Intervention de Delphine Bagarry

Séance en hémicycle du mardi 7 mai 2019 à 15h00
Jeunes majeurs vulnérables — Discussion générale

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaDelphine Bagarry :

Cette question nous engage, ensuite, parce que, comme l'écrit Antoine Dulin dans son rapport, « le contrat jeune majeur est plus rare que l'or dans certains départements et s'apparente dans presque tous les cas à un sécateur à rêves ». Les enfants issus de l'aide sociale à l'enfance subissent donc une double injustice : au sort défavorable qui les rend plus vulnérables que les autres s'ajoute la chance ou la malchance de vivre dans un territoire plutôt que dans un autre.

Il est de la responsabilité du département, qui a la charge de la mise en oeuvre des politiques de solidarité, de ne pas laisser des jeunes vulnérables livrés à eux-mêmes, et il est de la responsabilité du législateur de faire en sorte que les jeunes confiés à l'aide sociale à l'enfance et atteignant l'âge de 18 ans aient la possibilité de disposer d'un contrat d'accès à l'autonomie où qu'ils se trouvent sur le territoire national.

Ce qui est vrai pour les enfants nés en France l'est aussi pour les enfants isolés étrangers. Les inégalités territoriales concernant les mesures de mise à l'abri et d'évaluation grèvent la capacité de la République d'agir efficacement. Il existe, pour eux aussi, des inégalités de prise en charge, et il en va de même pour les accompagnements en sortie de l'aide sociale à l'enfance. Comme les autres, ces enfants ne doivent plus être abandonnés sans projet d'avenir à leur majorité. Je compte sur vous, monsieur le secrétaire d'État, pour qu'à l'âge de 18 ans, ils soient accompagnés dignement, et cela même s'ils n'ont pas bénéficié de la protection de l'ASE pendant dix-huit mois.

Nous ne pourrons agir efficacement que si la loi s'applique de la même façon sur tout le territoire national. La présente proposition de loi répond à l'iniquité géographique : un contrat d'accès à l'autonomie devra être systématiquement proposé aux jeunes confiés à l'aide sociale à l'enfance. Ce texte fera de la France un État attentif aux plus vulnérables, soucieux que l'inégalité de sort ne débouche pas sur une inégalité de chances, et cela grâce à un changement de paradigme. Il faut, en effet, arrêter d'en demander plus aux jeunes à qui la vie a offert moins. Il faut, au contraire, les accompagner pour qu'ils parviennent à une autonomie effective, qu'ils puissent trouver un logement, que leur intégration dans l'emploi soit favorisée, qu'ils soient mieux informés de leurs droits et mieux accompagnés dans la parentalité.

Enfin, cette proposition de loi s'inscrit dans la stratégie gouvernementale de prévention et de lutte contre la pauvreté, dans le cadre de la contractualisation avec les départements. L'État s'engage financièrement auprès des collectivités pour la mise en oeuvre des contrats d'accès à l'autonomie. Les départements devront tenir cinq engagements : la préservation du lien social et la détermination d'un référent pour chaque enfant ; l'accès de l'enfant à un logement stable ; l'accès de l'enfant à ses droits et à des ressources financières ; son insertion sociale et professionnelle ; l'accès de l'enfant à la santé. De son côté, l'État attribuera de façon automatique, avant leurs 18 ans, la CMU-C à tous les jeunes issus de l'aide sociale à l'enfance, afin que l'accès aux soins ne leur soit jamais fermé ; il devra, en outre, s'assurer que ceux qui poursuivent leurs études disposent d'une résidence universitaire tout au long de l'année.

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