Chers Collègues, il y a exactement un an, en mars 2018, conformément aux nombreuses déclarations du président Donald Trump attaquant le libre-échange, les États-Unis ont déclenché une guerre commerciale contre leurs principaux partenaires économiques, dont l'Union européenne. Ils ont en effet décidé d'imposer unilatéralement, en s'appuyant sur la législation relative à la sécurité nationale et en violation des règles de l'OMC, des taxes de 25 % sur les importations d'acier et de 10 % sur celles d'aluminium.
Cette décision a entraîné une réaction unanime des États membres qui, tous, ont soutenu les mesures de rétorsion proposées par la Commission européenne. L'Union européenne a ainsi décidé d'imposer des droits de douane sur des produits aussi divers que le jus d'orange, les motos Harley Davidson ou le Bourbon. Les États-Unis ont surenchéri en menaçant d'imposer des droits de douane aux automobiles importées et en particulier, aux automobiles allemandes.
Toutefois, personne n'avait intérêt à une escalade de la guerre commerciale dont, in fine, personne ne sort vainqueur. C'est pourquoi, le 25 juillet 2018, les présidents Juncker et Trump ont conclu un accord politique. Le président américain s'est engagé à ne pas imposer de droits de douane supplémentaires, en échange de l'engagement de l'Union européenne à ouvrir deux négociations commerciales, l'une sur les droits de douane applicables aux produits industriels, l'autre sur l'évaluation de la conformité. Ces deux négociations s'ouvriront une fois que le Conseil aura adopté les mandats de négociation. Transmis à notre commission, au titre de l'article 88-4 de la Constitution, ils sont très courts et se contentent de mettre en forme juridique l'accord politique intervenu en juillet dernier.
Nous avons voulu, en tant que référents, attirer votre attention sur deux points, l'un spécifique à ces deux négociations et l'autre plus général sur le contrôle parlementaire de la politique commerciale
Le premier est le caractère limité du champ et de la portée des deux négociations commerciales qui vont s'ouvrir. La première porte en titre sur les droits de douane des produits industriels. Elle exclut explicitement les produits agricoles qui, nous le savons, sont toujours le point le plus sensible et bloquant des négociations commerciales. En outre, même si les échanges de produits industriels représentent des montants importants, les droits de douane sont déjà très bas puisqu'ils s'élèvent en moyenne à 4,2 % pour l'Union européenne et 3,1 % pour les États-Unis.
Quant à la deuxième négociation sur l'évaluation de la conformité, elle appartient à la catégorie des accords « techniques » portant sur un point précis puisqu'il s'agit simplement de permettre aux entreprises de prouver plus facilement que leurs produits satisfont aux exigences techniques de part et d'autre de l'Atlantique. On est très loin ici des vastes accords de libre-échange, comme le CETA, ou du retour du TAFTA, comme certains le craignent. Ces accords portaient sur les droits de douane en général, y compris des produits agricoles, les services, la propriété intellectuelle, les marché publics, le développement durable, l'investissement, etc.
En réalité, ces deux négociations commerciales valent moins par elles-mêmes que par le fait qu'elles visent à retenir la main lourde du président américain sur les droits de douane, dont les conséquences pour l'économie européenne et, notamment sa première puissance exportatrice, l'Allemagne, seraient catastrophiques. D'ailleurs, suite à l'absence de consensus le 14 mars au Parlement européen sur une résolution portant sur les mandats de négociations, le président Trump a immédiatement menacé – je cite – de « taxer de nombreux produits européens » si les Européens refusaient d'ouvrir rapidement les discussions. Le sujet est désormais entre les mains du Conseil européen réuni aujourd'hui et demain.