Intervention de Boris Vallaud

Réunion du mercredi 20 février 2019 à 9h30
Commission des affaires sociales

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaBoris Vallaud :

Depuis vingt mois, le Gouvernement n'a de cesse de proclamer qu'il faut que le travail paye, mais dans votre esprit cette formule n'est pas équivalent à un autre adage populaire selon lequel « tout travail mérite salaire », puisque ce n'est pas le salaire qui paye le travail mais la solidarité nationale, et singulièrement les retraités, dont vous avez augmenté la contribution sociale généralisée (CSG). Dans votre esprit, c'est même l'inverse puisque l'étude d'impact du PLFSS indique que le basculement des charges sur la CSG va entraîner « une convergence à la baisse des salaires bruts ». On voit bien que vous êtes sur une politique de modération salariale et certainement pas d'accroissement des rémunérations.

Pourtant, c'est bien la question des salaires qui est aujourd'hui posée, à l'aune d'une croissance qui, même si elle demeure modeste, a été retrouvée, d'une distribution sans précédent de dividendes par les grandes entreprises, et d'écarts de rémunération insondables et injustifiables. Depuis trente ans, la part des salaires dans la valeur ajoutée n'a cessé de baisser. Voilà pourquoi un certain nombre de pays compétitifs, l'Allemagne, les États-Unis, l'Espagne, se posent la question de l'augmentation du salaire minimum, et je crois que nous devons nous-mêmes nous poser cette question avec urgence.

Si notre groupe est favorable à ce débat sur l'augmentation du SMIC, nous souhaitons le corréler à d'autres sujets que vous avez écartés dans un certain nombre de débats parlementaires. Je pense à la question des écarts de rémunération, que nous avons voulus contenir. Emmanuel Faber, lorsqu'il était vice-président de Danone, faisait un calcul simple et disait : « Si nous diminuons de 30 % le salaire des 1 % de salariés les mieux payés de Danone, cela permettrait de doubler le salaire des 20 % les moins bien payés. » Vous voyez bien que le problème, dans ces grandes entreprises exposées à la concurrence internationale, ce n'est pas tant le SMIC que les rémunérations délirantes de leurs dirigeants.

Il faut également modifier la gouvernance d'entreprise. Il n'y aurait pas de rémunérations excessives ou de salaires ridiculement bas si les salariés étaient représentés comme il se doit dans les conseils d'administration. Il convient en outre de préférer les stratégies industrielles et la distribution de salaires aux dividendes.

Enfin, il faut se poser la question de la justice fiscale. Elle est posée dans le débat. Songez que, pour les 0,1 % de Français les mieux payés, le taux effectif d'imposition est de l'ordre de 25 % alors que, pour les salariés au SMIC, il est plutôt de 45 %. Voilà pourquoi on peut augmenter le SMIC si l'on pose une question bien plus large de justice dans l'entreprise et de justice fiscale.

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