Intervention de François Ruffin

Réunion du mercredi 6 mars 2019 à 16h30
Commission spéciale chargée d'examiner le projet de loi relatif à la croissance et la transformation des entreprises

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaFrançois Ruffin :

J'aimerais comprendre, et j'aimerais que nos concitoyens comprennent, le mécanisme d'indemnisation pour le moins bizarre que vous avez imaginé. On décide de privatiser Aéroports de Paris, mais, pour ce faire, l'État va devoir payer ! On nous explique que c'est parce qu'on va passer d'une société à durée de vie illimitée à une concession de soixante-dix ans. On nous explique aussi qu'il faut prévoir une somme pour payer les actionnaires minoritaires au cas où une renationalisation aurait lieu dans soixante-dix ans – ce qui signifie que la France aura basculé dans le socialisme, ce que je souhaite ! C'est un mécanisme totalement fou : pour privatiser, on va devoir payer !

Ce que vous prévoyez me semblait tellement incompréhensible que j'ai demandé à mes collaborateurs si j'avais bien compris ! J'ai vérifié, lu tout ce que je trouvais sur la question et c'est bien cela : l'État va payer pour privatiser ! On prévoit d'ores et déjà de payer entre 500 millions et 1 milliard d'euros pour vendre le capital de l'État. Je ne suis pas le seul à trouver ce dispositif hallucinant : les gauchistes du Conseil d'État signalent eux aussi le caractère singulier de cette réforme et notent que le mécanisme sui generis d'indemnisation de la société ADP présente « une grande complexité ».

Le scandale suprême, c'est que Vinci gagne à la fois à l'aller et au retour ! Vinci gagne à l'aller, puisqu'on lui verse une indemnisation, au cas où, dans soixante-dix ans, une renationalisation absorbe les 8 % que cette société détient déjà dans le capital. Et Vinci gagne aussi au retour, puisque Vinci va augmenter sa part dans le capital d'Aéroports de Paris et en tirer des dividendes chaque année ! Ce serait un mécanisme tout à fait formidable !

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