 euros. L'OMS n'est peut-être pas étrangère à cette hausse, puisqu'elle affirmait auparavant que ce produit est mauvais pour la santé, avant, il y a deux ans, de changer d'avis… À nous voir, on comprend que nous aimons tous deux le beurre, Monsieur Éric Straumann (sourires.), et voilà qu'il serait bon pour nous ! En fait, comme pour tout aliment, le seul problème c'est la consommation excessive. Les indications de l'OMS ont poussé la demande. Si seulement il pouvait en aller de même pour le lait en poudre…
Nous essayons en tout cas de maintenir le prix du beurre à son bon niveau, alors qu'il faut reconnaître que le prix de la poudre de lait a beaucoup chuté. Je n'envisage donc pas d'intervention sur le marché du beurre, mais peut-être qu'il en faudra une sur celui du lait en poudre.
La question du bioéthanol relève plutôt de mon collègue chargé de l'environnement. Il est vrai que la cible de 7 % a été fixée pour 2030. Mais il faut rappeler que l'objectif réalisé n'est que de 4 %. Avec mon soutien, le commissaire chargé de l'énergie, propose 3,8 % dans la réglementation pour 2030. L'industrie n'a pas été en mesure de fournir les 7 %, mais seulement 4 %. Or, elle continue de mentionner 7 % comme objectif, au lieu de se fonder sur les 4 % obtenus. Entre 3,8 % et 4 %, la différence n'est pas si grande et ouvre la possibilité d'une convergence dans le cours de la procédure législative.
Vous avez raison, il ne sert à rien de faire encore avancer le bioéthanol si l'on considère que les investissements dans le bioéthanol de première génération ont permis de faire émerger un produit qui sera là pour longtemps. Mon conseil est vraiment de s'en tenir aux 4 %, car l'industrie n'a pas réussi à fournir les 7 %. Le secteur du bioéthanol et des biocarburants continuera ainsi à avancer jusqu'à 2030, au moins.