Intervention de Clémentine Autain

Réunion du mercredi 20 mars 2019 à 17h15
Commission des affaires étrangères

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaClémentine Autain :

Monsieur le ministre, j'ai invité aujourd'hui les députés de tous les groupes politiques, à l'exception des députés d'extrême droite, à une rencontre avec le collectif Familles unies, qui regroupe des familles dont les enfants ont été embrigadés et sont parties en Syrie. Vous le savez, des femmes et des enfants français se trouvent actuellement dans les camps d'Al-Hol et de Roj, dans une situation dramatique sur le plan humanitaire. C'est sur eux que je souhaite, au nom du groupe de la Gauche démocrate et républicaine, vous interroger aujourd'hui.

Nous avons entendu des témoignages particulièrement poignants, et ceux de nos collègues qui étaient présents à cette rencontre pourront peut-être en parler. Le traumatisme vécu par ces familles est extrêmement profond et il doit être pris en compte. Or il me semble que le regard que la société pose sur elles est biaisé. Ces familles n'ont trouvé aucun soutien dans la société lorsqu'elles ont été confrontées à l'embrigadement de leurs enfants ou de leurs petits-enfants, qui se retrouvent aujourd'hui dans une situation dramatique à l'autre bout du monde. Or je crois que ces enfants sont l'une des clés pour comprendre les phénomènes d'embrigadement, et donc pour nous aider à combattre Daech. Nous avons, surtout, un devoir d'humanité envers eux : il est urgent de sauver les enfants qui sont en train de mourir dans ces camps. Il se trouve que le collectif Familles unies s'est adressé au Président de la République et au Gouvernement à de multiples reprises : il a adressé des lettres à Emmanuel Macron, à Edouard Philippe, à la ministre de la justice, Mme Nicole Belloubet, ainsi qu'à vous, monsieur le ministre, et il n'a reçu, en retour, que des accusés de réception.

Je crois sincèrement, monsieur le ministre, que vous honoreriez les valeurs de la France et que vous feriez oeuvre utile dans le combat contre Daech en prenant en considération ce que ces familles vivent et ce qu'elles ont à nous dire. Nous devons sauver ces enfants. L'une des femmes présentes à cette rencontre est la grand-mère de trois des six orphelins qui ont été rapatriés. Une autre grand-mère, également présente, venait d'apprendre que ses petits-enfants étaient morts. Je voudrais comprendre votre doctrine : pourquoi ne faudrait-il sauver que les orphelins ? À Al-Hol, qui compte 65 000 habitants, 127 décès ont été enregistrés depuis le 15 mars, dont 80 % concernent des enfants. Les personnes qui se trouvent là-bas subissent des traitements dégradants et inhumains et sont dans une situation de péril absolument scandaleuse. Deux plaintes ont été déposées par des avocats contre la France auprès de l'ONU sur la base de conventions que la France a signées, qui concernent la torture ou le droit des enfants. Je pense sincèrement que nous pouvons rapatrier ces enfants, comme nous l'avons fait par le passé dans d'autres pays. Quand les familles vous demandent des informations, des listes, vous les renvoyez vers la Croix-Rouge, mais celle-ci n'est pas capable de les informer. Comment allez-vous enfin prendre en compte cette urgence humanitaire et soutenir ces familles ? Le collectif Familles unies ne bénéficie d'aucune écoute, ni d'aucune subvention. Cette situation ne peut plus durer, dans le pays des droits humains.

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