Je répondrai aux interventions des orateurs inscrits sur l'article et profiterai de l'examen de ces amendements de suppression de l'article 10 pour préciser à nouveau l'ambition du Gouvernement à son sujet, car il constitue une pièce maîtresse de notre stratégie de transformation du système de santé.
Les GHT sont issus de la loi du 26 janvier 2016 de modernisation de notre système de santé. Ils ont pour objet de favoriser l'accès à des soins sécurisés de qualité, par le biais d'un renforcement de la coopération entre les établissements publics de santé d'un même territoire.
Le présent projet entend renforcer la dynamique de coopération et d'intégration en matière hospitalière, afin d'éviter les compétitions entre hôpitaux. Les lignes de force définissant les mesures prévues par le projet de loi consistent d'abord à recentrer les GHT sur les enjeux de transformation des organisations médicales et soignantes.
Des efforts importants ont été consentis en matière de mise en commun des fonctions de support. Ce matin, Jean-Carles Grelier a notamment évoqué la fonction achats, qui est effectivement mutualisée.
Cela a pu susciter – je le reconnais – un décentrage de l'ambition de la réforme au profit d'une intégration principalement administrative. Pourtant, l'ambition de la nouvelle étape que nous voulons faire franchir aux GHT vise bien à replacer le projet médico-soignant partagé au coeur de la réforme.
Pour ce faire, deux mesures sont prévues. La première est l'intégration de la gouvernance clinique, par le biais de l'intégration des commissions médicales de groupement. Notre ambition est de faire en sorte que certaines décisions médicales soient prises de façon plus collective, à l'échelon du GHT, afin de soutenir l'émergence de filières médicales structurées en son sein, de renforcer la gouvernance médicale dans sa gouvernance d'ensemble et de faire émerger une fonction de président de commission médicale de GHT, qui serait l'homologue médical du directeur de l'établissement support.
J'ai bien présent à l'esprit qu'il faudra veiller à protéger la gouvernance clinique, laquelle doit être maintenue à proximité, notamment dans le cadre de la réforme des hôpitaux de proximité.
La seconde mesure consiste en la mutualisation de la gestion des ressources humaines médicales. Nous voulons nous assurer que les priorités en la matière seront cohérentes avec la stratégie médicale du GHT et que les GHT abandonneront toute pratique concurrentielle, dont je prendrai pour exemple le dumping que nous constatons s'agissant de la rémunération ou des intérims.
Nous voulons également que les GHT permettent d'augmenter la visibilité des opportunités de déroulement de carrière pour les praticiens, afin d'améliorer l'attractivité des postes. Il nous incombe de définir en conséquence la ligne de partage entre établissements de santé et GHT. Toutefois, afin de ne pas ralentir la gestion quotidienne, les responsabilités seront dupliquées.
J'entends bien les quelques inquiétudes exprimées par les médecins, qui craignent un alourdissement des circuits de décision et doutent que les rôles respectifs du GHT et des établissements de santé permettent de conjuguer fluidité et stratégie de groupement. Nous tirerons les leçons de l'expérience de la mutualisation des fonctions achats.
Le deuxième volet de la réforme proposée par le présent projet de loi vise à soutenir les GHT s'agissant de leur capacité d'approfondir leur intégration, par le biais d'un droit d'option, permettant aux GHT volontaires de conclure un unique contrat pluriannuel d'objectifs et de moyens – CPOM – avec l'ARS.
Cela favorisera également une politique d'investissement unifiée, avec un plan global de financement pluriannuel et un plan pluriannuel d'investissement uniques. La trésorerie pourra aussi être mutualisée.
Enfin, cela permettra de fusionner des instances de même famille, à l'exception des commissions des usagers et des conseils de surveillance, soit la commission médicale d'établissement – CME – , le comité d'hygiène, de sécurité et des conditions de travail – CHSCT – , le directoire et la commission des soins infirmiers, de rééducation et médico-techniques – CSIRMT. Ce sont là des pas d'intégration complémentaires, qui doivent simplifier le fonctionnement des GHT et garantir un alignement stratégique des parties.
Vous l'avez compris, il s'agit d'un droit d'option, donc de l'ouverture d'une possibilité d'intégration accrue, et non d'une obligation faite aux GHT. Comme tout droit d'option, il sera soumis à l'accord des établissements concernés.
Le modèle cible, sur les divers sujets, n'est pas encore arrêté, pour plusieurs raisons. Tout d'abord, celui-ci ne dépend pas uniquement de la mesure prévue : il interagit fortement avec d'autres dispositions du projet de loi.
Tel est notamment le cas de la mutualisation de la gestion des ressources médicales, qui interagit avec l'unification du statut de praticien contractuel, et de la révision des compétences des CME, qui dépend quant à elle de la réforme des hôpitaux de proximité.
Par ailleurs, une fois l'objectif affiché, il faut définir les modalités opérationnelles du processus d'autorisation d'activation du droit d'option ainsi que la ligne de partage entre GHT et établissements de santé en matière de gestion des ressources humaines médicales.
C'est pourquoi l'article 10, après avoir édicté des principes fondamentaux, comporte des mesures d'habilitation à légiférer par ordonnances. Je souhaite prendre le temps de définir le modèle cible, en concertation avec les partenaires concernés représentant les hôpitaux et les professionnels.
Ces travaux de définition ont débuté au début du mois de mars, dans le cadre de groupes de travail. Une trentaine d'ateliers de coconstruction, pilotés par la direction générale de l'offre de soins – DGOS – sont programmés d'ici l'été.
S'agissant de la place des parlementaires, j'ai dit et je répète que je souhaite bien évidemment vous associer aux travaux, ainsi que les sénateurs. Nous avons aujourd'hui un débat sur les dispositions de l'article ; nous en aurons un autre lors de la ratification des ordonnances.
Par ailleurs, je me suis engagée à présenter ces dernières à la commission des affaires sociales, une fois qu'elles seront rédigées. Vous disposerez également d'une étude d'impact, afin qu'aucune décision ne vous soit cachée.
Nous avons fait le choix de l'efficacité, en mettant à profit le présent projet de loi. Je pense, en conscience, que l'on peut travailler en recourant à des ordonnances si l'on est exemplaire s'agissant de la logique de travail avec les parlementaires et de l'aboutissement des processus de concertation avec les professionnels et les autres parties prenantes.