Je sais que beaucoup d'entre vous sont sollicités sur cette question de l'installation. Mais je pense qu'il faut qu'on aborde les choses non pas en termes de droit de liberté individuelle, mais de pragmatisme.
Beaucoup d'entre vous ont dit qu'il faudrait favoriser l'installation dans les zones sous-dotées et l'empêcher, ou sélectionner, ou faire un conventionnement sélectif dans les zones sur-dotées. Mais soyons clairs : si le zonage des zones sous-denses pose déjà beaucoup de problèmes aux élus et aboutit à beaucoup de réclamations, je n'ose imaginer la joie qu'il y aurait à définir des zones sur-dotées… À qui va-t-on dire : vous n'avez plus le droit à de nouveaux médecins ? Je voudrais savoir lequel d'entre vous va participer à cet effort collectif et dire qu'il est implanté dans une zone trop dotée en médecins !
Une des données du problème est que les jeunes médecins, aujourd'hui, ne souhaitent pas s'installer en libéral et qu'une majorité d'entre eux préfèrent un exercice salarié. Il nous faut donc rendre l'installation libérale plus attractive. Pensez-vous que l'obligation de s'installer pendant trois ans dans une zone sous-dense, ou le conventionnement sélectif, va amener nos jeunes médecins à avoir envie de s'installer, alors que des milliers de postes de médecins salariés sont vacants ? Je vous rappelle aussi que 70 % des jeunes médecins qui sortent des études de médecine sont des femmes. On peut s'attendre à voir formuler des demandes de médecins salariés en médecine de santé, en médecine du travail, en médecine scolaire, dans l'industrie pharmaceutique…
Plus nous serons coercitifs, moins il y aura d'installations tout court. Notre but, c'est au contraire de rendre l'exercice attractif et, partant, de rendre les territoires attractifs. Pour cela, nous avons fait le choix de répondre aux attentes des jeunes médecins, à savoir l'exercice coordonné ou l'exercice regroupé.
Il s'agit de favoriser des maisons de santé pluriprofessionnelles (MSP), les centres de santé, les CPTS, les modes d'exercice où les médecins se coordonnent avec d'autres professionnels de santé, les délégations de tâches, par exemple pour le suivi des pathologies chroniques, que d'autres professionnels peuvent assurer. C'est un choix totalement inverse des propositions que vous faites aujourd'hui. Certes, elles répondent à une demande, mais elles n'apportent qu'une réponse simpliste, totalement contre-productive dans la situation que nous connaissons aujourd'hui, à savoir une situation de sous-effectif médical global dans notre pays.