Intervention de Jean-Yves le Drian

Réunion du mercredi 19 septembre 2018 à 16h45
Commission des affaires étrangères

Jean-Yves le Drian, ministre de l'Europe et des Affaires étrangères :

La sécurisation fait partie des sujets à traiter dans la période à venir.

Par ailleurs, nous n'avons pas de force spécifique à Idlib. Il faudrait interroger ma collègue Florence Parly à ce sujet, mais, à ma connaissance, les Frégate qui croisent en Méditerranée orientale relèvent d'un dispositif permanent : leur présence n'est pas spécifiquement liée à la situation à Idlib. J'ajoute, à ce propos, que nous avons eu une explication franche et musclée avec les Russes, qui auraient mieux fait, avant de nous accuser, d'examiner la situation : ce sont les Syriens qui leur ont tiré dessus. Ce n'est certes pas glorieux, mais c'est la réalité. Il ne faut pas accuser les autres de fautes qu'ils n'ont pas commises. En tout cas, les forces françaises n'interviennent pas dans cette zone. Du reste, la coalition n'est présente que dans le nord-est de la Syrie, là où se trouvait DAECH.

En ce qui concerne les échéances européennes, nous sommes dans une situation paradoxale, à un double titre. Premièrement, l'Union est attaquée et critiquée alors qu'elle accomplit de nets progrès, particulièrement depuis un an. La liste en est, du reste, spectaculaire. Sur des sujets dont on pensait qu'ils nécessiteraient beaucoup de temps, nombre de succès ont été remportés depuis le discours de la Sorbonne du Président de la République. Je pense à la protection sociale, aux engagements de Göteborg, que le président Juncker veut inscrire dans les textes, à la question des travailleurs détachés, à l'Europe de la Défense ou au vote qui vient d'intervenir sur le droit d'auteur sur le marché unique numérique et l'État de droit en Hongrie.

Bref, au moment même où elle est critiquée de toutes parts, l'Europe avance. Il faut donc que les Européens le disent et que nous-mêmes, nous rappelions cette réalité ! Le vote sur la situation de l'État de droit en Hongrie est essentiel à cet égard, car les droits de l'Homme et l'État de droit sont les fondements mêmes de l'Union européenne et la condition de la confiance mutuelle. Il nous faut donc être extrêmement vigilants sur ce point.

Second paradoxe : ceux qui sont favorables au « détricotage » de l'Europe considèrent qu'il faut se retirer des engagements communs et du multilatéralisme européens au motif que l'Union est un facteur d'immersion dans une mondialisation non maîtrisée. Or, ce faisant, ils renforcent le poids de celle-ci car l'addition des nationalismes n'a jamais tenu lieu de politique européenne et renforcerait, au contraire, la perméabilité des nations à la mondialisation.

Les forces respectives de la Chine, des États-Unis et de la Russie ainsi que les reculs du multilatéralisme sont un appel à renforcer l'Union européenne plutôt qu'à l'affaiblir. À cet égard, le discours de la Sorbonne est notre référence – ce sera l'enjeu des semaines qui viennent. Cela passe par un renforcement du partenariat franco-allemand. Nous entretenons, du reste, des relations extrêmement étroites avec la Chancelière, qui ne me paraît pas rencontrer de difficultés majeures sur ce sujet, au contraire. Ainsi, nous préparons le futur traité de l'Élysée, et tous les indicateurs que nous pouvons avoir sur le renforcement de nos liens avec l'Allemagne sont positifs. Mes relations avec mon homologue allemand, Heiko Maas, en particulier, sont très positives, de sorte que nous obtiendrons probablement des résultats forts dans le cadre de la définition du projet de nouveau traité de l'Élysée.

En ce qui concerne les enjeux du sommet de Salzbourg, qui a débuté cet après-midi, je précise qu'il s'agit d'un sommet informel, durant lequel aucune décision ne sera prise. Les questions du Brexit et des migrations y seront évidemment évoquées, mais le sommet formel se tiendra le 18 octobre. Ce sera une échéance majeure. Comme vous, je souhaite que nous puissions aboutir à un véritable accord de retrait avec la Grande-Bretagne et qu'une déclaration politique permette de définir ensuite de manière plus positive nos relations avec la Grande-Bretagne. Je ne fais pas de pronostics en la matière. On peut trouver un accord, encore faut-il qu'il soit ensuite validé par le parlement britannique. J'espère néanmoins que nous pourrons aboutir à un accord de retrait qui soit reconnu de part et d'autre.

J'observe – puisque j'ai évoqué la bonne tenue de l'Europe – que, face à la crise commerciale transatlantique, celle-ci est unie et déterminée. Elle n'a pas hésité à prendre des contre-mesures face à l'offensive américaine. De même, sur la question iranienne, elle est unie, conserve la même position et cherche des solutions. Lorsqu'on évoque l'Europe, il importe de souligner tout ce qui marche et de montrer, a contrario, dans quelle situation nous nous trouverions si le pacte européen était rompu.

Madame la présidente, mesdames, messieurs les députés, je suis désolé, mais je suis obligé de vous quitter car je dois m'entretenir au téléphone avec un de mes homologues étrangers, et je ne veux pas reporter cette conversation.

Je répondrai donc plus longuement la prochaine fois à la question de Mme Le Peih sur la préparation de la COP24. En deux mots : c'est compliqué. La réunion de préparation qui s'est tenue à Bangkok s'est plutôt bien passée. Mais l'enjeu est important puisqu'il s'agit de définir le cadre de l'application de l'accord de Paris – le manuel de l'utilisateur, en quelque sorte. Or, lorsqu'on aborde les sujets concrets, les discussions se compliquent, pour des raisons liées à des questions financières et aux différences d'approches entre les pays développés et les pays en voie développement. Néanmoins, tout notre appareil diplomatique est mobilisé pour que la COP24 se déroule bien.

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