Intervention de Nadia Essayan

Séance en hémicycle du mercredi 3 avril 2019 à 21h30
Débat sur l'organisation de l'État et des services publics

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaNadia Essayan :

Je reviens, après mon collègue Vincent Bru, sur la question des services publics dans les territoires. Elle touche toutes les classes d'âge : personnes âgées, parents d'enfants scolarisés, jeunes en recherche d'emploi et j'en passe. Tous ceux qui nous ont parlé durant ces trois derniers mois ont souligné deux points : d'une part, leur attachement profond au service public et, d'autre part, leur crainte et leur souffrance face à la désertification.

Évidemment, on ne peut nier une disparité des attentes : certains accordent une priorité à un service public plus efficace, d'autres à son coût. Globalement, les Français attendent un service public accessible, de proximité et personnalisé ; des services publics plus réactifs prenant davantage en compte l'avis des usagers.

Nous le savons, l'ouverture de services publics suit le développement de la dématérialisation des démarches : 67 % des Français font leurs démarches sur internet. Nous devons tout d'abord tenir l'engagement de la fin des zones blanches sur tout le territoire, car c'est une urgence. Nous devons également remédier à la fracture numérique en évitant de frustrer et d'humilier ceux d'entre nous qui ne peuvent pas ou ne savent pas utiliser internet. Leur imposer un long trajet, parfois de plus d'une heure, pour atteindre des services publics n'est pas acceptable, au nom même de l'égalité devant le service public. Ainsi, ne serait-il pas judicieux d'instaurer des critères de distance ou de durée pour les pôles territoriaux de services publics ? Plus précisément, ces critères pourraient être pris en compte pour la constitution d'une porte d'entrée non matérialisée dans les mairies. De fait, l'ensemble des services publics, même dématérialisés, seraient ainsi à une distance raisonnable des bassins de vie du territoire.

L'attente des Français, c'est aussi que soit garantie une présence humaine au sein des services publics. Le service public français est avant tout constitué d'hommes et de femmes qui le font vivre, l'habitant d'un esprit formidable. Comment pourrions-nous ne pas souscrire à cette vision ? Nous démontrons ici et là que nous avons les moyens de mutualiser les dispositifs pour que l'usager trouve les réponses qu'il attend, y compris dans les zones rurales éloignées. En assurant une présence humaine de proximité dans le cadre des maisons de services au public et en continuant de développer celles-ci, nous avons les moyens de rassurer nos concitoyens. La modernisation des services publics ne peut se faire au détriment des usagers, sinon c'est oublier l'objectif premier du service public, qui est de servir tous les citoyens de manière égale, sur tout le territoire.

Par ailleurs, les Français critiquent les décisions verticales qui ne semblent pas avoir pris en compte une véritable concertation avec les exécutifs locaux sur l'organisation des services publics de leur territoire, au détriment de leurs usagers. Il n'est pas question ici de nier les impératifs économiques et structurels ayant conduit à la fermeture de services publics dans certaines localités. Les services publics n'ont jamais eu à être figés dans leur organisation, leur adaptabilité étant indispensable. Mais, au nom de la différenciation territoriale qui nous est chère, il nous incombe de repenser l'organisation des services publics, et surtout la méthode à adopter pour mieux les organiser. De ce fait, un conseil de coordination territoriale à l'échelon départemental, composé des députés et des élus des différentes collectivités, des représentants syndicaux et associatifs, mais aussi de citoyens du département tirés au sort, aurait pour intérêt de remettre l'usager au coeur des politiques publiques. Ce conseil, présidé par le préfet de département, adossé au schéma départemental d'amélioration de l'accessibilité des services au public, pourrait faire des propositions en amont des décisions et analyser l'impact de toutes les modifications envisagées quant au maintien ou à la suppression de services publics, y compris ceux qui touchent à la santé.

Enfin, il nous faut entendre la volonté des Français de participer davantage à la gestion collective. Certaines collectivités expérimentent les budgets participatifs. Pourquoi ne pas étendre ce dispositif à toutes tes collectivités, notamment rurales, en y consacrant une part de la dotation d'équipement des territoires ruraux ? Cela donnerait la possibilité aux habitants, en réalisant un projet de bien commun, de consolider leurs liens avec les services publics de leur territoire.

En conclusion, nous pouvons et devons sortir de la contradiction apparente entre deux objectifs majeurs : un meilleur service public et une diminution des dépenses de fonctionnement. Comme l'ont dit mes collègues du groupe MODEM lors des précédents débats, la différenciation territoriale oblige à la souplesse et à l'intelligence collective. Enrichie par une plus grande participation citoyenne, elle permet de préserver l'égalité et la fraternité entre nous.

Aucun commentaire n'a encore été formulé sur cette intervention.

Cette législature étant désormais achevée, les commentaires sont désactivés.
Vous pouvez commenter les travaux des nouveaux députés sur le NosDéputés.fr de la législature en cours.