Je voudrais d'abord revenir rapidement sur ce que nous considérons comme une remise en cause du statut de la fonction publique, malgré vos dénégations, plus ou moins fermes. Il faut rappeler que le statut des fonctionnaires est le résultat de luttes sociales et républicaines, un acquis issu du gouvernement d'union nationale qui a suivi le programme du Conseil national de la Résistance : il ne protège pas simplement les fonctionnaires, mais aussi l'intérêt général et la République. Le ou la fonctionnaire est au service de l'intérêt général alors que les salariés sont au service de l'employeur en application d'un contrat. Remettre en cause cette spécificité lierait l'agent public à des intérêts particuliers. C'est une des raisons centrales de notre opposition à ce texte.
Comme l'a indiqué notre collègue Ugo Bernalicis, il y a néanmoins des questions sur lesquelles nous pourrions contribuer positivement, notamment la lutte contre les discriminations, que vous avez mise en avant. Mais là aussi, nous avons relevé un certain nombre de contradictions et de manques criants.
Il y a en particulier une contradiction majeure entre les déclarations d'intention concernant la lutte contre les discriminations sexistes et le fait de fragiliser l'accès au statut de fonctionnaire, c'est-à-dire la sécurité de l'emploi, alors que les contrats de catégorie C touchent surtout les femmes. Celles-ci représentent 62 % de la fonction publique, mais seulement 40 % des emplois de catégorie A +. Par ailleurs, 23 % des femmes sont à temps partiel, contre 5 % des hommes. On compte 61 % de femmes dans la fonction publique territoriale, notamment dans les emplois du soin aux personnes – le taux atteint 77 % chez les agents territoriaux spécialisés des écoles maternelles (ATSEM). Ce sont des contrats précaires pour beaucoup. Selon nous, la lutte contre les discriminations passe par une sécurisation des emplois qui touchent plus les femmes et qui sont plus précaires. La remise en cause du statut des fonctionnaires va à l'encontre de cet objectif.
Pour ce qui est des manques criants dans ce texte, il n'y a rien ou presque en ce qui concerne la lutte contre les discriminations raciales dans l'accès à l'emploi public et dans l'emploi lui-même, alors que le rapport remis en 2016 par M. L'Horty pointait un certain nombre de problèmes graves. Je note aussi qu'aucune des considérations du Défenseur des droits sur ce sujet n'est prise en compte.
Pouvez-vous nous expliquer ces manques et ces contradictions ?