Intervention de Jean-Yves le Drian

Réunion du mercredi 19 septembre 2018 à 16h45
Commission des affaires étrangères

Jean-Yves le Drian, ministre de l'Europe et des Affaires étrangères :

En tout état de cause, il importe de lui redonner du souffle, et nous allons nous y employer dans le dispositif « 5 + 5 ». Une initiative sera prise dans les prochains mois.

En ce qui concerne Israël et la Palestine, je vais vous dire ce que je pense. La France s'est fixé un cadre – le droit international –, une méthode – la négociation – et un objectif : les deux États. Telle est la tradition historique de notre pays dans laquelle s'inscrit le Président de la République. Par ailleurs, une initiative américaine, que l'on ignore, est annoncée depuis l'élection du Président Trump, mais elle n'aboutit pas. Mon sentiment est qu'elle n'existe pas ou, si elle a existé, qu'elle a été retirée assez rapidement. En tout cas, en recoupant les informations que j'ai pu obtenir – car nous parlons avec tout le monde : le Président de l'Autorité palestinienne, qui sera à Paris après-demain, et le Premier ministre Netanyahu, qui est venu en France et que j'ai rencontré, ainsi que le Président israélien, lorsque je me suis rendu en Israël et dans les Territoires –, j'ai compris que ce plan pouvait, selon moi, se résumer de la manière suivante : les bantoustans plus les dollars. Or, ce n'est pas une solution. On sait, du reste, ce qu'il est advenu des bantoustans.

Toutefois, en cas de statu quo, la solution à deux États serait inévitablement caduque. Et ce n'est pas non plus une solution pour Israël, car cela aboutirait à la constitution de bantoustans ; se poseraient alors d'autres problèmes, notamment du point de vue du rapport de force démographique. On partirait dans une aventure qui, à mon sens, ne serait favorable ni à Israël ni aux Palestiniens.

Pour l'instant, nous sommes dans une position d'attente mais, si l'initiative américaine ne voit pas le jour, il nous faudra bien agir. Peut-être serons-nous amenés à prendre des initiatives dans quelques semaines, si nous constatons que nous sommes dans une impasse. Car rien ne serait pire qu'une absence de projet : le statu quo n'est pas une solution gérable sur le moyen terme parce qu'il serait conflictuel et serait un facteur de ruptures majeures.

Je n'ai pas répondu à votre question, monsieur Goasguen ; j'en suis conscient. Mais voilà où nous en sommes. Actuellement, le président Trump joue avec le feu. Le fait que la colonisation se poursuive sans que soit tracée la perspective de ce que pourrait être un scénario de sortie de l'impasse est anxiogène et aboutit à des désordres et à des conflits. Peut-être faudra-t-il, demain, prendre d'autres initiatives ; la France devrait pouvoir jouer son rôle, à cet égard.

Madame O, je vous propose que nous abordions plus longuement la situation des Ouïgours lors de l'audition que nous consacrerons à la Chine. En bref, je puis vous dire que j'ai très clairement évoqué cette question avec mes interlocuteurs chinois, vendredi dernier. Ce sont des sujets que l'on n'aborde pas forcément publiquement, car ce n'est pas toujours ainsi que l'on peut faire avancer les dossiers. Mais lorsque nous le pouvons, nous agissons concrètement.

J'ajoute, pour ne pas vexer M. Lecoq, que, concernant M. Fortin, notre action a commencé à produire des résultats puisqu'elle a permis d'accélérer la procédure judiciaire. J'ai en effet évoqué cette question avec le Premier ministre et le ministre des affaires étrangères. Le procès s'est tenu les 5 et 6 juillet derniers. Le jugement a été repoussé, mais nous souhaitons qu'il soit rendu le plus rapidement possible pour aboutir à un résultat. En tout cas, je remercie M. Lecoq d'avoir bien voulu reconnaître que notre action diplomatique, parfois discrète, donnait des résultats – je pense en particulier au cas de Mme Mangin.

S'agissant d'Idlib, madame Rauch, si le processus continue à progresser – vous avez pu observer que je m'étais exprimé avec beaucoup de précautions, car tout cela est récent –, nous mobiliserons, bien entendu, des financements pour permettre à l'aide humanitaire de parvenir aux populations de cette région. Comme nous l'avons fait pour la Ghouta, nous ferons en sorte, avec d'autres acteurs, pour que les populations soient soutenues.

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