Intervention de Thierry Delville

Réunion du mercredi 6 mars 2019 à 16h15
Commission d'enquête sur la situation, les missions et les moyens des forces de sécurité, qu'il s'agisse de la police nationale, de la gendarmerie ou de la police municipale

Thierry Delville, ancien délégué ministériel aux industries de sécurité et aè la lutte contre les cybermenaces :

L'effort de modernisation des infrastructures que j'ai mentionné inclut les commissariats et les brigades de gendarmerie sur l'ensemble du territoire.

Les ingénieurs en cybersécurité sont une denrée rare et très recherchée. Je rencontrais aujourd'hui même le directeur d'une école d'ingénieurs de la région parisienne, avec lequel j'explore des pistes pour identifier des profils atypiques.

J'aime citer à ce propos une anecdote particulièrement éclairante. Elle nous renvoie en 1988, lorsque j'étais affecté aux activités micro-informatiques de la direction des transmissions et de l'informatique – devenue depuis la direction des systèmes d'information et de communication (DSIC). À l'époque, les ordinateurs commençaient à peine à se doter de disques durs. L'un de nos agents les plus brillants en développement micro-informatique était un gardien de la paix. Jusque-là chauffeur au service central automobile, il avait été repéré car il développait en hexadécimal à ses heures perdues – autant dire qu'il était capable d'entrer dans les profondeurs de la machine. Nous étions en charge du suivi des résultats lors des soirées électorales. Le système principal était confié à un important industriel, qui faisait le lien entre les préfectures et le ministère de l'intérieur. Notre gardien de la paix avait pour sa part développé un réseau de secours. Un soir d'élection où le ministre a demandé une représentation des résultats dans un format non prévu par le prestataire, celui-ci s'est montré incapable d'y répondre. Il n'a fallu qu'une demi-heure à mon collègue gardien de la paix pour concevoir une solution ad hoc.

Les acteurs de la cybersécurité ont conscience qu'ils ont intérêt à offrir une deuxième chance à des talents qui n'ont suivi les cursus traditionnels. Je pense notamment à des jeunes diplômés d'écoles de commerce, qui ne s'épanouissent pas dans les affaires mais possèdent des bases mathématiques. Je pense aussi à des personnes qui ont pris des chemins tout autres, mais qui ont une appétence particulière pour l'informatique. Des initiatives commencent à apparaître pour tirer parti de ces talents.

Au-delà de la formation, l'enjeu majeur sera de fidéliser ces professionnels. Nul doute, en effet, qu'ils seront démarchés par des acteurs privés capables de leur proposer des rémunérations alléchantes.

Une mise à niveau des personnels est de surcroît nécessaire, via la formation continue. Il faut fait l'effort d'extraire des agents de leur activité quotidienne pour les inscrire dans des cycles longs de formation. C'est d'ailleurs l'occasion de faire monter en gamme et de réorienter des personnels – sachant que quiconque entre désormais sur le marché du travail est appelé à exercer trois ou quatre métiers.

Les JO ont pour partenaire informatique un porte-drapeau de l'industrie et de l'expertise françaises. Un écosystème est en train de se mobiliser dans le cadre de la filière, dans la perspective des JO de Paris en 2024. Ces jeux devront être une réussite en termes d'innovation et de démonstration de notre savoir-faire. Selon qu'elles se sont tenues à Londres, à Rio ou ailleurs, les éditions précédentes n'ont pas suscité les mêmes enjeux d'intelligence économique et de politique industrielle. Nous devrons être capables de mettre des solutions innovantes au service de tous ceux qui prendront part aux JO de Paris.

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