Intervention de Jean-Louis Bricout

Réunion du mercredi 10 avril 2019 à 13h30
Commission des finances, de l'économie générale et du contrôle budgétaire

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaJean-Louis Bricout :

Pour ma part, messieurs les ministres, je ne partage pas complètement votre satisfaction. Les prévisions sont tout de même sensiblement révisées à la baisse. En 2018, vous prévoyiez 2 % de croissance, nous sommes passés à 1,6 %. En 2019, nous sommes passés de 1,9 % à 1,4 %. De même, pour les années 2020 à 2022, la prévision de croissance est ramenée de 1,7 % à 1,4 %.

Le déficit, pour sa part, devait s'élever à 2,3 % du PIB en 2018 ; il aura finalement été de 2,5 %. En 2019, il ne sera finalement pas de 2,4 % mais de 3,1 % du PIB. En 2020, il devait être de 0,9 % du PIB, il sera de 2 %. En 2022, au lieu de connaître un excédent de 0,3 % du PIB, nos finances publiques seront toujours déficitaires, à hauteur de 1,2 % du PIB. En fin de compte, elles ne reviendront donc pas à l'équilibre.

Je ne vois guère quels motifs de satisfaction tirer de ces prévisions révisées. Pourquoi une telle dégradation, alors que notre pays ne connaît pas de véritable crise économique ? Certes, il connaît une crise sociale, mais vous l'avez largement provoquée par les décisions que vous avez prises depuis le début de ce mandat, qui ont suscité un véritable déséquilibre fiscal et social et même une fracture territoriale, à quoi s'ajoute une perte de confiance envers le Président de la République. Il faut rappeler qu'au début du mandat se conjuguaient l'effet des mesures prises au cours du précédent quinquennat et une espèce d'euphorie, de confiance presque irrationnelle mais non dénuée d'effets positifs sur l'économie.

Le Haut Conseil des finances publiques juge plutôt conformes les prévisions macroéconomiques sur lesquelles se fonde le programme de stabilité, mais il ne s'agit que de constater les dégâts. Il faut reconnaître une sincérité : la dégradation sincère des indicateurs... Il relève cependant quelques facteurs d'incertitudes importants au niveau international, à commencer par les conditions de mise en oeuvre du Brexit qui auront des effets à court terme. Dans sa note de conjoncture du mois de mars 2019, l'INSEE évoque une perte de 0,3 point de PIB en cas de Brexit doux et de 0,6 point en cas de Brexit dur.

Le Haut Conseil note surtout des risques de durcissement des tensions protectionnistes et le ralentissement de l'activité en Chine, ce qui est plutôt inquiétant, malgré un plan d'investissement et de relance dans ce pays, car nous savons que les variations de la croissance chinoise affectent la croissance en Europe. Par ailleurs, les perspectives de croissance se dégradent en Italie et en Allemagne. S'y ajoute l'incertitude qui entoure les décisions que le Gouvernement prendra à la suite du Grand débat national.

Pour ma part, je me pose des questions sur le financement de l'application de l'exonération de taxe d'habitation aux 20 % de nos concitoyens les plus aisés. Comme ma collègue Véronique Louwagie, je me demande si vous ferez comme précédemment, en augmentant la contribution sociale généralisée ou la fiscalité écologique. Certes, vous semblez plutôt envisager des économies, mais quelles conséquences tout cela aura-t-il sur la dette ? Et la trajectoire présentée tient-elle compte de cette exonération ?

En fin de compte, entre des prévisions qui se dégradent, des incertitudes lourdes et des scénarios qui n'envisagent pas de révisions à la baisse des indicateurs, il faudrait aux Français des éléments de nature à les rassurer. Et qu'en sera-t-il en cas de forte dégradation de la conjoncture internationale ?

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