Intervention de Barbara Pompili

Séance en hémicycle du vendredi 15 mars 2019 à 15h00
Croissance et transformation des entreprises — Article 8 bis b

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaBarbara Pompili :

Toutes les études montrent que la transition écologique crée plus d'emplois qu'elle n'en détruit. Nous avons donc collectivement intérêt, pour notre économie, pour notre industrie, pour l'avenir de nos territoires, à nous engager en force et avec toute notre volonté dans la transition écologique.

S'engager dans la transition écologique, cela veut dire être offensif, et ne pas être sur la défensive.

Cela veut dire ne pas, à chaque fois que l'on cherche à faire progresser l'écologie, avoir peur parce que des emplois devront être détruits.

Il ne le faut pas, car précisément parce qu'on aura anticipé, certains territoires seront prêts à affronter ces défis.

Nous créerons de l'espoir, de nouvelles filières et des formations qui nous permettront justement de relever ce beau défi qui est devant nous : préserver l'avenir de nos enfants, tout simplement.

C'était la première chose que je voulais dire.

Un point, à ce stade de nos débats, me pose problème : il va vraiment falloir que nous nous posions des questions sur le fonctionnement de notre Parlement, parce que le fait que nous votions quelque chose qui soit ensuite remis en cause cinq mois plus tard dans une autre loi pose problème.

Il va donc falloir que nous y réfléchissions collectivement, parce que l'on ne peut pas sans arrêt défaire ce que l'on a fait : je trouve qu'en termes de crédibilité des travaux de notre assemblée, c'est un sujet de réflexion.

Pour en venir à celui qui nous préoccupe, c'est-à-dire la question des produits interdits en Europe et que nous produisons pour les exporter dans des pays tiers, j'ai proposé deux amendements.

Le premier, portant le no 1227, est simple : il vise à supprimer cet article en vue de revenir à ce qui avait été voté lors de la loi EGALIM afin de respecter les principes que je vous ai exposés tout à l'heure.

J'ai eu l'occasion de discuter avec Mme la secrétaire d'État, et je la remercie d'ailleurs de ces temps d'échange au cours desquels nous avons pu essayer d'identifier les problèmes, les tenants et les aboutissants.

Elle m'a effectivement alertée à cette occasion sur un certain nombre d'emplois qui étaient menacés, une situation nécessitant peut-être, en effet, de prendre un peu plus de temps.

J'ai entendu cet argument : il me semble que même s'il y a aujourd'hui urgence à agir, on peut aussi essayer d'être réaliste et de se donner un peu de temps.

On m'a également dit : vous savez, les entreprises qui sont en face de nous sont un peu cyniques, et le jour où ladite production sera interdite, elles déménageront pour délocaliser leurs chaînes de production en Allemagne.

Tout d'abord, ce petit chantage à l'emploi commence à être un peu fatigant : il faut que nous fassions attention à ne pas y céder à chaque fois, pour les raisons que je vous ai expliquées tout à l'heure.

De fait, si nous menons le combat uniquement en France, il est vrai que nous loupons à mon sens une étape : il faut donc évidemment que le combat que nous menons en France soit mené en parallèle au niveau européen, et même au niveau international.

C'est d'ailleurs ce que fait le Président Macron : il participait hier au One planet summit. Aujourd'hui, la France prend à Nairobi des engagements justement sur les produits chimiques, afin d'éviter leur dissémination dans le monde.

Nous prenons donc des engagements internationaux.

Je vous propose par mon second amendement, qui porte le no 1224, de prendre un tout petit peu plus de temps, c'est-à-dire de reporter l'interdiction à 2025.

Je vous propose également de nous engager, à l'occasion de la campagne en vue des élections européennes, pour faire en sorte qu'en 2025, au moment où interviendra l'interdiction française, elle se double d'une interdiction européenne.

Un tel scénario couperait un peu l'herbe sous le pied à ces entreprises cyniques qui nous font du chantage.

Je tiens aussi à dire que cette volonté d'anticipation doit être prise très au sérieux, parce que l'histoire nous a malheureusement montré que les scandales arrivent vite.

Le scandale de l'amiante a fait des dégâts très importants. Du jour au lendemain, des entreprises ont fermé.

N'oublions pas, et je sais que nos collègues de l'outre-mer y sont très sensibles, le scandale du chlordécone. Nous ne pouvons pas continuer à faire comme si cela n'existait pas.

Pourquoi ai-je employé cette dernière expression ? Parce que nous disposons de données qui nous ont été transmises par le Gouvernement concernant les emplois qui sont menacés : si nous pouvons discuter des chiffres, nous disposons de ces données.

Disposons-nous, en revanche, de données précises concernant les conséquences sanitaires et environnementales de nos productions et de nos exportations ?

Non, nous n'en disposons pas, parce qu'il est difficile de les obtenir. Nous n'en disposons également pas parce que, quelque part, si on ne sait pas, ça n'existe pas.

Combien de personnes dans le monde connaissent-elles cependant de graves problèmes de santé à cause des produits que nous leur vendons ?

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