S'agissant de la réforme des études médicales, l'augmentation du nombre de postes d'internes dans certaines régions pose avant tout la question de la disponibilité des terrains et des maîtres de stage, plus que celle de l'encadrement par des enseignants titulaires. Concernant l'encadrement et le développement des stages ambulatoires, nous devons poursuivre l'effort, créer des postes d'enseignants associés de médecine générale et voir comment étendre ce statut à d'autres spécialités.
Il faut aussi accompagner la mobilité des internes, pour que des internes acceptés dans une région A puissent effectuer un ou deux stages dans un service très spécialisé d'une région B. Cette question de la mobilité se pose de façon générale. Cela fonctionne déjà dans certaines régions, par exemple dans le regroupement des CHU du Grand Ouest (HUGO). Nous cherchons à encourager ces regroupements, notamment en Île-de-France. Je rejoins ce que disait Agnès Buzyn sur le consultanat ; ce dispositif permettrait également d'augmenter les capacités de stages.
Il est déjà possible de faire intervenir des patients, et certaines universités le font, à une échelle encore trop faible cependant. Cela relève des textes réglementaires. Il sera possible de rendre obligatoire la présence de représentants des usagers dans les jurys d'admission de premier cycle ou pour l'évaluation des compétences en fin de second cycle, qui pourrait avoir un effet levier sur le comportement des acteurs de santé.
Pour ce qui est du tronc commun d'enseignement entre les différentes filières médicales et paramédicales, c'est ce que nous avons fait, en créant le service sanitaire, où il existe une formation à la prévention de plusieurs professionnels issus des différentes filières, que nous faisons ensuite travailler ensemble pour monter des actions de prévention. Le processus d'universitarisation des professions paramédicales va dans ce sens. Il faudra repenser les maquettes du premier cycle. Les conditions y sont favorables. Nous encouragerons les acteurs à s'emparer le plus rapidement possible de ces questions.
S'agissant de la réduction du taux d'inadéquation des postes proposés aux étudiants en fin de deuxième cycle, je ne crois pas aux mesures coercitives. À quoi bon forcer les étudiants, pour que les enseignants en médecine générale ou en médecine du travail se retrouvent avec un tiers de leur effectif qui rechigne à déménager et à s'investir, et préfère repasser les épreuves ou se former en Europe ? Les possibilités de contournement ne manquent pas, si bien que la coercition fonctionne assez moyennement : un nombre non négligeable de médecins renonce même à exercer la médecine. Il faut trouver un équilibre. Nous cherchons plutôt des moyens incitatifs.
Pour aider les ARS à définir la meilleure adéquation entre la nature des besoins en santé et la formation universitaire, la conférence régionale de la santé et de l'autonomie est une bonne idée. Cela pourrait même favoriser le développement de terrains de stage dans le secteur médico-social. C'est en tout cas une piste à creuser.
Pour ce qui est de la recertification, si nous y travaillons pour les médecins, je suis favorable à ce que cette politique de certification et de formation tout au long de la vie soit étendue à toutes les professions de santé.
J'en viens aux moyens nécessaires pour accompagner l'accueil des étudiants, et notamment pour leur permettre de poursuivre leurs études dans d'autres filières que celles de la santé. J'entends bien cette demande qui, vous l'imaginez, me remonte par divers canaux ; mais en fait, la grande majorité de ces étudiants sont d'ores et déjà recyclés dans les filières universitaires. Il ne faut pas croire que le nombre d'étudiants qui se réorienteront va changer ; a priori, il devrait même diminuer un peu en raison de la suppression du numerus clausus. C'est plutôt la façon dont on pense les aménagements, les orientations et les poursuites d'études qu'il faut revoir. J'ajoute que l'on pourra compter sur toutes les universités qui actuellement n'ont pas de composantes de santé. Mais il ne faut pas s'attendre à voir des dizaines de milliers d'étudiants supplémentaires arriver dans les universités : de fait, ils y sont déjà. Nous allons travailler pour faire en sorte qu'ils n'échouent pas, en tout cas pour qu'ils soient mieux accompagnés.
La question de l'orientation et de l'information est cruciale de façon générale. Un important travail d'orientation est réalisé dès le lycée, et une sensibilisation à un certain nombre de métiers doit avoir lieu avant le lycée. C'est un processus général que nous envisageons avec Jean-Michel Blanquer : au-delà de l'information sur les professions médicales, il faut entreprendre un important travail de connaissance des métiers qui actuellement fait défaut. On demande toujours aux jeunes de se positionner par rapport à un diplôme, et non par rapport à un métier. Pour ce faire, il conviendrait qu'ils puissent rencontrer des gens qui exercent avec passion un métier, puis qu'on leur explique quels sont les différents chemins pour y accéder. C'est pour cela que nous avons travaillé avec l'ONISEP pour transformer en profondeur les plateformes d'information et d'orientation. Dorénavant, on peut se renseigner sur un diplôme, mais aussi sur un métier, et l'on voit apparaître toutes les formations qui y conduisent. Ce travail devra évidemment se poursuivre.
La question de l'autocensure avant de démarrer des études de médecine est très prégnante : bon nombre de jeunes hésitent à l'idée de s'engager dans un système où ils risquent d'avoir perdu deux années s'ils échouent au concours et de devoir recommencer leurs études en « année zéro ». Le système de progression qui sera mis en place à la suite de ce projet de loi, et qui permettra à un étudiant qui aura réussi son année de rejoindre des professions réglementées devrait contribuer à réduire ce phénomène d'autocensure – c'est en tout cas ce que nous espérons fortement. Le fait que l'on puisse aussi démarrer ses études en proximité en levant la barrière du déménagement obligatoire pour rejoindre une université avec une composante santé devrait également faciliter l'engagement des jeunes.
J'en viens à la question du handicap. Là encore, la diversification de l'accès aux études de santé permet d'avoir des parcours plus adaptés. Ils sont déjà prévus dans les arrêtés de licence, mais ils ne concernaient pas jusqu'à présent la PACES. Bien évidemment, nous sommes prêts à travailler sur toute amélioration que vous pourriez proposer en ce sens.