Intervention de Marc Jedliczka

Réunion du jeudi 24 janvier 2019 à 11h00
Mission d'information relative aux freins à la transition énergétique

Marc Jedliczka, porte-parole de l'association Negawatt :

Vous connaissez l'importance pour Negawatt du vecteur gaz, qui sera en 2050 à égalité avec l'électricité. Il faut savoir que l'on consomme déjà aujourd'hui quasiment autant de gaz que d'électricité en France. La quantité a diminué, car des efforts d'efficacité ont été réalisés. À horizon 2050, il s'agira toutefois de gaz 100 % renouvelable, ce qui n'est pas le cas actuellement.

Je me permets d'insister sur le fait que cela ne constitue pas seulement un exutoire pour les effluents de pratiques agricoles, dont on sait pertinemment aujourd'hui qu'elles ne sont pas durables, mais représente également un enjeu agroécologique, qui va entraîner des évolutions dans les pratiques agricoles. Cette démarche est notamment très vertueuse du point de vue du sol. Cet élément essentiel, bien qu'il n'ait ni coût ni prix, mérite d'être intégré à la réflexion.

En termes d'usages, nous pensons que la mobilité doit être prioritaire, contrairement à la production d'électricité. Avoir favorisé la production électrique constitue selon nous une erreur ; l'exemple allemand en témoigne. Concernant le secteur du bâtiment, il existe à terme d'autres solutions pour le chauffage. Il faudra ainsi que les réseaux gaziers « sortent » des bâtiments pour aller vers le secteur des véhicules légers et poids-lourds, dans lequel le gaz est irremplaçable, car il s'apparente beaucoup au pétrole du point de vue de l'usage, contrairement à l'électricité, dont la place est plus modérée.

La méthanisation est aussi, dans une logique systémique de long terme, productrice de CO2. Le biogaz est en effet composé pour moitié de méthane et pour moitié de dioxyde de carbone, qui est un déchet du point de vue de la méthanisation, mais une ressource pour la méthanation, le power-to-gas, en complément de l'hydrogène.

Selon les informations dont je dispose, il semblerait que de grandes inquiétudes pèsent sur les évolutions possibles des mécanismes de soutien. L'appel d'offres constitue selon nous une très mauvaise solution pour la méthanisation, car ce procédé conduit à éliminer les petits opérateurs et à favoriser les grandes structures. Les projets mettent du temps à se développer et ont besoin de stabilité. Si l'on veut prendre en compte les enjeux territoriaux, il est important d'inclure les énergies renouvelables dans la réflexion. Cela impose de disposer de systèmes d'aides adaptés à la typologie des opérateurs. Du reste, l'appel d'offres n'est pas non plus une solution adaptée à l'éolien et au photovoltaïque. Nous pourrons en discuter ultérieurement si vous le souhaitez.

Un autre sujet d'inquiétude réside dans le fait qu'il existerait aujourd'hui des velléités d'augmenter le seuil de 15 % de cultures énergétiques, ce qui serait une grave erreur. On ne parle pas là de cultures intermédiaires, qui permettent au contraire de bénéficier d'un couvert végétal en l'absence de cultures principales, mais bien de cultures dédiées.

On a enfin le sentiment qu'il existe, parmi les objectifs de production de biométhane et plus généralement de biogaz, des doubles comptes entre la production d'électricité et l'injection dans le réseau. Il faut veiller à avoir des objectifs très clairs et distinguer le biométhane injectable ou utilisé en direct pour des usages cohérents de celui utilisé pour la production d'électricité, qui représente le passé et avec laquelle il faut vivre, mais qui ne doit pas être déduite des objectifs de la France en matière de production de biométhane.

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