Monsieur le Défenseur des droits, en lisant votre rapport, j'ai été frappée par le nombre d'interpellations reçues pour dénoncer la mauvaise qualité de nos services publics – in fine, cette remarque rejoint la question de M. Saulignac concernant les inégalités entre les territoires. L'année dernière, écrivez-vous, 84 % des réclamations enregistrées visaient à dénoncer tantôt le manque de moyens dans les administrations pénitentiaires, tantôt les organismes sociaux qui ne répondent plus aux besoins des Français, ou encore le manque de déconcentration des services de l'État. C'est à la fois énorme et très éclairant sur ce qui se passe depuis plus de quatre mois en France, car je crois que le fait que l'État ne parvienne plus à assurer ses fonctions dans nos territoires est au coeur des préoccupations du mouvement des « gilets jaunes ». Vous parlez d'ailleurs de « fatigue d'être usager ».
Je pense, à cet égard, à cette administration qui conditionne son accès à l'utilisation du numérique pour les cartes grises ou les permis de conduire et qui ne répond pas aux usagers ; aux tribunaux d'instance, bureaux de poste, hôpitaux, maternités et petites lignes de train qui ferment les uns après les autres, de sorte que certains Français sont parfois à 30 ou 40 kilomètres des premiers services publics. Je pense également aux services déconcentrés de l'État, qui ne répondent pas, ou mal, ou tardivement, aux collectivités territoriales. À titre d'exemple, que penser de ces services qui, à l'image de l'administration des domaines, sont toujours plus délocalisés vers les métropoles et qui mettent désormais six à huit mois pour fournir des estimations, pénalisant ainsi, une fois de plus, les villes moyennes, toujours plus oubliées en France ?
Face à ces grandes difficultés de nos concitoyens et de nos collectivités locales – et, malheureusement, mon département, l'Hérault, fait partie de ceux qui déposent le plus de dossiers de réclamation –, le Gouvernement nous vante les mérites de la dématérialisation, de la e-santé, de la e-justice – et j'en passe. Ces réponses sont-elles suffisantes ? Je ne le crois pas. D'ailleurs, vous évoquiez déjà ce problème dans votre rapport de l'année dernière – ce qui pose aussi la question de l'utilité des médiateurs et de vos marges de manoeuvre en la matière. Face à ce sentiment d'abandon toujours plus criant et face aux disparités géographiques, quels changements concrets préconisez-vous pour revenir à une répartition géographique des services publics en adéquation avec les besoins des Français ?