Intervention de Bernard Oudard

Réunion du mardi 30 avril 2019 à 18h30
Commission d'enquête sur la situation et les pratiques de la grande distribution et de ses groupements dans leurs relations commerciales avec les fournisseurs

Bernard Oudard, administrateur de la Coordination rurale :

Le poids sur les prix a contraint les politiques à venir au secours de nos exploitations. Nous avons été soutenus par les régions, notamment pour les investissements, l'acquisition du matériel nécessaire. Toute cette politique nous a permis de réduire nos coûts.

En 1976, quand j'ai repris l'affaire de mon père, la Seine-et-Marne comptait 5 000 hectares de vergers ; il en restait 200 vingt-cinq ans plus tard, et, il n'y en a plus que 165 aujourd'hui. Ce sont les banquiers qui nous font disparaître. Sachez qu'un agriculteur ne disparaît que très difficilement, car il y a un capital. Pour réinstaller des gens, il faudrait également réinstaller des agriculteurs, des arboriculteurs, ce qui exigerait des capitaux gigantesques, sans oublier le fait qu'il n'existe plus, par exemple, de brevet de technicien supérieur (BTS) arboricole. La production française de poires correspond à un tiers de la consommation. Le reste est importé. Ce sont les conditions économiques qui ont fait disparaître mes collègues.

Les relations avec la grande distribution sont un épiphénomène. Je me souviens d'un épisode qui nous a été favorable, c'est celui des prix margés, institués par Raymond Barre : les magasins étaient obligés d'acheter les produits chers. Je suis désolé, mais je vous parle de ce que je connais.

S'agissant de la grande distribution, la tension n'est pas la même selon les marques. À Auchan, tout le monde vous dit bonjour. Chez M. Carrefour, le gars est tellement stressé de ne pas faire son chiffre le soir que c'est un mort-vivant ! Chez Intermarché, cela dépend du patron local. M. Leclerc, lui, est très gentil lors des discussions, mais elles finissent toujours mal.

Aujourd'hui, je travaille avec les gentils. J'ai travaillé aussi avec les autres, bien entendu, notamment avec Carrefour, pendant dix ans, de 1990 à 2000. Mais que ce soit pour mes collègues ou pour moi, nous ne vendons à la grande distribution que de façon accessoire, contrairement à des coopératives qui, elles, vendent uniquement à la grande distribution.

Mon canal principal est Rungis. Même pour ceux qui habitent loin de Rungis, cette plateforme est spectaculaire ! J'espère que vous avez tous été sur place. J'ai fait l'ouverture de Rungis en 1969, je m'y rends encore quatre fois par semaine et je suis toujours aussi émerveillé. Tout le monde râle, dit que ça ne marche pas, mais en fin d'année tout a augmenté, les volumes, les prix… Le pire côtoie le meilleur et tout le monde y trouve son compte.

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