Syntec Numérique s'est effectivement engagé de longue date, par l'intermédiaire de son comité Santé, sur ces questions. Je souhaiterais simplement compléter la présentation que vous en avez faite, et dont je vous remercie, en précisant que nous représentons aujourd'hui environ 80 % de l'écosystème du numérique, qui correspond à quelque 500 000 emplois en France. Nous comprenons, comme vous l'avez indiqué, des organisations différentes, puisque nous réunissons à la fois une trentaine de grands groupes, très médiatiques, mais aussi, à l'autre bout du spectre, 850 start-up. En tant qu'écosystème du numérique, nous ne sommes par ailleurs pas essentiellement consacrés à la santé. Toutes les entreprises adhérentes sont présentes en France, mais certaines d'entre elles sont également internationales.
Il me semble important de souligner ces différents aspects dans la mesure où ils nous permettent d'avoir une vision sur la santé émanant de spécialistes, mais aussi de généralistes s'adressant à l'ensemble des secteurs, la particularité de nos entreprises étant justement d'aider les autres entreprises et secteurs de l'économie à évoluer sur la voie du numérique et du progrès.
Pourquoi avoir mis en place ce comité Santé ? Nous avons estimé, voici une dizaine d'années, qu'il était nécessaire, à partir de la connaissance des différents adhérents composant notre organisation, de nous pencher plus précisément sur le champ de la santé, car nous percevions déjà tout le potentiel du numérique dans ce domaine, à une époque où il n'était pas encore considéré comme un vecteur de transformation du secteur. Nous ne pouvons par conséquent que saluer le virage pris récemment, consistant à placer le numérique au coeur de la stratégie de transformation du système de santé.
Le numérique conduit tout naturellement à aborder la question de la gestion des données. Gérer les données est véritablement un métier. Lorsqu'il s'agit de données sensibles telles que les données de santé, on comprend immédiatement l'importance, comme l'a souligné David Gruson, d'élaborer un cadre éthique et de sécurité. J'y reviendrai.
Quelque 150 entreprises, généralistes et spécialistes, contribuent aux travaux de notre comité Santé sur l'IA et la donnée de santé, mais aussi sur le sujet des plateformes et des infrastructures numériques, ainsi que des objets connectés. Bien qu'ils s'agissent de groupes de travail différents, tous sont liés par le sujet commun de la gestion des données.
Syntec Numérique a par ailleurs lancé l'an dernier un grand débat sur la donnée, que vous avez pu suivre, et travaille également, en commissions, sur le sujet de l'éthique et de la cybersécurité.
Nous considérons que la gestion de la donnée est aujourd'hui un véritable métier. Nous nous positionnons ainsi depuis plus de dix ans en co-construction de ce que ceci implique sur le terrain. Nous avons ainsi salué et contribué à l'émergence du projet Health data hub, dans le prolongement de la mission conduite par M. Villani sur l'intelligence artificielle.
Nous observons qu'il est essentiel de structurer une filière des données de santé en tant que telle. Nous employons à dessein le terme de « filière » dans la mesure où nous considérons que la gestion des données concerne non pas un, mais des métiers. Ce sont pour la plupart des métiers nouveaux. Plusieurs intervenants précédents ont rappelé l'importance de la formation et des compétences. Il s'agit d'un sujet d'attention, voire de préoccupation, que nous souhaitons également porter. Nous constatons en effet, chez certains de nos adhérents, un manque cruel de compétences, assez paradoxal dans le paysage économique actuel caractérisé par un virage numérique global. Nous souhaitons ainsi relayer avec force cet appel à la formation. Syntec Numérique s'est investi de longue date dans ce domaine, avec différentes actions. Il ne s'agit pas uniquement de former des professionnels des technologies, mais aussi d'acculturer les personnes dont le métier est appelé à se transformer pour s'adapter à ces nouveaux modes de fonctionnement. Quelque 10 000 offres d'emplois restent chaque année à pourvoir et cette situation est appelée à empirer au fil du temps si l'on n'y prend garde. Il s'agit donc d'un point d'attention absolument essentiel.
Nous souhaitons aussi que cette filière des données de santé soit en phase avec l'évolution de l'économie et du potentiel d'innovation autour de la data médicale. Ceci signifie qu'il faut veiller à ce que ces données circulent. Le Health data hub constitue une première brique. Citons également l'Espace numérique de santé, autre projet inclus dans le plan « Ma santé 2022 ». Ce sont des éléments essentiels pour que les données de santé soient une source d'amélioration au service des patients et des professionnels de santé. Il s'agit à présent d'organiser ces travaux, de les sécuriser, mais aussi de s'attacher à valoriser les données de santé.
Ces différents axes appellent à chaque fois des initiatives et des compétences.
En ce qui concerne la sécurisation des données, nous avons accompagné un sujet sur lequel la France est précurseur, à savoir la sécurisation de l'hébergement des données de santé. La France a innové dans ce domaine, avant même l'arrivée du règlement général européen sur la protection des données. Nous avons salué l'intérêt de cette démarche, tout comme le passage de cette réglementation à une certification basée sur des standards internationaux. En effet, lorsqu'il s'agit de créer une filière de données de santé, il faut être vigilant et créer un cadre permettant la fluidité de l'information en toute sécurité, mais aussi ne pas se cantonner à un cadre français et s'appuyer sur des standards internationaux. Cette dimension est essentielle.
Il est également très important de sécuriser les systèmes d'information et le socle technologique de base. Si l'on veut déployer une filière de données de santé, il faut évidemment que ces données s'appuient sur un socle technologique solide. Ceci a constitué un sujet d'inquiétude de longue date dans les travaux du comité Santé, notamment au vu du sous-investissement historique réalisé en France dans ce domaine, ce qui est finalement assez logique puisque le numérique n'était jusqu'alors pas considéré comme un vecteur de transformation.
Nous pensons qu'il est nécessaire de déployer des outils technologiques pour veiller à la circulation de ces données. Il est question également d'authentification, d'accessibilité, d'hébergement. Tout ceci fait appel à des compétences et à des outils technologiques, à la construction desquels nous sommes disposés à contribuer.
Nous accordons en outre une grande importance au respect des droits de la personne. Syntec Numérique et le CIGREF ont ainsi élaboré un référentiel pratique destiné aux acteurs, afin de favoriser les questions d'éthique du numérique. Nous estimons que dans nombre de cas la notion de tiers de confiance doit être considérée comme un élément essentiel de la constitution de cette filière de santé. Nous souhaitons, par ce biais, encourager l'innovation et le développement de la médecine de prévention, qui s'appuie forcément sur l'utilisation de données de santé venant de différentes sources.
Voici, pour moi et pour les adhérents de l'organisation que je représente, les éléments essentiels de ce tournant numérique en cours, que nous saluons.