Je vous remercie de nous avoir invités à cette audition. Les groupuscules d'extrême droite ne constituent pas un phénomène nouveau. Ce qui est nouveau c'est le contexte politique tant au niveau mondial, européen que national : régimes autoritaires, nationalisme hindou, problème des Rohingyas en Birmanie, montée et arrivée au pouvoir des partis d'extrême droite en Europe – comme celui de M. Salvini en Italie –, poids croissant du Rassemblement national dans les urnes – même s'il n'est pas passé. Ce contexte offre aux groupuscules d'extrême droite un espace favorable et avec la pluie, les champignons poussent…
Derrière le cadre officiel, le Rassemblement national, on retrouve ainsi Génération identitaire, qui a des amis au sein de ce dernier et des liens avec lui. L'immigration et l'islamisation sont les deux thématiques majeures qui unissent ces blocs. C'est également le thème qui fait la force du Rassemblement national. Même si Marine Le Pen a officiellement effectué un ravalement de façade, derrière, ce n'est pas propre !
Je partage l'analyse concernant la violence verbale et les modalités de la violence. Ainsi, dans le métro, à Lille comme à Paris, des patrouilles identitaires ont fait « la chasse à la racaille ». Ne serait-ce que symboliquement, ce sont des faits violents. De même, les événements du col de l'Échelle ont constitué une sacrée démonstration…
N'oublions pas la dimension européenne de Génération identitaire : ils sont en lien avec d'autres groupes européens – surtout en Italie pour ce que l'on sait. Ils mettent en avant la notion de « racines européennes » – généralement sous couvert de chrétienté –, mais surtout la notion de « race blanche », ce qui devient très grave… Ils développent le concept de préférence nationale. Ils s'inspirent du modèle italien : le groupe CasaPound a des liens avec les Jeunesses identitaires, mais aussi Bastion social – pour ne citer qu'eux.
Je ne parlerai pas de la banderole que Génération identitaire a déployée au-dessus de la mosquée de Poitiers en octobre 2012, d'une violence inouïe. Leur mot d'ordre était l'expulsion des islamistes. À Loudun, dans la Vienne, ils ont allumé des fumigènes devant un centre d'hébergement pour migrants, avec le slogan « moins de régularisation, plus de remigration ». C'est douloureux au pays des droits de l'homme…
Soulignons que, dans leurs premières actions, ils utilisaient un gilet jaune frappé d'un lambda noir, symbole de leur organisation.
De la même façon, au printemps dernier, à la faculté de droit de Montpellier, un commando a envahi les locaux et bastonné des étudiants. Le dossier n'est pas clos sur le plan judiciaire. L'affaire étant en cours, je ne vais pas me prononcer. Le lycée autogéré de Paris et une faculté de Lille ont également été touchés. Tout cela engendre un contexte hypertendu.
Les chiffres sont à manier avec précaution, mais Génération identitaire revendique 2500 adhérents. Ils s'implantent autour de maisons de l'identité. À Lille, leur bar s'appelle La Citadelle. Ce ne sont ni des paumés – ce qui les distingue des milieux skins des années soixante-dix et quatre-vingts –, ni des castagneurs. Ils sont pour la plupart diplômés et ont moins de vingt-six ans.
Soulignons un phénomène difficile à appréhender – nous y travaillons –, autour des salles de sport : le close-combat et la boxe font partie de leur itinéraire et de leur formation. Il faut y être très attentifs : sans le savoir, en effet, certains élus peuvent financer une salle de sport tenue par des gens de Génération identitaire. La plupart de leurs cadres sont formés et diplômés. Un centre de formation, Iliade, vient d'être créé par Jean-Yves Le Gallou.