Tout d'abord, en ce qui concerne la production indépendante, notre avis reprend textuellement la proposition du rapport de cette commission, en proposant que la notion d'indépendance soit une notion fondée sur la détention capitalistique, et non sur la détention des droits. L'obligation d'indépendance est extrêmement utile parce qu'elle favorise une certaine diversité. Cependant, empêcher complètement les éditeurs de services d'accéder aux droits, notamment pour exploiter ces droits sur les plateformes numériques non linéaires, qui représentent l'avenir, voilà le coeur du problème.
Concernant la mutualisation à l'intérieur d'un groupe, du moins pour les productions audiovisuelles, elle existe déjà dans certains accords passés. Je pense notamment à TF1 et à certains producteurs. Ce n'est donc pas une nouveauté, même si cette mutualisation n'existe pas pour le cinéma. Quoi qu'il en soit, elle semble de nature à apporter plus d'efficience au secteur. Quant à la mutualisation entre le cinéma et l'audiovisuel, nous avons bien conscience que le sujet fait très peur, tant la mutation peut être brutale et rapide. Supposons qu'on se lance dans une mutualisation totale, sans problème au départ, et qu'au bout de trois, quatre ou cinq ans les séries ne correspondent plus au goût du public : l'idée ne semble plus vraiment extraordinaire. Ce qui est proposé, ce n'est pas du tout une mutualisation totale, mais, comme vous le proposiez, madame la députée, un couloir de souplesse, qui permette de s'adapter dans le temps à la demande du public, sans forcément mettre en cause les fondamentaux. Quel est le bon niveau de ce couloir de souplesse ? Je dirais humblement que je me sens absolument incapable de faire une proposition. Je pense qu'il revient aux acteurs de voir ce qui est possible et souhaitable, parce qu'ils connaissent le marché bien davantage que nous.
La question sur le streaming et le film d'auteur m'impose un constat très personnel et très triste : je rêverais d'un service de streaming national, ou, mieux encore, européen, de cinéma d'auteur avec une offre riche. Cependant, si une personne souhaite voir un film d'auteur, un film de cinémathèque, etc., il faut reconnaître que l'offre est terriblement réduite, pour ne pas dire inexistante. Faut-il interdire à Netflix de s'intéresser au cinéma d'auteur ? Je crains, malheureusement, que ce ne soit extraordinairement difficile. Si Netflix va à la rencontre de grands metteurs en scène internationaux, nous n'avons pas la possibilité de le lui interdire. Par ailleurs, en général, ces grands créateurs ne sont pas forcément opposés à la possibilité de travailler avec Netflix ou avec d'autres plateformes, dans des conditions réelles de liberté créatrice.