Intervention de Roxana Maracineanu

Réunion du mercredi 20 mars 2019 à 16h30
Commission des affaires culturelles et de l'éducation

Roxana Maracineanu, ministre des sports :

Monsieur le président, cher Bruno Studer, mesdames et messieurs les députés, je vous remercie pour cette audition qui va me permettre de vous présenter ma feuille de route.

En préambule, j'évoquerai ce qui nous réunit ici : le sport. Pour beaucoup, le sport est un formidable vecteur d'épanouissement, que ce soit pour les sportifs – pratiquants de haut niveau ou amateurs – ou pour les spectateurs, les éducateurs, les dirigeants ou les arbitres. Pour moi, il a été vecteur de valeurs éducatives, de solidarité et de respect, et il a fait du progrès le moteur de ma vie.

Aujourd'hui, en tant que ministre, ma priorité consiste à agir sur les quatre fondamentaux du sport que sont l'éducation, la cohésion, la performance et l'intégrité. Ma feuille de route comprend donc deux axes principaux : premièrement, agir pour le sport, deuxièmement, mener des politiques publiques par le sport – en d'autres termes, agir par le sport.

Agir pour le sport, c'est agir pour le développement de la pratique sportive à tous les âges de la vie – donc dès le plus jeune âge –, de manière adaptée et sur tous les territoires, pour la haute performance du sport français. Si je crois profondément que l'État a un rôle majeur d'impulsion pour développer la pratique du sport dans notre pays, le sport est aussi utile dans de nombreux secteurs de la société, que ce soit en permettant à des enfants en décrochage de reprendre goût à l'école, en jouant un rôle dans la réinsertion de nombre de nos concitoyens, en réveillant les corps dans les EPHAD, en permettant à des personnes atteintes de cancer de supporter des traitements de plus en plus lourds, ou en remettant en mouvement des personnes sédentarisées – les exemples sont infinis.

Le sport est aussi source de valeur en matière économique. La filière sport en France pèse 37 milliards d'euros, soit un peu plus de 1,7 % du PIB, et le Président de la République nous a fixé l'objectif de porter ce chiffre à 2 %.

Pour répondre à ces enjeux, nous devons nous réinventer, être plus agiles dans nos méthodes et notre mode de fonctionnement – c'est tout le sens de la création de l'Agence nationale du sport. Pour être efficace, l'État doit plus que jamais se tourner vers l'ensemble des acteurs du sport français au sens le plus large : le mouvement sportif et handisport, les collectivités territoriales, mais également le mouvement économique et social, ce qui est nouveau. À travers l'agence, nous souhaitons adopter un mode de gouvernement ouvert, fondé sur la transparence, la collaboration des acteurs et la participation du plus grand nombre. Je crois beaucoup à cette horizontalité nouvelle : un État qui s'engage et prend ses responsabilités, qui garde la main mais qui la tend vraiment.

Les cinq années qui nous séparent des Jeux olympiques et paralympiques de 2024 sont une occasion unique de donner envie de sport à notre nation et de répondre aux objectifs fixés par le Président de la République : réussir ce grand événement sportif, culturel et populaire que sont les Jeux, mais aussi augmenter le nombre de pratiquants sportifs dans notre pays. Donner une autre place au sport dans la société, telle est mon ambition. Ce sera un héritage majeur des jeux, ainsi que le fil rouge de la feuille de route que je vais vous présenter maintenant.

Agir pour le sport, c'est d'abord renforcer l'éducation à l'activité physique. De ce point de vue, l'abaissement de la scolarité obligatoire à trois ans offre des perspectives particulièrement prometteuses.

J'insisterai ici sur l'aisance aquatique, qui me semble être un enjeu majeur à la fois pour la motricité et pour la sécurité publique, compte tenu du nombre de noyades observé dans notre pays, en particulier chez les enfants de moins de six ans. Je souhaite promouvoir l'acquisition précoce de l'aisance aquatique et, pour démocratiser cet apprentissage, je diffuserai dès le mois d'avril un tutoriel à destination des parents afin de leur apprendre des gestes et des conseils pour familiariser leurs enfants à l'élément aquatique, leur faire franchir les premières étapes vers un déplacement en sécurité dans l'eau, leur permettre d'y être à l'aise en vue de l'apprentissage dans le cadre scolaire ou associatif – et, qui sait, peut-être leur sauver la vie.

Puis, avant la fin de l'année scolaire, avec M. Jean-Michel Blanquer, nous réaliserons un enseignement pilote à destination des classes de maternelles, consistant à expérimenter des cours de natation groupés pendant une semaine à raison de deux séances quotidiennes – ou pendant quinze jours à raison d'une séance par jour –, de façon que les enfants ne perdent pas leurs acquis d'une séance sur l'autre. Il s'appuiera sur de nouvelles méthodes d'apprentissage de la natation. Il me semble que l'objectif du service public de l'éducation est précisément de mettre en place de telles mesures. Afin qu'il soit clairement affiché, je proposerai donc un amendement au projet de loi pour une école de la confiance.

Tout à l'heure, à l'occasion de nos échanges, je pourrai évoquer l'expérimentation basée sur le principe « école le matin, sport l'après-midi » – ou l'inverse – ainsi que le parcours sportif tout au long de la vie, indissociable d'une meilleure reconnaissance des compétences développées grâce au sport – dont le principe va, je l'espère, s'imposer progressivement au sein de l'éducation nationale.

Ma politique « pour le sport » présente des objectifs forts de cohésion et de mixité sociale. Agir sur le pilier « cohésion du sport », c'est être en situation de proposer une véritable accélération politique pour le handisport et le sport paralympique. Dans ce domaine, nous sommes en train d'élaborer, avec les principaux partenaires du handisport et du sport adapté que sont le comité paralympique et sportif français (CPSF), les départements, les fédérations homologues, la fédération française du sport adapté (FFSA) et la fédération française handisport (FFH), une stratégie que je présenterai dans les semaines à venir.

Pour nourrir notre réflexion, j'ai organisé le 1er mars dernier des tables rondes avec des athlètes, des pratiquants et des entraîneurs. Bien entendu, vos propositions sur ces sujets sont également les bienvenues et nous aurons l'occasion de revenir prochainement sur les mesures de ce plan piloté par le champion paralympique Charles Rozoy.

Nos objectifs en matière de cohésion doivent se concentrer sur les territoires carencés. J'aurai une attention particulière pour les clubs et associations en quartiers prioritaires de la politique de la ville (QPV). À cet effet, avec la branche professionnelle, nous sommes en train de créer un certificat de qualification professionnelle (CQP) « socio-sportif », offrant des formations mixtes de nature sociale et sportive pour les éducateurs sportifs en QPV. Au-delà, je souhaite oeuvrer pour que le sport fasse partie des réflexions systématiques des contrats de ville et, plus précisément, pour inscrire le mot « sport » dans les contrats de ville.

L'effort en faveur de la résorption des inégalités en outre-mer va se poursuivre, puisque 7 millions d'euros sont consacrés cette année au rattrapage des équipements. Avec ma collègue Mme Annick Girardin, nous voulons mieux coordonner nos financements pour mieux dépenser l'argent public, et allons donc mettre en commun nos crédits respectifs mis à la disposition des territoires pour leur développement structurel en matière de sport : au total, 14 millions d'euros seront mobilisés. Mayotte, qui ne compte à ce jour aucune piscine publique, et où les enfants ne savent pas nager, fera l'objet d'un plan particulier en faveur de la natation, avec un plan d'équipement sur mesure.

Enfin, je n'oublie pas les territoires ruraux, dont nombre d'entre vous défendent à juste titre les intérêts. La déclinaison territoriale de l'Agence du sport sera pour eux une formidable opportunité de bénéficier d'une politique sportive différenciée.

On ne peut parler de cohésion sans parler de démocratie et de mixité – et en matière de sport, il nous reste du chemin à parcourir. Il est indispensable d'agir pour favoriser le renouvellement des instances dirigeantes des fédérations. Le dialogue que je suis en train de nouer avec vous et avec le mouvement sportif nous permettra de trouver un bon équilibre entre ces objectifs et la liberté associative. Je ne crois pas en une action « punitive » consistant à priver de Jeux olympiques à Paris des présidents ou présidentes qui auraient travaillé depuis des années à la construction de la performance dans leur fédération. Cependant, il me semble qu'à compter de l'élection de 2024, une limitation à deux renouvellements consécutifs permettrait de stimuler la vie des fédérations. Je serai à l'écoute de vos propositions dans le cadre d'un texte de loi.

Sur la question de la mixité, j'ai réactivé la Conférence permanente du sport féminin (CPSF) et je suis heureuse de contribuer à la grande cause du quinquennat dédiée à l'égalité entre les femmes et les hommes, portée par Mme Marlène Schiappa. À ce titre, j'ai comme objectif de féminiser les instances déconcentrées des fédérations, ligues et comités, ainsi que les instances dirigeantes des associations sportives. Je m'appuie pour cela sur l'organisation en France de la Coupe du monde féminine de football en 2019, qui me permettra de faire la promotion de ces sujets qui me tiennent à coeur.

Enfin, à l'heure de la préparation des Jeux olympiques d'été de Tokyo 2020, des Jeux olympiques d'hiver de Pékin 2022 et des Jeux olympiques d'été de Paris 2024, agir pour le sport, c'est bien évidemment viser la performance. Au-delà de livrer les infrastructures dans les coûts et les délais prévus, il me semble indispensable que les habitants des territoires dans lesquels se dérouleront les Jeux puissent concrètement en tirer parti. C'est tout l'enjeu de la notion d'héritage et de performance sociale.

Comme le Premier ministre le rappelait récemment, c'est tout le Gouvernement qui est mobilisé pour la réussite des Jeux, car nous voulons qu'ils laissent un héritage majeur à nos concitoyens à la fois sur le plan sportif, social, économique, culturel et environnemental. En tant que ministre des sports, je serai impliquée dans cet objectif à chaque étape, et vous pouvez compter sur moi pour mobiliser mes collègues en ce sens.

Bien sûr, la réussite des Jeux passera avant tout par celle de nos athlètes. En plaçant l'athlète au coeur du dispositif, je souhaite tout mettre en oeuvre pour qu'il se trouve dans les meilleures conditions. Avec l'appui de M. Claude Onesta, nous allons organiser et réarticuler l'ensemble des dispositifs en faveur des athlètes de haut niveau, que ce soit durant leur suivi de carrière ou au moment de leur reconversion : je pense aux bourses, qui passent par les fédérations, aux conventions d'insertion professionnelle (CIP) et aux conventions d'aménagement de l'emploi (CAE), encore gérées par le ministère, et au mécénat, issu du pacte de performance – un dispositif associatif mis en place par l'un de mes prédécesseurs. Il s'agit aujourd'hui de coordonner tous ces dispositifs afin de mieux répartir les rôles de chacun et de toucher l'ensemble des sportifs.

Une attention particulière sera aussi portée aux entraîneurs pour entretenir leur potentiel, notamment en favorisant des groupes d'échange interdisciplinaires entre les fédérations. Nous nous donnerons également les moyens d'aller chercher les meilleurs entraîneurs à l'étranger et allons encourager une plus grande mobilité de nos jeunes coachs à l'international.

Ma feuille de route pour la haute performance, c'est également agir en matière de recherche. Ce que je souhaite, c'est que la recherche soit mise au service de l'athlète, et non l'inverse : il s'agit bien de mettre la recherche appliquée au service de la performance. Avec ma collègue Mme Frédérique Vidal, nous lancerons prochainement un programme prioritaire de recherche en faveur de la haute performance. Je fonde de grands espoirs sur le groupement de recherche qui vient d'être créé et sur la mobilisation des grandes écoles regroupées dans un consortium nommé Sciences 2024, qui aura vocation à compléter l'action de l'Institut national du sport, de l'expertise et de la performance (INSEP) et des universités avec un cursus Sciences et techniques des activités physiques et sportives (STAPS), qui accomplissent déjà un gros travail en la matière.

Enfin, agir pour le sport, c'est agir pour un sport intègre. Nous avons l'ambition de rester une grande nation en matière d'éthique, d'intégrité, de lutte contre le dopage et la manipulation des compétitions. À ces prérogatives historiques, j'ai souhaité ajouter la lutte contre les noyades et reconnaître enfin les violences qui existent dans le sport. J'ai déjà eu l'occasion de partager mes convictions et d'échanger au sujet du travail de mon ministère avec M. Adrien Taquet, secrétaire d'État auprès de la ministre des solidarités et de la santé, afin de contribuer à son plan de protection de l'enfance. J'ai également voulu renforcer l'éthique du mouvement sportif en installant un contrôle externe pour assurer une bonne gouvernance des fédérations. Je suis à votre disposition pour détailler les mesures prises par mon ministère sur ces sujets.

Le deuxième pilier de mon action consiste à agir par le sport, c'est-à-dire à se servir du sport comme vecteur de politiques publiques plus larges telles que le sport-santé ou le sport en entreprise. Plus concrètement, il s'agit d'utiliser les impacts du sport au service de la société et des territoires, notamment les plus carencés.

La première des politiques par le sport, la plus visible d'entre elles, est la politique de santé par le sport. À cet égard, ma collègue Mme Agnès Buzyn et moi-même présenterons le 25 mars prochain la stratégie sport-santé. Sans en dévoiler les principaux axes, je peux d'ores et déjà vous faire part de l'inscription de l'activité physique adaptée au coeur du parcours de soins pour le cancer du sein, ainsi que du déploiement des maisons sport-santé pour accompagner individuellement des personnes éloignées de la pratique sportive.

Début avril, dans le cadre du plan vélo piloté par Élisabeth Borne, je proposerai un plan d'action en faveur du « savoir rouler » à vélo. Ce plan, destiné à permettre aux 6-11 ans d'apprendre à circuler à vélo en toute sécurité, constitue un dispositif pratique et bénéfique aux usagers, et un indispensable complément à la loi d'orientation sur les mobilités (LOM).

Avec Mme Muriel Pénicaud, je souhaite développer le sport en entreprise, ce qui doit permettre d'accroître le nombre de pratiquants, notamment chez les femmes. Mais ce qui mobilise aujourd'hui les dirigeants en faveur du sport, c'est son impact prouvé sur la cohésion d'entreprise et la prévention de l'absentéisme. À cet égard, à la suite du débat parlementaire relatif à la loi de financement de la sécurité sociale, la direction de la sécurité sociale s'est engagée à réaliser pour les URSSAF une circulaire demandant de ne pas considérer comme un avantage en nature le sport d'entreprise organisé pendant la journée de travail.

Avec M. Julien Denormandie et Mme Muriel Pénicaud, nous souhaitons développer les politiques publiques qui s'appuient sur le sport à des fins d'inclusion sociale. Au-delà de la cohésion sociale trouvée au sein du club, deux objectifs peuvent être visés. Premièrement, il s'agit de promouvoir les mesures s'appuyant sur le sport comme révélateur de talents. Je citerai à cet égard l'action de l'agence pour l'éducation par le sport (APELS) qui, avec son action Défi consistant à soutenir 5 000 coachs d'insertion, a récemment remporté le premier plan d'investissement compétences (PIC) 100 % inclusion. Je sais que plusieurs fédérations, mais aussi des associations non fédérales, s'organisent pour proposer des projets dans le cadre du plan d'investissement dans les compétences.

Deuxièmement, le sport peut être utilisé comme gisement d'emplois, et c'est tout l'enjeu du développement des groupements d'employeurs pour l'insertion et la qualification (GEIQ), dont je souhaite encourager la création dans le domaine du sport.

Agir par le sport, c'est enfin contribuer à la richesse nationale. C'est le but de la filière économique du sport créée en 2015 par M. Emmanuel Macron, alors ministre de l'économie. Pour qu'elle soit mieux structurée et capable de répondre à des marchés, notamment à l'international, je souhaite pour cette filière la création d'un groupement d'intérêt économique (GIE). Soutenir notre économie, c'est aussi soutenir la politique d'accueil des grands événements sportifs internationaux (GESI), notamment en réactivant le comité français du sport international (CFSI), ce qui permettra de développer une stratégie d'accueil mieux coordonnée entre l'État, les collectivités, les fédérations et le Comité national olympique et sportif français (CNOSF) ainsi que le CPSF.

J'entends aussi achever la dynamique engagée par mes prédécesseurs en faveur du sport professionnel, en menant à leur terme les travaux relatifs au contrat d'image et au soutien à la gestion des enceintes sportives par les clubs et en supprimant l'obligation de mettre en concurrence un club lorsqu'il est le seul à pouvoir assurer la gestion d'un grand équipement. Cette évolution lui permettra d'être associé à la définition du cahier des charges de l'enceinte, qui répondra ainsi mieux à ses besoins.

Agir par le sport, c'est contribuer à la préservation de la planète et de la biodiversité. Avec le WWF, nous nous sommes fixés une feuille de route ambitieuse, portant notamment sur la diffusion de la Charte des engagements responsables en matière d'évènements sportifs. Je souhaite également accompagner les initiatives fédérales en faveur des gestes éco-citoyens des pratiquants sportifs, notamment dans les sports de pleine nature, qui constituent un levier à mobiliser pour sensibiliser à la nécessité de protéger notre environnement.

L'ensemble des politiques pour et par le sport que je viens de vous détailler ne réussiront que si elles s'appuient sur des modalités d'intervention renouvelées : en matière de gouvernance bien sûr, mais aussi pour accompagner l'évolution du modèle au sein des clubs.

La gouvernance renouvelée, c'est d'abord, bien sûr, l'Agence nationale du sport. Pour moi, la création de cette agence converge avec les conclusions du grand débat appelant à plus de démocratie participative pour élaborer ensemble des politiques sportives au plus près des territoires, des associations, de tous les acteurs de terrain, ainsi que de nos concitoyens. L'Agence nationale du sport sera une agence de financement, d'appui et d'évaluation de programmes sportifs en faveur du développement des pratiques et de la haute performance. Elle mettra autour de la table l'État, le monde sportif, les collectivités et le monde économique.

Le second enjeu de l'Agence consiste à soutenir les acteurs du sport de terrain à travers les projets sportifs fédéraux. Enfin, l'élargissement au monde économique nous permettra d'intégrer pleinement la vision et l'expertise de ces acteurs dans la définition des dispositifs mis en oeuvre. Une stratégie marketing sera élaborée pour capter des financements privés au bénéfice de programme à fort impact sociétal.

Vous rencontrerez prochainement Frédéric Sanaur, le préfigurateur de l'Agence, pour aborder toutes les questions liées à sa mise en oeuvre. Dans cette dernière ligne droite avant sa création, le Conseil d'État a fait un certain nombre de recommandations qui seront étudiées le 2 avril prochain ; la création effective interviendra donc à la mi-avril.

Je tiens à vous dire que l'Agence nationale du sport apportera au sport dans notre pays des modalités d'intervention inédites et que ses missions ne se confondent pas avec celles du ministère. Le second renouvellement concerne donc la direction des sports. Tout comme la décentralisation s'accompagne d'un renforcement de la déconcentration, la création de l'Agence s'accompagnera une évolution substantielle du rôle de la direction des sports, qui sera confrontée à de nouveaux défis.

Pour ce qui est du lien aux fédérations, il sera profondément rénové, avec l'abandon de la tutelle et la mise en place de contrats de délégation fondés sur des objectifs sportifs et des objectifs structurels relatifs à l'éthique et à la transparence de l'organisation fédérale. En lieu et place des conventions d'objectifs, il y aura donc désormais, d'une part, des conventions de performance et de développement passées par l'Agence nationale du sport et, d'autre part, des contrats de délégation à portée régalienne passés avec la direction des sports. Bien sûr, la direction des sports restera entièrement compétente sur tous les dossiers liés à l'intégrité de l'action sportive, ainsi qu'aux relations et à la coopération internationales.

On ne peut évoquer la rénovation du modèle sportif sans aborder le sujet des conseillers techniques sportifs (CTS). Entraîneurs et formateurs expérimentés, les CTS sont devenus des rouages clés du système fédéral et de la réussite de nos sportifs. Je rappelle que c'est au lendemain de la déroute française aux JO de Rome de 1960 que ces agents de l'État ont été placés au sein des fédérations sportives pour redresser les résultats tricolores, ce qu'ils ont fait avec succès. Néanmoins, leur statut protégé fait débat depuis plusieurs décennies et leurs multiples tutelles – État, mouvements sportifs, collectivités – méritent d'être clarifiées.

À l'heure où nous nous projetons vers une organisation plus responsable, plus autonome et plus transparente du mouvement sportif, cette forme d'ingérence de l'État dans la construction de la performance et de la formation paraît caduque. Je l'ai toujours dit, et je le répète, il ne s'agit pas de supprimer les métiers des CTS, mais de revoir les modalités de gestion de ces professionnels. Cela se fera dans le dialogue et par un examen au cas par cas. Évidemment, il n'est pas question de fragiliser les petites fédérations, qui sont souvent des pourvoyeuses essentielles de médailles, mais de trouver un dispositif équilibré où les fédérations pourront mettre en oeuvre leur stratégie sportive et déployer leurs ressources humaines de manière autonome. Je le dis avec fermeté, l'État n'a aucune intention de se désengager du sport et l'évolution du statut des CTS se fera avec les agents et les présidents de fédérations, dans le respect des métiers et dans un climat de confiance.

Des modalités d'intervention renouvelées, c'est aussi accompagner l'évolution du modèle. Mon premier objectif concerne le bénévolat, car la France compte, je le rappelle, plus de 3,5 millions de bénévoles engagés en faveur du sport. Je tiens à valoriser leur action, notamment pour les grands événements sportifs internationaux tels que les Jeux olympiques et paralympiques et, pour cela, je compte engager des travaux pour renforcer les possibilités de prise en compte de l'engagement de ces bénévoles au sein des comptes d'engagement citoyen (CEC). Bien évidemment, cette réflexion sera conduite en cohérence et en lien avec le plan pour le développement de la vie associative porté par mon collègue M. Gabriel Attal.

Je compte m'impliquer plus fortement sur les questions de la vie associative sportive. Je me rends compte que le secteur du sport, insuffisamment tourné vers l'extérieur, ne sait pas parfaitement tirer parti de l'ensemble de la politique de soutien aux associations. Je suis donc en train de bâtir une communication spécifique qui recense de nombreuses pistes encore trop peu connues, telles que l'augmentation du plafond de la déduction fiscale en matière de mécénat ou la création de fonds de développement pour la vie associative.

Pour mieux répondre aux attentes des pratiquants, des usagers, des licenciés et investir de nouveaux marchés – santé et bien-être, entreprise, seniors, sports émergents, approche socio-sportive –, il est nécessaire de professionnaliser et d'imaginer de nouveaux produits sportifs ainsi que de nouveaux emplois.

J'ai donc conçu un plan en plusieurs objectifs pour faire évoluer le modèle économique fédéral. Il s'agit d'abord d'accompagner les acteurs du monde sportif dans l'évolution de leurs modèles économiques et sociaux, pour aller chercher de nouveaux horizons : une équipe est en cours de constitution au ministère des sports pour aider les petites et moyennes fédérations à faire évoluer un modèle vers de nouvelles prestations de services sportifs et de nouveaux financements.

J'ai également entrepris de simplifier le contexte réglementaire des formations pour lever les freins à l'emploi. C'est à cet effet que j'ai lancé le chantier « proportionnalité réglementaire » des certifications pour limiter les diplômes d'État aux besoins de sécurité des pratiques ou des publics, laissant ainsi à la branche et aux fédérations le soin de définir des diplômes à vocation strictement professionnelle ou sportive.

Enfin, il me paraît nécessaire d'innover en adoptant les outils de l'économie sociale et solidaire. Je lancerai donc un appel à expérimentation fédéral et territorial sur le thème « économie sociale et solidaire » pour changer d'échelle dans le développement des modèles coopératifs et des groupements d'employeurs.

Un texte de loi devra venir stabiliser ces évolutions. Il me semble indispensable qu'il comporte des éléments relatifs à la nouvelle gouvernance du sport et à la démocratie dans les fédérations, mais aussi facilitant le sport. Vous le savez, en raison de l'étroitesse du créneau législatif, il sera nécessaire de circonscrire son périmètre. Pour autant, nous ne devrons rien abandonner de substantiel. Je forme le voeu que nous fassions équipe pour que cette loi voie le jour.

J'entends que ma feuille de route soit pilotée, c'est pourquoi, au-delà du « jaune budgétaire » dédié à la dépense publique en faveur des Jeux olympiques, j'ai relancé l'enquête décennale de l'INSEE en faveur du sport et mis en place un baromètre biannuel des pratiques.

Pour finir, je souhaite vous présenter quelques jalons calendaires jusqu'à l'été.

Fin mars, début avril, comme je vous l'ai dit, nous nous retrouverons pour deux rendez-vous importants : la stratégie interministérielle sport et santé et le « savoir rouler ».

Début avril, je rendrai publics les attendus du programme prioritaire de recherche pour la haute performance sportive construit avec Frédérique Vidal, mais aussi le contenu et les conditions de mise en oeuvre de la stratégie sociale adoptée pour accompagner les divers travaux liés aux Jeux olympiques et paralympiques.

Mi-avril, l'Agence nationale du sport devrait voir le jour, annonçant lors de son premier conseil d'administration une stratégie concertée pour le sport pour les personnes en situation de handicap, ou parasport.

Fin avril, je dévoilerai le tutoriel natation à destination des parents, qui mettra en évidence l'importance d'un apprentissage précoce.

Le nouveau modèle de gouvernance du sport « mieux faire ensemble » sera symbolisé le 23 juin par le rapprochement de la journée olympique et de la fête du sport, avec le concours du comité d'organisation des Jeux olympiques et paralympiques (COJOP) et du CNOSF. Le sens de cette réunion, c'est l'engagement de tous en faveur d'un sport conscient de sa responsabilité sociale, pour une responsabilité sportive doublée d'une responsabilité sociale.

Avant de conclure, je dirai un mot sur ce qui fait notre actualité depuis quelques mois, à savoir le Grand débat national. J'ai participé à Nice et à Torcy à des échanges autour des acteurs du sport, et je peux vous dire que nos concitoyens aiment le sport et s'y impliquent.

Le sport est un objet politique qui parle à nos concitoyens. Il est un objet politique du quotidien, et vous êtes bien placés pour le savoir. Le Grand débat national constitue une chance de parler de ces sujets et je vous invite, je nous invite tous, à saisir cette chance.

Enfin, vous l'aurez compris, je souhaite travailler avec vous pour bâtir un projet pour le sport, qui pourra, j'en suis convaincue, se construire sur une vision partagée. J'espère que sur vos territoires et ici, au sein de l'Assemblée nationale, vous serez à mes côtés pour mettre en valeur le sport et ses atouts sous tous ses aspects.

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