… associés à cette idée. Or comme le souligne la Cour des comptes dans un rapport d'avril 2018, le bilan de ces aides fiscales est pour le moins mitigé, alors même qu'elles coûtent très cher – depuis 2009, la dépense qu'elles représentent est passée de 400 millions à 1,8 milliard d'euros.
Une politique d'un coût aussi élevé nous oblige à nous pencher sur les caractéristiques de ses bénéficiaires. On s'aperçoit alors qu'elle profite essentiellement aux bailleurs qui font partie du dixième le plus riche de la population : leur revenu médian est de 67 500 euros par an et ils sont tous propriétaires, par définition.
Le cas de la niche Pinel est tout à fait instructif à cet égard, puisque le coût annuel pour les finances publiques d'un logement financé par ce dispositif est deux à trois fois supérieur à celui d'un logement social. Le moins que l'on puisse dire est que des dispositifs inutilement coûteux et aussi discutables sur le plan de la justice sociale devraient être supprimés.
La réflexion sur les aides fiscales en matière d'acquisition foncière doit donc nous conduire à envisager d'autres politiques permettant d'encadrer le prix du logement et de limiter les logiques inflationnistes sur un marché qui, de l'aveu même des libéraux, faillit absolument à se réguler lui-même.
Nous proposons pour notre part une option raisonnable : que les aides publiques pour l'acquisition d'une propriété soient conditionnées à l'application d'un prix de revente encadré par la loi.
Une autre de nos propositions, qui mérite d'autant plus d'être discutée qu'elle est déjà mise en oeuvre dans notre pays, consiste à dissocier la propriété du bâti de celle du foncier. Si la puissance publique était propriétaire des terrains sur lesquels des immeubles sont construits, elle pourrait en effet mettre à la vente les appartements s'y trouvant. Un commissariat à l'aménagement pourrait être chargé de la coordination des établissements publics propriétaires du foncier, et le prix de vente des appartements serait décidé par le propriétaire du foncier.
Un tel établissement public existe à Lille et nous proposons d'étendre l'expérience à l'ensemble du territoire. Une telle dissociation permet en effet de déterminer des prix de vente inférieurs à ceux du marché immobilier, et donc de contrer ses dynamiques inflationnistes.
Car il nous faut revenir aux grands principes : pourquoi combattre les effets inflationnistes, si ce n'est pour rendre meilleure la vie de nos concitoyens ? Tel est le sens et la finalité de l'action politique.
La justice sociale doit nous pousser à orienter les aides publiques prioritairement vers le logement social. Or, sur cette question du logement social, l'idée que chacun se fait de la société est essentielle. La nôtre repose sur la notion de coopération et sur l'impératif absolu que chacune et chacun puisse disposer d'un logement digne. Il s'agit là de la seule priorité qui vaille, et les dispositifs fiscaux qui ont successivement été mis en place, dont la dernière mouture est la niche Pinel, ne correspondent en aucune façon à cette noble idée.
Pour notre part, nous nous y référons avec constance et souhaitons qu'elle guide les politiques publiques. Que nous puissions continuer à gaspiller autant d'argent dans ces niches alors que nos concitoyens sont si nombreux à ne pas disposer d'un logement digne et sain est incroyable ! D'autant plus que le déficit de logements sur ces trente dernières années s'élève à un million de logements, et que les subventions directes de l'État en faveur du logement social ont été divisées par six entre 1999 et 2015 et par trois depuis 2010.