Intervention de Olivier Dussopt

Réunion du jeudi 2 mai 2019 à 21h15
Commission des lois constitutionnelles, de la législation et de l'administration générale de la république

Olivier Dussopt, secrétaire d'État auprès du ministre de l'Action et des Comptes publics :

L'article 16 porte sur des questions de déontologie. De très nombreux amendements ayant été déposés dessus, je vais synthétiser la position du Gouvernement, de manière à ne pas la rappeler lors de l'examen de chaque amendement.

La situation actuelle est née de la loi du 11 octobre 2013 relative à la transparence dans la vie publique, qui vient d'être évoquée par Mme Rossi, et de la loi du 20 avril 2016 relative à la déontologie et aux droits et obligations des fonctionnaires. La première a créé la Haute Autorité pour la transparence de la vie publique (HATVP), une autorité administrative indépendante (AAI) ; la seconde, la Commission de déontologie de la fonction publique dans la forme qu'on lui connaît, rattachée au Premier ministre et dont les membres sont nommés par décret.

Nous avons commencé à travailler pour améliorer le cadre d'examen des situations dites à risque par la Commission de déontologie. Nous proposons ainsi plusieurs modifications importantes. La première, qui tient compte d'un premier bilan d'application de la loi de 2016, vise à circonscrire l'examen systématique des situations déontologiques aux postes qui présentent un risque avéré. Chaque année, 8 000 examens environ sont faits. Certains n'ont pas lieu d'être de manière systématique. Par exemple, il n'est pas utile d'examiner systématiquement la situation au regard de la déontologie d'un enseignant du secondaire de catégorie A qui part travailler dans le privé. S'il partait dans une situation qui posait question en matière de déontologie, rien n'empêcherait son autorité hiérarchique de saisir la Commission de déontologie.

Par ailleurs, nous voulons faire en sorte que la culture de la déontologie et la présence des référents déontologues dans l'ensemble de nos structures permettent d'encadrer et d'accompagner les cas qui ne seraient plus traités par la Commission de déontologie de la fonction publique (CDFP).

Enfin, aujourd'hui, la Commission de déontologie examine de manière systématique un certain nombre de dossiers d'agents publics, lorsqu'ils veulent sortir de la fonction publique. Nous souhaitons systématiser l'examen du retour dans la fonction publique, le risque déontologique étant présent dans un sens comme dans l'autre. Qui plus est, nous tirons les conséquences de l'article 7 : dès lors que l'on peut recruter des contractuels sur des emplois de direction, il n'est pas inutile de systématiser, pour les postes à risque, l'examen de la situation déontologique à l'entrée dans la fonction publique.

De nombreux travaux ont été menés. J'ai cité, dans mon propos liminaire, le rapport de MM. Fabien Matras et Olivier Marleix, ainsi que les propositions de loi qui ont été déposées. J'ai fait part de l'intérêt du Gouvernement pour l'amendement CL709 de M. Matras, qui propose de faire un pas supplémentaire pour renforcer le contrôle de déontologie des agents publics. Il s'agit de rapprocher la Commission de déontologie de la HATVP, avec le maintien, dans cette nouvelle autorité administrative indépendante, de deux collèges : l'un de la HATVP pour celles et ceux qui occupent des fonctions politiques et l'autre consacré à la déontologie des fonctionnaires. Le débat sur l'intérêt d'aller vers un collège unique existe depuis 2016. Le Gouvernement est prêt à voir, d'ici à la séance, sans engagement de réussite – tout le monde sait la complexité de ces questions –, si des travaux complémentaires peuvent être menés et certaines améliorations trouvées.

En l'état actuel, il nous paraît opportun d'adopter l'amendement CL709, qui permettrait également de donner à la Commission de déontologie le statut d'autorité administrative indépendante (AAI), en rejoignant la HATVP. Il y aura un travail supplémentaire à réaliser, d'ici à la séance, puisque, dès lors que la Commission de déontologie devient un collège d'une autorité administratrice indépendante, il est nécessaire de prévoir la désignation de ses membres par la loi. Le Gouvernement s'engage à travailler avec vous pour fixer, d'ici à la séance, dans la loi, sa composition.

M. Matras propose un autre amendement, qui vise à rendre publics les avis de la Commission de déontologie. Le Gouvernement y est favorable, à condition d'adopter le sous-amendement de la rapporteure. Notre objectif est de systématiser la publication des avis, à deux conditions : qu'ils soient anonymes, dans la mesure où, souvent, les réserves des avis positifs sont liées à la nature même de l'entreprise ou au parcours de la personne ; qu'ils aient été suivis d'une nomination effective. Imaginons quelqu'un qui reçoit un avis défavorable, l'administration étant liée par l'avis, cette personne ne peut pas être nommée. Mais rien n'empêche un agent public de démissionner de la fonction publique pour occuper ce poste dans un secteur privé, en faisant fi de l'avis défavorable. Ce cas doit être rendu public. Lorsqu'un agent reçoit un avis favorable, avec ou sans réserves, et qu'il va occuper le poste qu'il convoitait, il faut aussi que cela soit su, en respectant les conditions d'anonymisation des données que j'ai évoquées.

En revanche, lorsqu'un agent public fait preuve de prudence ou de précaution, qu'il interroge la Commission de déontologie pour savoir si elle l'autoriserait à occuper tel ou tel poste et qu'elle lui donne un avis défavorable qu'il respecte, il n'y a pas lieu de rendre publique une telle démarche. De la même manière, si un agent public sollicite un avis, qu'il est favorable et que, pour une raison ou une autre, il ne prend pas le poste, il n'y a pas lieu de rendre publique sa démarche, qui relève de sa vie privée.

Pour résumer, le Gouvernement, en plus des dispositions que j'ai évoquées de circonscrire la saisine automatique de la Commission de déontologie aux postes à risque, mais de créer un contrôle systématique au retour ou à l'entrée, vous propose d'adopter l'amendement CL709 de M. Matras, pour faire de la Commission de déontologie une autorité administrative indépendante, en la rapprochant de la HATVP, et d'adopter la règle de publicité systématique des avis, aux conditions qu'ils soient anonymisés, pour préserver les données sensibles, et que seuls les avis suivis d'une nomination soient rendus publics. D'ici à la séance, nous vérifierons que la rédaction issue de la commission, dans le cas où vous adopteriez les amendements en l'état, s'applique bien à l'ensemble des situations de sortie de la fonction publique – M. Matras craignait que les dispositions issues du sous-amendement ne les couvrent pas intégralement. Si cela n'était pas le cas, nous corrigerions la rédaction pour la séance, de manière à couvrir parfaitement le champ.

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