Ce soir, l'Assemblée nationale votera l'interdiction de la pêche électrique dans les eaux territoriales françaises. Ce vote, mémorable de par sa portée, de par l'espoir qu'il suscitera, de par la confiance dans les institutions nationales et européennes qu'il redonne, de par son unanimité aussi, est l'aboutissement d'un long chemin commencé il y a plusieurs années.
L'aboutissement d'un long chemin, d'abord, pour nos fileyeurs qui, année après année, depuis plus d'une décennie, constatent l'amenuisement des stocks de poissons en général, et de soles en particulier. La ressource se raréfiant dans nos mers et océans met en danger la survie même des espèces mais aussi celle de leur profession, si dure, si exigeante, si essentielle.
L'aboutissement d'un long chemin, ensuite, pour tous les amoureux de la mer, tous ceux qui se sont battus, depuis tant d'années, pour faire définitivement interdire cette pratique de la pêche électrique dans les eaux européennes : les ONG, les associations de pêcheurs locaux, les syndicats de professionnels, les élus des façades maritimes de notre pays, tous unis pour protéger la ressource, l'emploi, l'environnement, pour convaincre les plus réticents à Paris, à Bruxelles, à Strasbourg, pour sensibiliser l'opinion publique et amalgamer des publics qui, hier, s'affrontaient vainement, avant d'en arriver aujourd'hui à cette interdiction définitive.
L'aboutissement d'un long chemin, enfin, pour les parlementaires français, qu'ils soient ici à l'Assemblée nationale ou qu'ils siègent au Parlement européen, des parlementaires qui ont, depuis deux ans, travaillé, proposé, amendé, unis la plupart du temps et sur tous les bancs, afin de trouver un large consensus en faisant évoluer les esprits les plus récalcitrants, en faisant bouger les lignes et en explosant la logique partisane des blocs.
De la tribune parlementaire contre la pêche électrique publiée dans le journal Le Monde, en janvier 2018, jusqu'au vote de ce soir, sans oublier l'adoption à l'unanimité par l'Assemblée nationale d'une proposition de résolution européenne condamnant cette pratique, nous avons, nous, parlementaires français, su apporter notre modeste pierre à cette décision de protection de la filière halieutique et de la biodiversité.
L'interdiction de la pêche électrique dans les eaux territoriales françaises ne sera pas la victoire d'un camp politique contre un autre camp politique. Elle ne doit pas se réduire à un bras de fer gagné par les uns contre les autres, car cela diminuerait la portée symbolique de l'union sacrée de tous contre cette méthode de pêche dévastatrice ne bénéficiant qu'à quelques-uns. Elle ne peut même pas se résumer maladroitement à un affrontement culturel, simpliste, entre différents pays, tout simplement parce que cette victoire est avant tout collective, parce que cette victoire est surtout celle de la préservation de nos emplois et de notre biodiversité. À quelques encablures du scrutin européen, la tentation serait grande de tirer vers son camp politique la couverture de la victoire dans cette lutte contre la pêche électrique, mais nous ne devons, nous ne pouvons y succomber, tant les enjeux et la portée passés, présents et futurs de cette interdiction nous dépassent tous.
Oui, l'action de la France, du Président de la République et de ses ministres a été déterminante au Conseil, lors des rencontres bilatérales et dans le cadre du trilogue. Oui, la détermination des parlementaires européens, qu'ils soient insoumis comme Younous Omarjee, écologistes comme Yannick Jadot ou issus de la droite comme Alain Cadec, président de la commission pêche au Parlement européen, cette détermination sans faille de tous fut cruciale au moment des différents votes afin de trouver des majorités au parlement européen.