Intervention de Régis Juanico

Réunion du mercredi 6 mars 2019 à 16h30
Commission spéciale chargée d'examiner le projet de loi relatif à la croissance et la transformation des entreprises

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaRégis Juanico :

M. Jacky Elton, un ancien joueur professionnel, disait qu'il existait un moyen facile de revenir d'un casino avec une petite fortune : y entrer avec une grande… C'est ce que vous vous apprêtez à faire, Monsieur le ministre, en privatisant ce qu'il faut bien appeler un joyau national.

Une chose est sûre : la privatisation de la Française des jeux (FDJ) sera une excellente opération financière pour l'investisseur privé qui se présentera. Outre que l'entreprise est fort bien gérée, la quatrième loterie mondiale, deuxième d'Europe, est un très bon placement, puisqu'elle réalise 180 millions d'euros de bénéfices, en augmentation de 40 % depuis 2015. Sa marge d'exploitation, proche de 15 %, est stable ; sa marge nette atteint 10 % et ses 26 millions de clients lui permettent d'afficher une trésorerie supérieure de 950 millions d'euros à ses dettes.

En cas de privatisation, l'État ne pourra plus profiter des dividendes qu'il touche de la FDJ – entre 90 et 100 millions d'euros chaque année. Il s'agit pourtant d'un placement sûr, puisque les mises augmentent chaque année de 4 à 5 % et que le chiffre d'affaires de l'entreprise croît de 3 à 4 %. Mieux vaudrait, comme pour ADP, affecter ces dividendes à un fonds d'innovation et de rupture, tout en restant majoritaire au capital de cette entreprise très bien gérée.

Le principal problème que pose la privatisation de la FDJ tient à la santé publique. Le jeu se développe : 56 % des Français jouent, et ils sont de plus en plus nombreux, les mises moyennes augmentent et les mises sur les paris sportifs sont en forte croissance – entre 2017 et 2018, on est passé, sous l'effet de la Coupe du monde de football, de 5 à 6,7 milliards d'euros. La question de l'addiction est posée et il faut mener une politique publique de jeu responsable. L'actionnaire privé qui entrera au capital de la FDJ ne sera-t-il pas tenté de maximiser sa rentabilité et ses dividendes en menant une politique commerciale agressive, « expansive », comme on dit, en allant vers des jeux plus lucratifs, donc plus addictifs ?

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