Intervention de Marie du Bouëtiez

Réunion du mardi 26 mars 2019 à 18h35
Commission d'enquête sur l'inclusion des élèves handicapés dans l'école et l'université de la république, quatorze ans après la loi du 11 février

Marie du Bouëtiez, administratrice de l'Association des directeurs de maisons départementales des personnes handicapées et directrice de la maison départementale des personnes handicapées (MDPH) du Val-de-Marne :

L'Association des directeurs de MDPH a mené l'année dernière une enquête auprès de ses adhérents sur les relations qu'entretiennent les MDPH avec l'éducation nationale : dans ce cadre, les MDPH ont fourni des informations sur le nombre de professeurs mis à leur disposition, sur le délai de remplacement d'un poste vacant, sur la qualité de leurs relations avec l'institution... À partir de ces données, l'Association des directeurs de MDPH a fait une sorte d'autodiagnostic. Je demanderai à sa présidente de vous transmettre ce document. Je ne sais pas comment il se présente, mais je sais qu'il a été utilisé dans les groupes de travail nationaux qui réfléchissent à la gouvernance des MDPH.

S'agissant des projets personnalisés de scolarisation, même les MDPH qui parviennent à appliquer parfaitement la réglementation ont besoin d'un délai minimum d'instruction. Lorsqu'elles ont élaboré le projet personnalisé de scolarisation d'un enfant, elles l'adressent à sa famille, qui se prononce dessus et peut éventuellement formuler des remarques. La MDPH en tient compte et fait une nouvelle proposition à la famille : ces allers-retours peuvent allonger les délais de traitement. Le dossier étant difficile à remplir, il arrive par ailleurs que les informations fournies soient incomplètes ou qu'il manque un document, ce qui nous oblige à nous tourner à nouveau vers les familles.

Pour remédier à ce problème, un formulaire a été élaboré au niveau national avec des représentants des associations de personnes handicapées : l'objectif était de rendre ce formulaire plus simple à remplir, mais aussi plus complet. En effet, nous sommes souvent obligés, parce que le formulaire de départ n'est pas assez précis, de demander, au cours de l'instruction du dossier, des pièces complémentaires aux familles. Cela peut se produire pendant l'instruction administrative du dossier, mais aussi plus tard, au moment où le dossier passe entre les mains des évaluateurs et des enseignants. Ceux-ci peuvent estimer qu'il manque des pièces au dossier, par exemple le compte rendu d'un psychiatre ou d'un psychomotricien. Les personnels administratifs n'ont aucune raison de demander de tels documents, dans la mesure où ils n'ont pas vocation à connaître de l'intégralité de la situation de l'enfant, notamment au plan médical. Tout cela, vous le voyez, peut encore allonger les délais.

Par ailleurs, les dossiers concernent parfois d'autres questions que la scolarisation. Peuvent s'y ajouter une demande d'allocation financière, une demande d'aide matérielle ou technique, ou un aménagement de logement : parce que ces demandes ne concernent pas seulement les enseignants, nous réunissons des équipes pluridisciplinaires, ce qui, là encore, peut allonger le délai de traitement. Nous essayons en effet de faire une évaluation globale et d'apporter à la famille, en une seule fois, des réponses à l'ensemble de ses demandes : si nous procédons autrement, si nous transmettons les réponses au compte-gouttes, les familles ne comprennent pas et s'inquiètent. Lorsque les demandes sont multiples et qu'il faut faire intervenir plusieurs professionnels, voire des équipes externes très spécialisées, cela peut prendre plusieurs mois.

Je vous ai dit un mot du volume des demandes que nous recevons dans le Val-de-Marne. Globalement, l'activité des MDPH a plus que doublé depuis leur création. Or les dotations de fonctionnement n'ont pas évolué au même rythme. Les départements ont souvent essayé d'apporter une compensation, et si les MDPH peuvent fonctionner aujourd'hui, c'est en grande partie grâce aux subventions d'équilibre des départements, parce que les dotations de l'État, elles, n'ont pas évolué. Les dotations de la CNSA ont augmenté, mais de manière assez ponctuelle, et elles ne couvrent pas la totalité des besoins.

S'agissant des critères d'urgence, certains d'entre vous ont dit que les renouvellements de carte pourraient aller plus vite et que nous devrions considérer la scolarisation d'un enfant comme une urgence. Nous avons travaillé sur cette question, afin d'introduire des circuits courts pour traiter les urgences. Or, en essayant de faire la liste des critères d'urgence, nous nous sommes aperçus qu'ils sont très nombreux : il y a les urgences médicales, lorsqu'une personne est en fin de vie ; les urgences sociales, quand une personne n'a plus aucune ressource, plus de revenus ni de logement ; il y a aussi urgence lorsqu'elle trouve un emploi ou une formation et qu'elle craint de perdre cet emploi ou cette formation. Entre toutes ces situations d'urgence, il est bien difficile de choisir… Il est très difficile de dire que le dossier d'un enfant atteint d'un cancer peut attendre, parce que nous devons traiter en priorité le dossier d'un enfant qui risque de ne pas avoir d'AVS le jour de la rentrée. Nous sommes confrontés à des choix qui, éthiquement, sont impossibles à trancher. Nous essayons donc de faire de notre mieux face à tous ces critères d'urgence. Même si la tendance est à la réduction des délais, même si la dématérialisation du traitement des dossiers nous aide, nous ne pouvons tout de même pas répondre du jour au lendemain à toutes ces demandes.

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