Mes chers collègues, des pays européens ont commencé à mettre en oeuvre l'heure d'été à la fin des années soixante, essentiellement dans le but de réaliser des économies d'énergie. La France l'a fait en 1976. Afin d'unifier les pratiques et les dates nationales de passage à l'heure d'été, une première directive a été adoptée en 1980. Elle a été remplacée par la directive du 19 janvier 2001 qui prévoit l'obligation pour tous les États membres de passer à l'heure d'été le dernier dimanche de mars et de revenir à l'heure légale, dite « heure d'hiver », le dernier dimanche d'octobre. Ce système de changements d'heure semestriels est contesté par un nombre croissant de citoyens, d'États membres et par le Parlement européen.
La Commission européenne a procédé à une consultation publique, entre le 4 juillet 2018 et le 16 août 2018, qui a reçu 4,6 millions de réponses faisant apparaître que 84 % des répondants étaient favorables à la suppression des changements d'heure semestriels. Convaincue de l'importance de continuer à disposer de règles harmonisées au niveau de l'Union européenne afin de garantir le bon fonctionnement du marché intérieur, la Commission européenne a proposé le 12 septembre 2018 une nouvelle directive mettant un terme aux changements d'heure saisonniers dans l'Union européenne, tout en veillant à ce que les États membres demeurent compétents pour décider de leur heure légale. La proposition de directive prévoit une date d'application au 29 mars 2019 et un choix par défaut (mais non obligatoire) de l'heure d'été. La semaine dernière, le 4 mars, les députés de la commission du Parlement européen chargée des transports ont adopté un rapport préconisant que la fin du changement d'heure intervienne en 2021 (plutôt qu'en 2019) et qu'un mécanisme de coordination soit mis sur pied afin de s'assurer que les États membres auront une approche harmonisée pour le choix de leur fuseau horaire. Ce choix d'opter pour l'heure d'été permanente ou l'heure d'hiver permanente aurait des conséquences pour la France qu'il faut soigneusement évaluer. C'est dans ce contexte que la Commission des affaires européennes de l'Assemblée nationale a organisé une consultation publique en ligne entre le 4 février et le 3 mars 2019. Cette consultation a rencontré un énorme succès puisqu'elle a totalisé 2 103 999 participants.
Les principaux résultats sont les suivants : il se confirme que le changement d'heure est massivement contesté puisque 61,16 % des répondants ont une expérience négative ou très négative du changement d'heure, 83,71 % des répondants sont favorables à la fin du changement d'heure deux fois par an. S'agissant du choix du fuseau horaire, l'heure d'été l'emporte puisque 59,17 % des répondants ont choisi cette option contre 36,97 % pour l'heure d'hiver : 46,62 % pour préserver la santé et les rythmes biologiques ; 22,15 % des répondants expliquent leur choix par leur volonté de permettre le développement d'activités de loisirs en fin de journée ; 10,16 % pour favoriser les économies d'énergies ; 10,72 % pour assurer un bon fonctionnement des échanges avec les pays voisins ; 8,93 % par mesure de sécurité routière.
En cas de suppression du changement d'heure, chaque pays pourra décider de son fuseau horaire : 51,29 % des répondants souhaitent que la France choisisse le fuseau UTC +2 (temps universel coordonné + 2) qui est notre heure d'été actuelle en France métropolitaine ; 36,71 % des répondants sont pour UTC +1, notre heure d'hiver actuelle ; 12 % sont pour UTC +0 (l'heure d'hiver en vigueur au Portugal et au Royaume-Uni).
Les résultats selon les régions métropolitaines sont les suivants : 20 % des répondants ont déclaré résider en Ile-de-France ; 14 % en Auvergne-Rhône–Alpes ; 9,3 % en région PACA ; 8,2 % dans la région Grand Est ; 6,65 % dans les Hauts-de-France ; 5,65 % en Bretagne ; 5,16 % en Pays de la Loire. Si les répondants métropolitains les plus favorables à la fin du changement d'heure résident en Ile-de-France, les écarts sont très faibles entre les régions métropolitaines, les réponses variant entre 81 et 85 %.
À la question sur le choix de l'heure d'été ou de l'heure d'hiver toute l'année : les résidents de Corse sont les plus nombreux à choisir l'heure d'été, suivis par ceux des régions Grand Est et PACA. Sans surprise, la Normandie, les Hauts-de–France, l'Ile-de-France sont les moins favorables à l'heure d'été.
À la dernière question portant sur le choix du fuseau horaire en cas de suppression du changement d'heure, les répondants des régions Corse, Grand Est, Normandie, PACA sont les plus nombreux à choisir UTC +2 ; les répondants des régions Bretagne, Centre, Hauts de France préfèrent UTC +1 ; dans les régions Bretagne, Centre, Ile-de-France, Hauts-de-France, Normandie et Pays de Loire, les répondants sont les plus nombreux à choisir UTC +0. Il apparaît clairement que le choix du fuseau horaire est corrélé avec la région d'appartenance des personnes qui ont participé à la consultation.
Cette consultation publique a permis de dégager des tendances nettes au sein de l'opinion publique. Il nous revient de les relayer. C'est l'objet de cette communication. Il me semble essentiel que la Représentation nationale joue un rôle d'interface entre les citoyens et l'Union européenne. Après l'expression des groupes politiques au sein de notre commission et la consultation du Gouvernement, le résultat de cette consultation sera transmis aux institutions européennes dans le cadre du dialogue politique instauré entre la Commission européenne et les Parlements nationaux.
Cette consultation publique a également permis de donner une grande visibilité à notre commission, ce dont je ne peux évidemment que me féliciter. Les médias ont abondamment relayé l'existence de cette initiative de la commission. Pour être tout à fait complète, j'ajoute que la participation exceptionnelle à cette consultation, qui n'était pas un sondage, montre combien, lorsque les citoyens identifient clairement l'impact concret des enjeux européens sur leur vie quotidienne, ils s'y intéressent d'autant plus. La demande de débat sur les sujets européens est grande dans notre pays et je m'en réjouis.