Intervention de Christine Pires Beaune

Séance en hémicycle du mardi 30 avril 2019 à 15h00
Déclaration du gouvernement sur le projet de programme de stabilité pour les années 2019-2022

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaChristine Pires Beaune :

En premier lieu, je tiens à souligner le caractère caduc du projet de programme de stabilité 2019-2022 qu'il nous est demandé d'examiner aujourd'hui, puisqu'il ne tient pas compte des annonces faites la semaine dernière par le Président de la République. En seulement quinze jours, depuis la présentation de ce document en commission des finances le 10 avril, il a perdu toute actualité et toute sincérité.

En effet, une baisse d'impôt sur le revenu de 5 milliards d'euros pour 15 ou 16 millions de foyers à partir de 2020 est désormais annoncée – il est peut-être utile de rappeler qu'à partir de 2014, c'est une baisse de 6 milliards de l'impôt sur le revenu qui a bénéficié à 12 millions de foyers ; la vision de la classe moyenne du Président de la République semble très extensive. Cela dit, ces 5 milliards d'euros ne figurent pas dans ce tout nouveau pacte de stabilité.

De même, la mise en oeuvre de la limitation du nombre d'élèves à vingt-quatre par classe – très bonne mesure – de la grande section de maternelle jusqu'au CE1 nécessiterait la création de milliers de postes d'enseignants, à moins de faire supporter le bénéfice de cette mesure sur les autres classes du primaire ou sur le collège et le lycée, déjà bien abîmés par vos réformes. Ces nécessaires créations de postes ont un coût qui, lui non plus, n'est pas intégré à votre projet. Monsieur le ministre, nous souhaitons donc que vous actualisiez vos chiffres afin d'avoir un débat sincère.

Avant même l'intégration du chiffrage de ces nouvelles annonces, nous constatons dans le document actuel une dégradation de la trajectoire depuis le programme de stabilité 2018. Alors que vous fanfaronniez ici même, il y a tout juste un an, sur la « crédibilité » que vous auriez prétendument « retrouvée » auprès de l'Union européenne, voilà que votre fétichisme forcené des 3 % de déficit public est rudement mis à mal.

L'an dernier, vous vous vantiez encore de rester sous la barre des 3 % tout au long du quinquennat, l'année 2022 devant marquer le retour à un excédent public à 0,3 % du PIB, et la dette publique étant censée diminuer de 5 points

Aujourd'hui, d'après un document encore bien incomplet, le déficit repasserait au-dessus des 3 % en 2019, et s'élèverait à 1,2 % du PIB en 2022, tandis que la dette publique ne serait réduite que de 1,6 point entre 2018 et 2022.

N'étant pas, contrairement à vous, une fan de cette règle bête et méchante des 3 %, qui entrave notamment le développement des investissements nécessaires à la transition écologique, je constate simplement que vous êtes en train de renier vos propres engagements. Ce qui est grave, c'est que la trajectoire budgétaire dérape alors même que vous menez une politique injuste qui creuse les inégalités.

Comme nous vous l'indiquions l'an dernier, les baisses d'impôt significatives que vous avez accordées aux 1 % des Français les plus aisés ont effectivement contribué à dégrader nos finances publiques sans procurer à notre économie de bénéfice structurel. Cela ne ruisselle toujours pas.

Ce que démontre ce document, au-delà de son insincérité, c'est que la politique que vous menez depuis deux ans est une double impasse.

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