Intervention de Marielle de Sarnez

Séance en hémicycle du vendredi 29 mars 2019 à 9h30
Sécurité et santé dans l'agriculture — Présentation

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaMarielle de Sarnez, présidente de la commission des affaires étrangères :

Un grand merci, d'abord, à Martine Leguille-Balloy pour son rapport très complet et très précis, qui a servi de base à un débat approfondi sur cette convention en commission.

La France est un grand pays agricole. À ce titre, nous avons une responsabilité particulière dans la promotion de normes sociales et sanitaires pour les travailleurs agricoles du monde entier. Dans une économie mondialisée, nous ne pouvons nous désintéresser des conditions de travail dans les pays de provenance des produits que nous importons.

Cette responsabilité est d'autant plus importante que les populations les plus vulnérables sont aujourd'hui concentrées dans le secteur agricole. L'agriculture mondiale, c'est 70 % des enfants qui travaillent dans le monde ; dans les pays en développement, les femmes représentent plus de la moitié de la main-d'oeuvre agricole, mais leur accès à la terre est beaucoup plus difficile qu'il ne l'est pour les travailleurs masculins ; il leur est même parfois interdit.

Notre devoir de vigilance est d'autant plus grand que les normes sociales appliquées dans le secteur agricole restent très inégales selon les pays, quand elles ne sont pas inexistantes. Dans ce contexte, comme l'a dit notre rapporteure, la ratification de cette convention manifestera l'attachement de la France à la diffusion de standards de protection partout dans le monde.

L'agriculture est un enjeu essentiel, et en particulier dans nombre de pays en développement.

L'Afrique, par exemple, dispose d'un potentiel de ressources immense ; on y trouve près de 65 % des terres arables non cultivées dans le monde. Pourtant, le continent africain souffre d'un déficit commercial en matière agricole et doit importer pour plus de 35 milliards de dollars de produits agricoles chaque année. L'agriculture y représente plus de la moitié des emplois, mais seulement un quart du PIB. Ainsi, l'Afrique produit près des trois quarts du cacao mondial, mais seulement 16 % du cacao moulu.

C'est là, à mon sens, qu'est l'urgence : l'Europe doit repenser son partenariat avec l'Afrique, à commencer par ses accords de libre-échange, en particulier en matière agricole. Nous, l'Europe, et nous, la France, devons exercer une pression sur l'ordre international pour créer un nouvel équilibre qui préservera les ressources naturelles et les terres cultivables des pays en développement. On ne peut accepter que les ressources naturelles et les terres cultivables de l'Afrique fassent l'objet d'une véritable razzia au profit de la seule industrialisation chinoise. Ces ressources appartiennent aux Africains !

Mais il faut aussi envisager le long terme. Parce que le secteur agricole représente près de 14 % des émissions mondiales de gaz à effet de serre, l'agriculture durable est une nécessité pour l'avenir de notre planète et pour le développement économique. Il faut l'intégrer à la lutte contre le réchauffement climatique et à la promotion du développement durable.

En conclusion, je veux rappeler que la santé et la sécurité au travail sont des sujets sur lesquels le droit de l'Union européenne a permis des avancées majeures, notamment la diffusion de standards partagés pour les travailleurs européens, en dotant les États membres de bases communes.

Dans ce contexte, la question de la protection des travailleurs agricoles devra occuper une grande place dans les négociations de la prochaine politique agricole commune. Ces évolutions sont indispensables pour surmonter les défis qui sont aujourd'hui ceux de l'Europe agricole, tout en pensant le nouvel équilibre mondial agricole, au profit des pays en développement.

C'est pourquoi je suis naturellement favorable à la ratification de cette convention.

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