Monsieur Laabid, je ne pense pas que l'accord de 2013 n'ait pas été traduit dans les faits, au contraire. Il stipulait que l'obligation de nominations équilibrées progresse dans le temps, en fixant des seuils progressifs à 10 %, puis 15 %, et ainsi de suite.
Nous partions de très loin, et en 2017 et 2018, pour la première fois, nous avons commencé à rencontrer des difficultés en atteignant des paliers à 30 % ou 40 %. C'est alors qu'un certain nombre de ministères et de collectivités ont été amenés à payer des pénalités. Jusqu'à présent, le recouvrement des pénalités n'a pas toujours été assuré de manière complète. Cette année, nous avons veillé à ce que l'intégralité des pénalités soit payée, y compris par le ministère de l'action et des comptes publics et le ministère des finances, qui étaient les principaux contributeurs. Ces pénalités ont été versées au budget de l'État et cet argent est utilisé pour financer les actions du fonds d'égalité, créé par circulaire il y a quelques semaines.
Le protocole de 2013 a donc eu des effets, et le bilan qui en a été fait au cours du premier semestre 2018 montre que son application a été aussi bien respectée que possible, ce dont tout le monde se félicite. Au point que l'un des principaux soucis de tous ceux qui ont participé à la négociation du 30 novembre 2018 était de veiller à ce que l'intégralité des dispositions de 2013 soit bien reprise, pour que le protocole continue à être appliqué. À mon sens, c'est la meilleure évaluation possible.
S'agissant du name and shame, il suffisait de lire Le Canard enchaîné il y a quelques semaines pour constater que les ministères et les collectivités qui n'ont pas respecté la règle ont déjà vu leurs noms publiés.
Nous veillons à ce que les jurys soient mixtes, c'est une obligation légale, et nous prévoyons une obligation de renouvellement des jurys tous les quatre ans. La périodicité de quatre ans est maintenue car il est parfois compliqué de composer des jurys, sans même parler de la répartition entre femmes et hommes en leur sein. Nous souhaitons donc leur donner un peu de stabilité. Par ailleurs, les membres des jurys reçoivent une formation pour les sensibiliser à la lutte contre toutes les formes de discrimination au recrutement, quel que soit le versant de leur fonction publique.
Madame Panonacle, deux points principaux sont sources de clivages avec les syndicats.
Le premier touche au dialogue social, puisque nous proposons de fusionner les comités techniques et les comités d'hygiène et de sécurité (CHS) comme nous l'avons fait dans le secteur privé, et à la compétence des commissions administratives paritaires (CAP), puisque l'instance unique créée par la fusion des comités techniques et des CHS aura toutes les compétences de ces deux instances, mais également une compétence nouvelle portant sur la gestion prévisionnelle des emplois et des compétences et sur l'édiction des lignes directrices de gestion des ressources humaines, donc les règles générales d'accès à la mobilité et à la promotion.
Dès lors que ces règles générales auront été discutées et votées par l'instance unique, elles pourront être invoquées par les agents en cas de difficultés ou de discrimination. Les employeurs publics pourront prendre des décisions au fil de l'eau, sans attendre que les CAP se réunissent, leurs calendriers étant particulièrement compliqués.
Typiquement, dans les services déconcentrés de l'État, lorsqu'un emploi est brutalement vacant, il faut huit à quatorze mois pour le pourvoir, ce qui va à l'encontre de la continuité du service public et pose des difficultés administratives. Et pour recruter quelqu'un qui n'est pas de la même catégorie hiérarchique, qui ne vient pas de la même zone géographique et qui n'appartient pas au même ministère, il faut parfois réunir huit CAP, chacune avec leur calendrier, avant d'obtenir un éventuel feu vert. Et en général, on vous propose une autre personne que celle que vous souhaitiez recruter.
Voilà la première difficulté que nous rencontrons avec les syndicats.
La deuxième tient à l'ampleur donnée à la possibilité de recourir aux contrats. Aucune obligation n'est prévue, mais la possibilité de recourir aux contrats est largement accrue. Les organisations syndicales ne partagent pas cette volonté.
Ce sont les deux principaux points de discussion, mais il n'y a pas de point de clivage sur les questions d'égalité entre les femmes et les hommes. Certains souhaitent pousser plus loin certaines mesures, ou en écarter d'autres, mais il existe un consensus sur l'ensemble.
S'agissant du temps partiel, nous prévoyons de sécuriser les recrutements à temps partiel dans d'autres titres du projet de loi. Nous permettrons plus facilement aux collectivités de créer des emplois titulaires à temps partiel, certains emplois sont par définition à temps non complet au vu des besoins du service. Proposer la titularisation est un gage de lutte contre la précarité. Nous prévoyons aussi de faciliter le recours aux contrats longs, d'un à trois ans, pour en finir avec les fausses vacations et la grande précarité qui en résulte.
Nous avons mis en place une solution pour faciliter la création de groupements d'employeurs et permettre à un maximum d'agents publics de cumuler les temps partiels. Ils auraient ainsi un temps plein avec un seul employeur, le groupement d'employeurs, une seule fiche de paye, un seul lien professionnel, quitte à travailler sur plusieurs sites au sein de structures différentes.
Une disposition réglementaire, en lien avec le projet de loi, va autoriser l'annualisation d'un temps partiel. Il est parfois nécessaire de s'arrêter deux ou trois mois après le congé maternité. Il n'est pas forcément indispensable de demander un congé parental, et nous allons d'ailleurs fractionner le congé parental afin de pouvoir le prendre pour six mois, plutôt que pour un an ou trois ans, ce qui peut répondre à des besoins individuels et apporter des solutions. Mais il est parfois nécessaire d'attendre deux mois qu'une place en crèche se libère, ou pour faire la jonction entre deux modes de garde. Le fait d'annualiser le temps partiel permettra au parent concerné de s'arrêter pendant deux mois, mais l'effet sur son salaire ne se fera pas sentir brutalement sur deux mois, entraînant une privation de revenus, mais il sera réparti sur douze mois et annualisé, ce qui peut être plus facile pour la vie du foyer.
Nous allons également permettre, par voie réglementaire, d'agréger aux congés maternités ou au congé parental de courte durée, ou à l'annualisation du temps partiel, des jours de congé ou de réduction du temps de travail, pour faciliter les temps personnels et le passage d'un mode de garde à l'autre. Cette disposition concernera aussi les hommes, c'est à titre d'exemple que je me suis appuyé sur le congé maternité qui, par définition, ne concerne que les femmes.
S'agissant des filières de formation, Madame Poueyto, notre bref échange avec Yvette Roudy hier montre qu'il y a encore beaucoup de chemin à faire, certaines dispositions de son propre projet de loi ne s'étant pas concrétisées depuis 1983. Un travail de sensibilisation et d'acculturation doit être fait, en lien avec le ministère de l'éducation nationale, et ce n'est pas dans un texte sur les ressources humaines dans la fonction publique que nous arriverons à régler ce problème.
Toutefois, le ministère de l'éducation nationale respecte aujourd'hui les obligations de nominations équilibrées sur les flux. Mais le stock est tellement important qu'il est difficile d'en voir la traduction dans les faits lors de la visite de tel ou tel service. Nous avons atteint la parité sur les postes de recteurs et de rectrices, on compte même une femme de plus – c'est la première fois –, ce qui démontre l'engagement du ministère à trouver des solutions sur ces sujets.
Le ministère des Armées a un peu de retard, lié à des problèmes de vivier et de promotion. Il a mis en place très récemment un plan pour la féminisation des armées, notamment des fonctions de direction pour les personnels civils et de commandement pour les personnels militaires. Le retard est important, et le ministère des Armées fait partie de ceux qui peinent à atteindre la barre des 40 %. Mais la ministre et sa secrétaire d'État se sont engagées à avancer, puisque pour la première fois, un plan spécifique a été prévu pour faciliter l'accès des femmes aux fonctions de commandement.
Il faut le souligner et les accompagner, et cette démarche nous sert d'exemple, notamment s'agissant de la gestion des conjoints et des conjointes.
Madame Lazaar, le texte prévoit le maintien de l'intégralité des primes pendant le congé maternité, notamment dans les collectivités territoriales. Préalablement à la rédaction du décret d'application, nous devrons mener une réflexion spécifique sur la prime d'assiduité. Ces primes, de même que les sanctions pour absentéisme, s'inscrivent dans un contexte juridique parfois bancal, et nous devrons étudier cela de plus près. Au-delà de cet exemple, je rappelais que certaines collectivités supprimaient purement et simplement la totalité du régime indemnitaire aux femmes pendant leurs congés maternités, ou aux hommes pendant leur congé de paternité, et le projet de loi prévoit de maintenir l'intégralité du régime indemnitaire.
Monsieur Cabaré, vous m'apprenez ce qui se passe à l'université de Toulouse Je ne peux répondre aujourd'hui, nous allons nous y intéresser, en lien avec la ministre de l'enseignement supérieur, de la recherche et de l'innovation. Votre interpellation me permet de vous dire que nous avons veillé à ce que le projet de loi ne comporte aucun article purement catégoriel. Les articles s'appliquent au minimum à un versant, parfois à deux ou aux trois. D'ici le débat en séance publique, nous aurons à proposer des amendements pour décliner les mesures générales pour certaines catégories. Quelques corps et établissements publics ont des régimes juridiques très particuliers. Par exemple, certains établissements de la fonction publique hospitalière accueillent en leur sein des agents publics et des personnes issues du secteur privé, par exemple dans le cadre de conventions avec la caisse nationale d'assurance maladie. Pour ce type d'établissement, il faut prévoir de décliner les mesures générales ayant des implications catégorielles. Mais nous souhaitons éviter d'intégrer des articles catégoriels portant uniquement sur tel ou tel corps.
La concertation a duré plusieurs centaines d'heures. Dès l'avant-projet de loi, de nombreuses demandes des organisations syndicales ou des employeurs ont été prises en compte. Et abstraction faite des amendements de suppression d'articles, si l'on se concentre sur les amendements apportant des compléments ou des améliorations, nous avons retenu entre 40 % et 50 % de ceux proposés par les deux syndicats qui en ont déposés, la Confédération française démocratique du travail (CFDT) et l'UNSA. Les autres syndicats n'ont pas choisi de présenter de contre-propositions.