Le groupe Socialistes et apparentés félicite le rapporteur et son équipe pour le travail accompli.
Nous tenons à rappeler que les sapeurs-pompiers professionnels et volontaires effectuent un travail formidable sur l'ensemble du territoire. Ces hommes, ces femmes, qui font montre d'un sens supérieur du devoir et de l'intérêt général et n'hésitent pas à mettre leur vie en péril pour protéger celle de leurs concitoyens, ont été mis à rude épreuve ces dernières années à travers des crises exceptionnelles, attentats et catastrophes naturelles, mais aussi au quotidien. Comme sous d'autres majorités, nous avons cherché lors de la précédente législature à améliorer leur situation, notamment par la loi du 27 décembre 2016 relative aux sapeurs-pompiers professionnels et aux sapeurs-pompiers volontaires, qui avait reçu le soutien de l'ensemble des syndicats des sapeurs-pompiers. Comme votre proposition de loi, ce texte s'attachait à préserver le modèle français reposant sur la complémentarité entre professionnels et volontaires.
Toutefois, cette complémentarité est sérieusement interrogée par la récente décision de la Cour de Justice de l'Union européenne qui, dans l'arrêt Matzak du 21 février 2018, a considéré que les sapeurs-pompiers volontaires ne pouvaient être totalement exclus de l'application de la directive du 4 novembre 2003 relative à l'aménagement du temps de travail. Cette préoccupation est largement partagée au niveau local par l'ensemble des professionnels et des volontaires.
La proposition de loi examinée aujourd'hui répond à l'objectif de valoriser l'engagement des sapeurs-pompiers, auquel, bien sûr, nous souscrivons. Certains articles vont dans le bon sens et méritent toute notre attention. Nous soutenons notamment les mesures visant à lutter contre le manque d'effectifs – la France a en effet perdu plus de 11 000 volontaires en un peu plus d'une décennie. La proposition de loi prévoit non seulement des allégements de charges patronales lors de l'embauche d'un sapeur-pompier volontaire, mais aussi la facilitation des absences en entreprise. Quant à l'article visant à ouvrir aux sapeurs-pompiers volontaires l'accès aux emplois réservés de la fonction publique, nous ne pouvons qu'y être favorables. Remarquons toutefois, sans malignité, que l'application de cette proposition serait rendue difficile par la suppression des 500 000 postes de fonctionnaires défendue par Les Républicains au cours de la campagne présidentielle…
Toutefois, l'ensemble des syndicats auditionnés par vos soins a exprimé quelques réserves sur certaines des dispositions proposées. La bonification de trimestres de retraite proposée à l'article 6 pourrait conduire à assimiler l'engagement volontaire du sapeur-pompier à un travail : au moment où l'on veut contredire la directive européenne relative à l'aménagement du temps de travail, mieux vaut rester prudent… D'autres moyens doivent donc être mis en oeuvre pour encourager et reconnaître l'engagement des sapeurs-pompiers volontaires. Par ailleurs, la nomination à un certain emploi d'un sapeur-pompier professionnel d'un autre grade, prévue à l'article 8, est dénoncée par les sapeurs-pompiers professionnels comme un recul de la réforme de leur filière mise en oeuvre en 2012, et appréciée comme telle.
Enfin, certaines mesures proposées gagneraient à être encadrées et approfondies. La volonté de faciliter l'hébergement des professionnels à proximité des centres de secours part d'une bonne intention ; il faudrait cependant garantir l'accès prioritaire des personnes pouvant prétendre à un logement social, en particulier dans les zones tendues où, précisément, la question du logement se pose aussi pour les sapeurs-pompiers.
Par ailleurs, l'article 9 relatif à la possibilité pour des étudiants en médecine de faire un stage dans un SDIS est tout à fait louable, mais elle se voit compliquée par le fait que les SDIS ne disposent pas toujours, hélas, de médecins professionnels, ce qui pose la question de l'encadrement. Enfin, ce dispositif pourrait être utilement élargi à l'ensemble des professionnels de santé ; rien ne nous interdit de le faire dans le cadre de cette commission ou dans l'hémicycle.
Cette proposition de loi procède d'une intention que nous partageons tous : soutenir les sapeurs-pompiers dans leur dévouement à l'intérêt commun. Il faut encourager l'engagement des sapeurs-pompiers volontaires. Ce volontariat est le socle d'un dispositif d'exception auquel nous sommes tous très attachés. Mais à ce stade il me semble que des précisions et des modifications doivent être apportées à ce texte ; c'est précisément le rôle de cette commission et tout l'intérêt du travail dans l'hémicycle.
Je souhaite à ce propos vous alerter sur le mouvement de concentration des services de secours que nous constatons dans plusieurs départements, particulièrement en Saône-et-Loire. Cette tendance à la réduction de services publics de proximité, ces centres de premières interventions, se poursuit malgré les appels incessants de la population locale et des sapeurs-pompiers volontaires à les maintenir au plus près des besoins. Ce n'est pas non plus le meilleur moyen, me semble-t-il, de favoriser l'engagement des volontaires qui ont plaisir à se retrouver dans leurs communes ou dans la commune voisine, à partager des moments de convivialité, à faire du sport le samedi ou en soirée et à trouver un lieu de vie et d'engagement près de chez eux. L'engagement volontaire passe sans doute par cela aussi. La loi ne peut pas tout et les autorités départementales devraient davantage en tenir compte.