Intervention de Bruno le Maire

Séance en hémicycle du vendredi 15 mars 2019 à 15h00
Croissance et transformation des entreprises — Article 9

Bruno le Maire, ministre de l'économie et des finances :

En l'espèce, nous ne pouvons nous en prendre qu'à nous-mêmes, car c'est nous qui avons surtransposé, qui avons établi des règles trop strictes.

Celles-ci ont-elles un coût pour les PME ? Oui : il est en moyenne de 5 550 euros par an, ce qui n'est pas négligeable. Au total, l'ensemble des mandats situés entre 2 millions à 3 millions et les 8 millions fixés par la directive européenne représente 700 millions d'euros de charges financières pour les PME. À titre de comparaison, l'allégement proposé sera plus important que celui qui concerne l'intéressement à la participation. Il ne s'agit donc pas d'une peccadille. Ces 700 millions pèsent lourdement sur les finances des PME.

Je connais vos arguments : la certification des comptes, me direz-vous, protège les PME et réduit le nombre de défaillances. Nous avons tenu à vérifier ce point auprès de la Banque de France : il n'est pas avéré.

Vous ajouterez que l'obligation de recourir à des commissaires aux comptes protège fiscalement les entreprises. La DGFIP – la direction générale des finances publiques – ne confirme pas cette analyse.

Dans ces conditions, pourquoi imposer aux PME 700 millions de charges supplémentaires, imputables à la surtransposition d'une directive ? Cela dit – Mme Louwagie a raison d'insister sur ce point – , il ne faut pas agir de manière brutale.

Comme l'a dit à juste titre votre excellent rapporteur, il faut prendre conscience du travail accompli ! Je veux bien tout entendre dans cette assemblée, mais il y a des limites ! Notre analyse nous ayant conduits à constater une surtransposition, nous proposons de « désurtransposer » et de nous aligner sur la règle commune européenne. On nous rétorque que c'était dangereux, ce qui nous amène à demander un rapport à l'inspection des finances. Les commissaires aux comptes nous disent alors que le rapport était technocratique et qu'ils ne se reconnaissent pas dans ses conclusions, jugées beaucoup trop brutales. J'aurais très bien pu répondre que ce rapport valait ce qu'il valait, mais qu'il était honnête et devait être appliqué. Tel ne fut pas le cas : j'ai reçu longuement, à plusieurs reprises, les commissaires aux comptes, et leur ai proposé que soit élaboré un deuxième rapport, à la rédaction duquel ils seraient associés. Cela a débouché sur le travail remarquable de M. de Cambourg – je tiens à lui rendre hommage – , qui a nécessité du temps et dont nous reprenons quasiment l'intégralité des propositions.

Permettez-moi de rappeler certaines d'entre elles, qui ne sont pas négligeables, loin de là : mission d'audit simplifiée pour les petites entreprises et mission d'audit pour les petits groupes ; instauration d'une passerelle offrant la possibilité aux titulaires du certificat d'aptitude aux fonctions de commissaire aux comptes de s'inscrire à l'ordre des experts-comptables ; développement de l'expertise-comptable pour les petits cabinets d'audit ; reconnaissance du statut d'expert-comptable en entreprise ; fixation d'honoraires liés au succès des missions réalisées ; possibilité de gérer les créances et les paiements de dettes pour le compte de leurs clients ; reconnaissance d'un mandat implicite d'intervention auprès de l'administration fiscale. Nous avons ajouté dans la loi ces propositions très concrètes pour tenir compte des attentes et des inquiétudes des experts-comptables.

Je veux le dire aussi en mon ancienne qualité d'élu, en quittant l'espace d'un instant mon habit de ministre de l'économie et des finances : je sais fort bien que beaucoup de cabinets sont inquiets, notamment parmi les petits, qui se demandent comment ils vont survivre, quels mandats ils pourront obtenir, quelles possibilités de développement s'offriront à eux. Nous avons essayé de répondre du mieux possible à leurs attentes et à leurs inquiétudes.

On me dit que ce n'est pas assez ; je reste ouvert à des propositions d'amélioration. Comme Denis Sommer l'a justement dit, le projet de loi en faveur des professions de commissaire aux comptes et d'expert-comptable contiendra un certain nombre de propositions.

Vous m'avez également interrogé sur l'outre-mer. Je connais suffisamment l'outre-mer pour constater que les cabinets y exerçant sont fragiles et encourent le risque d'une disparition pure et simple, …

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