Madame la présidente, Madame la rapporteure, Monsieur le rapporteur général, Monsieur le ministre, je tiens à vous redire succinctement pourquoi nous sommes opposés à la privatisation d'Aéroports de Paris.
Tout d'abord, c'est la première voie d'entrée sur le territoire national. Au moment où les Français veulent un meilleur contrôle de nos frontières, quelle drôle d'idée que de privatiser la principale ! C'est également une frontière extrêmement importante pour le tourisme : Aéroports de Paris est l'entrée et la sortie principales de notre pays. Le Gouvernement souligne souvent l'importance qu'il accorde au tourisme ; il devrait donc garder le contrôle d'Aéroports de Paris (ADP).
Ensuite, Aéroports de Paris est stratégique pour notre compagnie nationale, Air France. Toutes les grandes compagnies aériennes ont une base forte, un aéroport central, souvent contrôlé par l'État. Aéroports de Paris doit être celle d'Air France, pour que la compagnie nationale puisse développer toute sa puissance et poursuivre sa croissance. Les compagnies aériennes, réunies à Sydney en juin 2018, ont d'ailleurs appelé les États à garder la main sur leurs aéroports principaux. Les États-Unis, pays pourtant extrêmement libéral, ont d'ailleurs fait le choix de ne pas les privatiser : ce choix devrait nous interroger. À l'heure où le gouvernement néerlandais cherche à reprendre davantage la main sur Air France-KLM, nous devrions aussi nous interroger sur les moyens dont nous disposons pour aider la compagnie à être plus puissante.
Le seul grand aéroport privatisé est Heathrow, ce qui n'est pas sans lui poser problème. De même, en France, l'aéroport de Toulouse a été vendu à un actionnaire chinois sans aucune expérience aéroportuaire, qui s'apprête à le revendre avec une belle plus-value… C'est un fiasco pour l'État. Les acteurs locaux soulignent à quel point c'était une erreur de vendre l'aéroport de Toulouse à cet actionnaire.
C'est enfin un mauvais calcul économique : les dividendes générés par Aéroports de Paris et encaissés par l'État sont supérieurs à ce que va rapporter cette privatisation. Comme le disait mon collègue Daniel Fasquelle lors de la première lecture, c'est un moyen pour l'État d'alléger sa dette, mais c'est un calcul budgétaire à très court terme, et une très mauvaise affaire à long terme pour notre pays. À plus forte raison si, comme dans le cas des autoroutes, l'actif prend de la valeur – ce qui est à peu près certain grâce à la croissance du trafic aéroportuaire et au développement des boutiques d'aéroports. Comme pour les autoroutes, l'État pourrait le regretter dans quinze ans !
Du reste, si vous choisissez malgré tout de privatiser Aéroports de Paris – ce que nous ne souhaitons pas –, notre collègue Éric Woerth proposera à l'article 49 un amendement de repli, sous forme d'une « clause de revoyure », permettant à l'État de demander un complément de prix à l'éventuel acheteur en fonction des résultats d'ADP.