Intervention de Arnaud Viala

Séance en hémicycle du mercredi 3 avril 2019 à 21h30
Débat sur l'organisation de l'État et des services publics

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaArnaud Viala :

… et nous en sommes réduits à de longues tirades qui seront peut-être suivies, après de longues heures, de vagues prises de parole des ministres. Je préfère ne pas me demander ce que nos concitoyens en pensent, pour ceux d'entre eux qui s'astreignent à nous suivre sur leurs écrans.

C'est précisément de nos concitoyens et de leurs attentes que je veux vous parler, car c'est pour cela que nous sommes ici. Ils ont en effet beaucoup à dire à propos de l'organisation de l'État et des services publics.

Pour ce faire, je veux évoquer trois illustrations particulièrement parlantes du décalage qui existe entre les constats que nous faisons tous – et qui ont conduit le Président de la République, votre gouvernement et la majorité à faire des promesses aux Français – et la réalité que vivent nos concitoyens. C'est à cause de ce décalage et de l'empilement de promesses que vous ne tenez pas que la colère des Français a atteint le niveau que nous connaissons.

Le premier de ces décalages est ravageur : c'est celui qui sépare les poncifs tels que « plus de sans-logis dans les rues avant l'hiver 2017 », « plus de fermetures de classes », « arrêt des fermetures d'hôpitaux », et la réalité, c'est-à-dire des SDF dans nos rues, des écoles qui ferment ou qui, demain, seront intégrées aux collèges, des hôpitaux de proximité que l'on dépouille de leurs services...

Il faut arrêter immédiatement ce qui est perçu comme un mensonge permanent. Je vous soumets à ce propos deux propositions. Acceptez de transférer aux décideurs locaux un peu de pouvoir et quelques moyens. Eux seuls recueillent encore le soutien de nos concitoyens et eux plus que quiconque détiennent la connaissance fine des besoins spécifiques de chaque Français.

Décentraliser n'est pas un gros mot. Si les acteurs locaux sont mieux entendus, alors les décisions auront plus de chances d'être cohérentes et mieux comprises. Écoutez aussi la voix des territoires ici, au Parlement ! Il n'est pas raisonnable de continuer à balayer d'un revers de la main méprisant toutes les propositions que nous faisons pour renforcer la prise en considération des nuances territoriales de notre pays ! En abaissant le débat démocratique, c'est notre République que vous abaissez chaque jour un peu plus.

Le deuxième décalage que je tiens à souligner ici ce soir, c'est celui qui se creuse entre votre souhait de moderniser notre État, au service de nos concitoyens, partout en France, et ce que les Français voient. En lisant leurs doléances que je vous ai transmises et en parcourant les recueils que vous en diffusez, je peux vous assurer que leur souci est bien moins d'avoir moins d'État que d'avoir « mieux d'État ». Les Français n'en peuvent plus de la sur-administration inhumaine de notre pays et, par-dessus tout, ils ne supportent plus les agences toutes-puissantes – agences régionales de santé, directions régionales de l'environnement, de l'aménagement et du logement, agences de l'eau qui, c'est le cas de le dire, font la pluie et le beau temps sur leur quotidien et échappent à tout contrôle démocratique.

Vous ne semblez pas avoir entendu ce message, puisqu'en guise de réponse à ce reproche, vous venez de créer l'Agence nationale de cohésion des territoires, nouvel objet volant non identifié qui prive les territoires du peu de libre arbitre qu'il leur restait. Nous vous faisons une proposition toute simple : au lieu de tout cela, rendez aux préfets de département quelques moyens et du pouvoir pour faire exister l'État localement et prendre en compte les attentes du terrain ! Ce sera infiniment plus salutaire et plus en phase avec ce que les Français veulent.

Le troisième décalage que je souhaite mettre en évidence, c'est celui que vous avez fait naître entre la promesse d'une modernisation de nos institutions et la réalité de ce qu'elle signifiera. Réduire le nombre de parlementaires est une proposition séduisante, que les Français soutiennent, mais il est urgent que vous leur disiez ce qu'elle signifiera quant à la possibilité de connaître personnellement leur député, de le rencontrer et de l'interpeller.

La façon dont la réduction s'opérera, ainsi que le mode de scrutin, ne sont pas que des concepts. Il est encore temps d'atténuer les effets négatifs de cette atteinte au lien entre des citoyens défiants et leurs élus. Si on vous dit qu'à trop l'élaguer vous tuerez notre Parlement, écoutez-nous ! Si on vous met en garde contre les effets pervers du scrutin proportionnel, n'attendez pas d'y être confrontés pour considérer nos objections ! C'est notre démocratie qui est en jeu.

Voilà les éléments que je souhaitais souligner et les propositions qu'avec mes collègues du groupe Les Républicains, je souhaitais vous soumettre dans le cadre de cet exercice.

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