Je m'exprimerai au nom de ma collègue Mathilde Panot qui ne peut pas être présente.
Le secteur associatif souffre dans le pays. Le groupe parlementaire du MODEM en a pris conscience, comme en témoigne cette proposition de loi, dont nous saluons l'esprit et la démarche, à laquelle nous avons l'intention de contribuer. Nous savons pouvoir compter sur la bonne volonté de nos collègues du MODEM pour favoriser la construction en commun d'un texte bénéfique à l'ensemble des associations de notre pays. Les associations en ont bien besoin, tant elles ont été maltraitées pendant les quinquennats précédents mais aussi, reconnaissons-le, par celui-ci.
Avant d'entrer dans le détail du texte, revenons en effet sur la brutalité inouïe avec laquelle des contrats aidés, par centaines de milliers, ont été supprimés en France ces dernières années. Les chiffres sont éloquents. De 459 000 emplois aidés en 2016, nous sommes passés à 320 000 en 2017 puis 200 000 en 2018. En 2019, l'horizon est encore plus sombre, puisque nous comptons moins de 100 000 contrats. Vous connaissez tous l'importance fondamentale des contrats aidés pour la vie des associations. Autant dire que nous sommes heureux de vous voir déposer une proposition de loi en faveur d'une dynamique nouvelle du secteur associatif, alors que le groupe majoritaire que vous soutenez malgré tout entend le dévitaliser.
La surprise est d'autant plus belle que nous portons ce combat avec énergie, tant nous savons ce que le pays doit aux femmes et hommes qui, sans relâche, s'engagent dans les associations qui, trop souvent, comme vous le notez dans l'exposé des motifs, remplacent la République là où elle manque à son devoir.
Ma collègue Mathilde Panot, dont je rapporte les propos, a elle-même travaillé à Grigny, dans une association fondée sur un principe de solidarité. En son nom, j'adresse un salut fraternel aux habitants et habitantes avec lesquels elle a travaillé. Elle ne les oublie pas et son combat politique, comme le mien, porte sur ce qu'il est impossible d'accomplir au seul niveau associatif. Merci pour ce qu'ils lui ont apporté.
C'est par solidarité et sens de l'engagement humain, souvent, que l'on travaille dans les associations. On y accepte parfois des conditions de travail difficiles, beaucoup d'heures peu payées, pour une raison fondamentale aux yeux de Mathilde Panot, qui est à l'origine de son engagement politique : l'attachement indéfectible et profond à la fraternité humaine.
Venons-en au fond, dont il est important de discuter, après avoir rendu hommage à nos concitoyennes et concitoyens qui se battent, dans les associations sociales, écologiques, d'intérêt public, pour que le monde soit meilleur, pour ne pas laisser s'abattre partout, dans un mouvement terrible de rage aveugle, la compétition généralisée et le mépris pour l'autre. Bravo à toutes et tous, salariés et bénévoles, dont l'action quotidienne permet de résister aux coups inlassables et insensibles des pouvoirs de l'argent. La République les laisse bien souvent seuls. Montrons que nous sommes une assemblée responsable et à la hauteur de l'article 1er de notre Constitution, qui définit notre République « indivisible, laïque, démocratique et sociale ».
Si notre République doit être indivisible, elle doit garantir l'égalité territoriale, qui passe par le rétablissement de services publics locaux dignes de ce nom. Les pouvoirs publics ne peuvent constamment se dédouaner de leurs responsabilités et compter sur l'engagement immense des forces associatives. Bien entendu, une telle réorganisation, efficace et juste, de l'action publique, n'entrerait pas dans le cadre de cette proposition de loi. Nous proposons toutefois, comme le premier jalon d'une telle entreprise, d'ajouter dans l'objet du rapport proposé à l'article 5 un état des lieux des services publics auparavant assurés directement par l'État et les collectivités territoriales. Nous manquons en effet cruellement d'éléments, en dépit de la manie contemporaine de l'évaluation permanente, quant à l'évaluation des impacts sociaux et environnementaux de la baisse des dotations des collectivités territoriales et de la délégation générale des services publics.
Si notre République doit être démocratique, il faut assurer la cohérence de cette proposition de loi. C'est le sens de l'amendement que nous déposons à l'article 2. Le système de mutualisation des trésoreries ne doit pas avantager les puissantes fondations, qui vassaliseraient les plus petites associations. Trop de systèmes coopératifs ont connu cette tournure désagréable et il nous semble essentiel d'éviter cet écueil. C'est pourquoi nous proposons que la loi soit précise et conforme à l'impératif démocratique de notre République. « La stratégie commune définie » que vous mentionnez devrait l'être, selon nous, en fonction d'un principe qu'aucun d'entre vous ne renierait : un organisme, un droit de vote. J'espère que vous adopterez cet amendement, qui ne modifie pas en substance le texte, et permet de le préciser dans un sens qui ne me semble pas étranger à celui que vous souhaitez lui donner.
Si la République doit être sociale, enfin, il faut donner aux associations les moyens de fonctionner sans être soumises à des frais bancaires prohibitifs. Nous proposons donc des taux bancaires gratuits pour les associations déclarées d'utilité publique. Notre pays en compte 1 891. Le secteur bancaire pourrait sans difficulté majeure contribuer de la sorte à l'intérêt général. Toutes les énergies de notre pays doivent servir cette tâche politique majeure de soutenir et d'appuyer notre tissu associatif.
Si nos collègues de la majorité souhaitent toujours libérer les énergies, nous leur montrons cette autre voie possible, qui s'inscrit dans l'esprit du texte. Nous souhaitons en modifier la lettre à la marge, sur des points de précision qui sont essentiels, tout en restant fidèles à son esprit.
L'État et les collectivités territoriales doivent reprendre pleinement leurs responsabilités, partout où ils les ont abandonnées. Le Gouvernement doit cesser d'enlever des moyens au secteur associatif. Il faut lui donner pleine liberté, ne pas le laisser dépendre des intérêts privés, et favoriser partout les initiatives qui servent l'intérêt général.