Intervention de Jean-François Carenco

Réunion du jeudi 4 avril 2019 à 9h00
Commission d'enquête sur l'impact économique, industriel et environnemental des énergies renouvelables, sur la transparence des financements et sur l'acceptabilité sociale des politiques de transition énergétique

Jean-François Carenco, président de la Commission de régulation de l'énergie (CRE) :

En 2017, le prix de l'électricité en France était de 169 euros le MWh pour le client ; il était de 304 euros en Allemagne et au Danemark, de 230 euros en Espagne, de 186 euros à Chypre et de 180 euros au Royaume-Uni. En 2018, le prix a augmenté partout en Europe, de 10 % en Belgique, de 3,3 % en Allemagne, de 8 % en Espagne et en Italie. Nous proposons une augmentation de 5,9 %.

Le prix de l'électricité est constitué de trois éléments : le coût de la production, le coût du transport et de la distribution, les impôts et taxes. Leurs parts respectives sont de plus en plus inégales, puisque le coût de la production pèse de moins en moins, mais que, parallèlement, le TURPE, qui finance le transport et la distribution, augmente. Cela constitue une difficulté.

Néanmoins, je continue à défendre l'idée selon laquelle il faut faire du renouvelable, parce qu'à terme on ne peut pas continuer à dépendre à 75 % du nucléaire. C'est impossible, ni les Français ni l'ASN ne le permettront.

Cette évolution va nous faire passer d'un système composé d'une centaine de lieux de production – dix-neuf sites nucléaires, quelques grands barrages, quelques grandes usines – à un autre qui en compte de centaines de milliers, voire des millions. Vous mesurez l'ampleur du défi, et c'est ce qui amène la CRE à considérer l'autoconsommation avec circonspection. Cette attitude nous est reprochée, mais rappelons que l'autoconsommation induit une importante extension des réseaux, et qu'elle repose sur une inégalité territoriale. Il fait beau dans le Sud, cela ne doit pas dispenser de payer les taxes sur l'électricité !

Les impôts et taxes constituent le premier élément du prix de l'électricité, et nous nous contentons d'appliquer les décisions prises par le législateur en ce domaine.

Transport et distribution constituent le deuxième élément du prix. Le TURPE est cher, et il augmente, par facilité, mais aussi dans un souci de diversification et par mesure de prudence. Je tiens à saluer la qualité du dialogue que nous entretenons avec les régulés : nous les supervisons, nous les rencontrons souvent, et nous essayons de mettre en place des systèmes incitatifs.

Le troisième élément du prix, ce sont les coûts de production. Les tarifs réglementés de vente (TRV) d'électricité concernent la production. La CRE ne fait qu'appliquer la loi – ce qui semblera peut-être étrange en ces temps…

La réglementation sur cette question est nationale et européenne, et curieusement, le mot « Europe » ne figure pas dans le rapport de l'Autorité de la concurrence. Le marché intérieur de l'énergie est totalement intégré, et nous nous en portons très bien puisque nous exportons 15 % de notre production électrique et que nous importons seulement 5 % de notre consommation. Notre balance commerciale est nettement positive, et nous le devons à l'Europe. Les 5 % que nous importons correspondent à ce que j'ai qualifié de « flexibilités », au-delà de l'interruptibilité. Je salue à cet égard la décision de RTE, annoncée le 13 janvier dernier, de mettre en oeuvre cette interruptibilité. Le système nous coûte 90 millions d'euros par an, et il a marché.

J'en viens à la réponse à votre question, monsieur le président, mais il fallait la replacer dans le tableau d'ensemble. Comment se décomposent les 5,9 % de hausse des tarifs ? Premièrement, les coûts commerciaux, les CEE et le TURPE ne participent pas de cette hausse. Les marges ont été réduites afin de compenser les CEE, pour une somme nulle.

C'est la composante du prix liée aux capacités de production qui a fortement augmenté. La flexibilité impose aux producteurs de garantir qu'en cas d'incident ou de surconsommation, ils sont capables de fournir des capacités de production supplémentaires. On finance donc des capacités de production qui servent uniquement à garantir la sécurité des approvisionnements, et c'est très récent. Dans la hausse annoncée, 2,20 euros TTC par mégawattheure sont dus à l'augmentation de la capacité, soit 1,3 point sur les 5,9 %.

Les 4,6 points restants sont dus à la production. Considérons séparément le marché normal et l'effet du plafonnement de l'ARENH. Le fonctionnement normal du marché induit une hausse de 2,4 points de pourcentage du TRV, et de 2,2 points de l'ARENH.

Le marché est tendanciellement à la hausse depuis quelque temps, après avoir été structurellement à la baisse.

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