J'ai dit le compromis adopté au cours de la négociation à propos du climat. Mais le Pacte enclenche un processus permanent, puisque sont prévus une conférence de suivi tous les quatre ans et un rapport du Secrétaire général de l'ONU tous les deux ans. Cela permettra de prendre en considération l'évolution de la situation mondiale pour procéder aux adaptations jugées nécessaires, et sans doute la question des migrations climatiques reviendra-t-elle avec plus de force ; il restera à définir quelles solutions pratiques peuvent être acceptées par tous les États.
Si l'on excepte la défection d'un petit nombre d'États – une douzaine si l'on tient compte des États-Unis, qui ont décidé en décembre dernier de ne plus s'associer à la négociation, mais qui avaient participé aux réunions thématiques et régionales –, le mérite de ce Pacte est son quasi-universalisme, en dépit de toutes les difficultés, différences et même tensions qui se manifestent dans certains pays au sujet des questions abordées. En dépit de questionnements légitimes d'un côté et de l'autre, on a réussi à élaborer un texte assez substantiel qui, de l'avis des co-facilitateurs, et des autorités françaises puisque nous avons décidé d'y souscrire, représente le meilleur compromis possible en une matière complexe et passionnelle. Livrant son sentiment aux Européens à l'issue de la conférence de Marrakech, Mme Louise Arbour, représentante spéciale du secrétaire général des Nations unies pour les migrations internationales, disait que l'on peut regretter telle défection ou telle réaction mais que, dans les circonstances politiques présentes, le résultat obtenu est estimable.
Il faut envisager le Pacte de la sorte, puis le mettre en pratique, en sachant que sa mise en oeuvre sera décidée par les États. Pour ce qui est de la coopération interétatique, je crois beaucoup à ce qui est fait sur le plan bilatéral et sous-régional. La France est engagée à la fois sur le plan bilatéral et avec ses partenaires européens dans un dialogue avec certains pays de transit et de pays d'origine. Ce Pacte ne peut que nous encourager à poursuivre ce dialogue, en nous donnant une toile de fond, une référence utile pour préserver la responsabilité partagée et le partenariat, évitant ainsi que tout parte dans tous les sens. En l'an 2000, il y avait 173 millions de migrants internationaux ; quinze ans plus tard, ils étaient 244 millions. Le mouvement est effectivement en phase d'accélération, pour des raisons multiples : le développement démographique, la mondialisation, et, de manière générale, la mobilité humaine, de caractère temporaire ou plus permanent. Il était donc grand temps de se mettre d'accord. Le texte n'est pas un idéal : certains estiment qu'il va trop loin, d'autres qu'il ne va pas assez loin. Que des critiques contraires s'expriment à son sujet me semble indiquer que l'on est sur la bonne ligne de crête.