Mme Peyrol a évoqué la charge de la dette, qu'il ne faut pas confondre avec la dette elle-même – nous en avons débattu hier avec M. Jacob dans l'hémicycle... J'en rappelle les montants : elle s'élevait à 41,7 milliards en 2017 et à 41,5 milliards en 2018 ; nous prévoyons de la ramener à 41,1 milliards en 2019 et à 40,8 milliards en 2020. La charge de la dette tend donc à diminuer, même si la dette elle-même augmente ou est stabilisée. Nous, contrairement à ce que l'on peut parfois entendre dans l'hémicycle, nous ne considérons pas que plus on s'endette, plus on s'enrichit.
La question des impôts a été évoquée par différents groupes. Je viens donc de transmettre à chacun d'entre vous une note qui montre que, depuis 2002, les impôts ont augmenté, à des rythmes différents et pour des raisons que l'on peut parfois comprendre, notamment après la crise économique de 2008. Cette note, je le précise, retrace l'évolution de l'ensemble des prélèvements obligatoires, sans distinguer les impôts des ménages de ceux des entreprises. Il en est toujours ainsi – mais peut-être pourrions-nous envisager, monsieur le président, d'établir une distinction entre finances locales et finances nationales, impôts des ménages et impôts des entreprises. Quoi qu'il en soit, vous constaterez que, si les impôts n'ont jamais baissé entre 2002 et 2017, ils diminuent, et de manière extrêmement importante, depuis deux ans. Le petit ressaut que vous observez correspond au CICE : il ne s'agit donc pas d'une augmentation d'impôts pour les ménages. Ce graphique est assez éloquent, me semble-t-il. Ceux qui évoquent une « overdose fiscale » feraient mieux de se pencher sur le bilan des quinquennats précédents.
Il est donc faux de dire, madame Louwagie, que nous avons augmenté les impôts. Ils ne baissent peut-être pas assez vite, mais ils baissent – à hauteur de 4 milliards d'euros l'an dernier. D'un côté, M. Woerth et M. Carrez estiment, et cela peut s'entendre, que nous n'avons pas les moyens de poursuivre cette baisse ; de l'autre, Mme Louwagie et M. Wauquiez jugent qu'elle n'est pas assez rapide. Il faudrait donc qu'au sein de l'opposition, les uns et les autres se mettent d'accord sur leurs arguments. Ce qui est certain, c'est que nous diminuons les impôts – cette baisse est à la fois un pari économique pour l'entreprise et un pari de consommation pour les ménages – et que nous devons, dans le même temps, baisser également la dépense. Du reste, le Président de la République annoncera peut-être des mesures fiscales, notamment des baisses d'impôts, et il indiquera sans doute des projets de transformation du pays, singulièrement en matière de baisse de la dépense publique.
À ce propos, M. Jolivet n'a pas peut-être étudié avec suffisamment d'attention les conclusions du Grand débat, car il ressort de celui-ci que les Français souhaitent une baisse de la dépense publique, premièrement, dans le budget l'armée et, deuxièmement, dans le logement. Ce n'est pas forcément ce que nous ferons, car les enjeux méritent d'être davantage explicités, notamment dans le domaine géostratégique, compte tenu de la dangerosité du monde actuel.
Mme Peyrol a également évoqué les plans de transformation dans le cadre d'Action publique 2022. Je ne peux évoquer que celui de mon ministère : la direction générale des finances publiques et la direction générale des douanes et des droits indirects accomplissent, en la matière, un travail très important, qui n'est pas nouveau, du reste, car tous mes prédécesseurs, notamment M. Woerth, se sont attelés à cette transformation. Il serait bon que la commission des finances demande à chacun des ministres de lui présenter son plan de transformation et le suivi d'Action publique 2022 ou de les lui communiquer. Pour ma part, je vous transmettrai l'ensemble des éléments.
En ce qui concerne la dépense publique, je m'inscris en faux contre les constats de Mme Louwagie et de M. de Courson. La dépense publique a augmenté, en moyenne, de 1 % sous le quinquennat précédent, contre 0,2 % depuis deux ans, soit cinq fois moins. Pour la première fois, elle baisse en volume. À ce propos, pardonnez-moi, monsieur de Courson, mais l'INSEE calcule toujours la dépense hors crédits d'impôt. Au demeurant, si on les incluait, nous pourrions annoncer 20 milliards d'économies l'année prochaine grâce à la suppression du CICE. Vous m'auriez alors reproché de faire des économies en peau de lapin, et vous auriez eu raison. Par ailleurs, l'indice des prix retenu est celui qui a toujours été pris en compte : la méthode de calcul est la même que celle qui a été appliquée sous le quinquennat précédent, notamment. Faut-il diminuer la dépense publique, en stock ? Si telle est votre opinion, n'hésitez pas à nous indiquer où – mais je ne vais pas relancer le débat que le président de votre groupe a eu hier avec M. le Premier ministre.
En ce qui concerne la dette, nous partageons votre constat : elle ne baisse pas autant que nous le souhaiterions, pour deux raisons. Premièrement, la croissance est moindre et, deuxièmement, nous avons sincérisé la dette en y incluant celle de la SNCF, qui s'élève à 34 milliards d'euros. Si, comme les gouvernements précédents, nous retranchions ces 34 milliards, nous pourrions afficher une baisse de la dette. Nous la stabilisons ; on peut faire mieux, mais c'est déjà beaucoup.
M. Bricout nous a interrogés sur la taxe d'habitation et M. Chouat sur la question de la fiscalité locale. Le « contrat de Cahors », qui concerne les 322 plus grosses collectivités, prévoit que celles-ci limitent la hausse de leurs dépenses de fonctionnement à 1,2 %. Cette hausse se situera, en fait, autour de 0,7 % et sans doute même de 0,3 % ou 0,4 %. La contractualisation, on peut s'en réjouir, a donc fonctionné, non seulement parce qu'elle a permis de limiter les dépenses de fonctionnement des grosses collectivités sans gêner les petites, mais aussi parce qu'elle a contribué à augmenter l'investissement public, qui est en effet reparti à la hausse, de même que l'investissement privé, et ce pour des raisons qui ne sont pas uniquement liées au cycle électoral. Nous avons ainsi contenu le nombre de créations de postes dans la fonction publique territoriale puisqu'en limitant les dépenses de fonctionnement on limite la masse salariale, qui en constitue la plus grande partie. Nous en avons donné les moyens aux collectivités locales en n'augmentant pas le point d'indice, en décalant le protocole Parcours professionnels, carrières et rémunérations et en instaurant le jour de carence.
Demain, monsieur Coquerel, les collectivités bénéficieront, pour gérer leur masse salariale, des outils que leur offre le projet de loi de transformation de la fonction publique. En effet, les 35 heures seront obligatoires partout – alors que, dans beaucoup de collectivités, les agents ne travaillent pas 1 607 heures par an –, la mobilité sera facilitée, la formation mieux prise en compte, et les collectivités pourront conclure des contrats de projet. De fait, lorsque le maire d'une commune de 10 000 habitants a de multiples projets d'urbanisme, il n'a besoin d'un architecte-conseil que pendant quelques mois et non pendant trente ans. Le projet de loi que M. Dussopt a présenté, ce matin, devant la commission des lois a donc pour objet, non pas de mettre fin au service public, mais, au contraire, de l'aider à mieux fonctionner et de le renforcer. Je ne souscris donc pas à la caricature que vous en avez faite.
Monsieur Chouat, l'ambition du Gouvernement est de faire en sorte que le projet de loi de finances pour 2020 marque le renouveau de la fiscalité locale. Vous observerez que le dégrèvement correspondant à la suppression de 80 % de la taxe d'habitation, que vous avez votée, a été compensé à l'euro près aux collectivités, y compris dans la dynamique des bases. Il nous reste à régler le cas des 20 % restants : quelle trajectoire faut-il adopter d'ici à 2022 ? La taxe d'habitation doit-elle être remplacée par un impôt national à répartition locale – une part de la TVA, par exemple, allant aux régions – ou faut-il réformer la taxe foncière comme le propose le rapport de MM. Richard et Bur ? Les réponses à ces questions devraient être apportées dans le projet de loi de finances pour 2020. J'ajoute qu'il ne m'appartient pas d'annoncer d'éventuelles modifications du millefeuille territorial, même si, à titre personnel, je peux partager votre opinion.
Monsieur Jolivet, l'accord sur la réforme structurelle du logement prévoit à la fois la « contemporanéité » des aides personnalisées au logement (APL) et la baisse de ce que l'on appelle la réduction de loyer de solidarité (RLS), en contrepartie d'un taux de TVA assez élevé. Des discussions sont en cours sur la dernière « marche » de cette réforme importante. Dans le programme de stabilité, nous avons maintenu la TVA à 10 %, pour un surcroît de recettes d'environ 615 millions d'euros, et prévu l'éventuelle seconde « marche » de la RLS. Nous verrons la manière dont les négociations se dérouleront, mais il est certain que si le Gouvernement devait revoir l'accord conclu avec une grande partie des acteurs du logement, nous rencontrions des difficultés, soit en matière de recettes, soit en matière de dépenses, soit dans les deux domaines, dans le cadre du programme de stabilité. Nous regrettons que la contemporanéité des APL ne soit pas au rendez-vous, mais nous avons préféré différer cette réforme plutôt que d'appliquer une mauvaise mesure aux personnes qui ont besoin de ces allocations.
Enfin, j'observe, monsieur le président de la commission des finances, que l'application du prélèvement de l'impôt à la source n'a nui ni à la trésorerie de l'État ni à la consommation, puisque, chacun l'a constaté, les chiffres du début de l'année ne reflètent pas le désastre que certains avaient évoqué.