Intervention de Olivier Clatz

Réunion du jeudi 21 février 2019 à 9h00
Office parlementaire d'évaluation des choix scientifiques et technologiques

Olivier Clatz, fondateur de Therapixel, start-up d'édition de logiciels d'imagerie médicale :

J'ai effectué une estimation du temps que nous passions chaque mois pour récupérer 10 000 données d'examens : ceci nous prend six hommes-mois. J'ai eu la semaine dernière un rendez-vous avec un établissement à Chicago, qui est l'un des dix plus gros systèmes de santé américains : nous avons réussi à faire en environ cinq minutes l'équivalent du travail de dix hommes-an, car les données étaient structurées, les patients avaient toujours le même numéro, l'on disposait de toutes les images, de toute l'anatomopathologie, de l'ensemble des comptes rendus. Ceci rend assurément les choses beaucoup plus faciles.

Fort de ces expériences, je me permets de vous proposer un certain nombre de recommandations.

La première consiste à s'assurer que l'on mette vraiment en oeuvre l'utilisation du NIR, pourquoi pas avec un volet incitatif. Dans son rapport, Jean-Marc Aubert suggérait de chambouler les règles des remboursements avec une dimension qualité. Je pense que l'un des points importants de la qualité est de s'assurer que les données sont associées aux bons patients. L'un des leviers les plus importants de l'État étant, comme l'a rappelé M. Longuet, la contrainte, il serait possible d'exercer une certaine contrainte dans ce domaine et de s'assurer que l'on dispose des bonnes données pour les bonnes personnes.

Aujourd'hui, il existe par ailleurs autant de logiciels que d'établissements de santé. Chaque cabinet, chaque hôpital a son logiciel, qui ne communique pas avec les autres. À l'heure d'internet, ceci pose problème et l'on aurait tout intérêt à centraliser au minimum la gestion des données. L'État devrait ainsi reprendre la main sur les données, sans bien entendu empêcher le développement d'applications industrielles comme celles que nous mettons en oeuvre. Mon rêve est de pouvoir disposer en France d'un système tel que celui existant aujourd'hui en Estonie. L'exemple de l'établissement de Chicago est également parlant. L'idéal serait ainsi de disposer d'un système de santé intégré, capable de rassembler toutes les données (images, données génétiques dans les limites de ce que la loi permet, données d'anatomopathologie, etc).

Certaines solutions sont en cours de mise en oeuvre. Selon le rapport de la mission confiée à Dominique Pon et Annelore Coury, l'Espace numérique de santé devrait permettre cela. Je pense par conséquent qu'il importe de soutenir très fortement cette initiative, notamment financièrement. Or la loi ne précise pas où trouver les financements nécessaires en investissement et en fonctionnement, qui sont certainement de l'ordre de plusieurs centaines de millions d'euros.

À titre personnel, je m'interroge, relativement au projet de loi, sur la capacité offerte aux citoyens d'effacer leur propre dossier. Je pense en effet que, si la communauté rembourse ou soutient le système de santé et permet d'obtenir ces données numériques, alors le citoyen devrait, en retour, donner accès aux informations le concernant et ne pas pouvoir les supprimer. Il s'agit là d'un avis personnel, autour d'une question qui mériterait selon moi d'être débattue à l'Assemblée nationale.

Il faudrait bien entendu intégrer dans cet Espace numérique de santé les données massives. Il existait dans le DMP une recommandation contraire. Ce serait dommage, à l'ère du big data.

L'un des points majeurs est aussi de veiller à bien structurer la connaissance médicale, de la mettre dans des cases, afin de pouvoir ensuite exploiter plus facilement les données.

Comme il en a été beaucoup question précédemment, je n'insisterai pas sur l'importance de disposer d'un outil tel que le Heath data hub, agile, capable de mener les recherches que nous avons mentionnées, dans l'intérêt public ou pour les entreprises.

L'Espace numérique de santé permettrait par ailleurs de récolter le consentement ou l'opposition, chaque patient étant informé dans ce cadre des recherches effectuées sur ses données.

Il est, pour toutes ces raisons, très important de soutenir le développement des outils que sont le Health data hub et l'Espace numérique de santé, en leur octroyant les moyens et toute la souplesse nécessaires.

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