… pour nos entreprises, nos concitoyens, nos douaniers, nos installations portuaires – je pense, plus précisément, à notre frontière commune avec le Royaume-Uni, à Calais, question sur laquelle nous avons déjà eu abondamment l'occasion de nous exprimer.
Je tiens en revanche à revenir sur un sujet absolument essentiel : celui de la participation électorale au scrutin du 26 mai alors qu'aujourd'hui même, lundi 13 mai, s'ouvre la campagne officielle et que nous continuons tous de la mener.
Pour beaucoup, cette campagne n'a d'européenne que le nom tant les enjeux nationaux, la dramatisation nationale orchestrée par les uns et les autres – oserais-je dire par l'un et l'autre des deux protagonistes du second tour de l'élection présidentielle de 2017… – ont pris le pas sur un véritable débat démocratique et pluraliste, débat éclairé par la confrontation entre les idées, les visions, les propositions européennes.
Jamais, dans notre pays, nous n'avons connu un débat européen aussi peu européen. Jamais nous n'avons connu un tel escamotage du débat démocratique européen. Croyez-moi : députée européenne pendant plus de sept ans, j'ai participé à deux campagnes électorales européennes, en 2009 et 2014, qui ne furent en rien comparables à celle que nous subissons aujourd'hui.
Est-ce à mettre au débit du changement de mode de scrutin voulu par La République en marche ? Sans doute, en partie. En février 2018, nous avions combattu ce retour en arrière que furent l'abandon d'un mode de scrutin territorialisé et le retour à un scrutin de listes nationales. Nous en avions dénoncé les effets pervers, ce mode-là faisant fi du nécessaire ancrage territorial des élus européens et des besoins de proximité si attendus entre électeurs et élus.
Le Gouvernement nous a dit alors que nous allions voir ce que nous allions voir. Mme Jacqueline Gourault, qui le représentait dans nos débats, déplorait ici même, à la tribune de l'Assemblée nationale, les faibles taux de participation aux élections européennes qui « minent la légitimité des députés européens et, finalement, affaiblissent la démocratie. » On allait donc voir ce que l'on allait voir avec la liste nationale qui, d'après elle, permettrait d' « intéresser davantage nos concitoyens à des élections qui sont de plus en plus décisives pour leur destin individuel comme pour leur destin collectif. »
Soucieuse de prêter une extrême attention aux paroles de l'exécutif, j'ajouterai que, selon Mme Gourault, la circonscription nationale « était la meilleure solution » car elle « permettra de proposer aux Français des débats clairs, avec des options nettes sur la confrontation des projets européens. »
Quelle erreur d'appréciation – ou quelle tentative de manipulation ! Nous sommes fort loin de ce que Mme Gourault, puis, Mme Loiseau nous vendaient à l'époque ! Tous les indicateurs de participation sont mauvais, tous ! En 2014, la participation était de 42 % du corps électoral ; elle est aujourd'hui estimée, au mieux, à 40 %. Bien des sondeurs et des analystes la voient même en deçà et, donc, historiquement faible.
Le retour à la liste nationale voulu par la majorité actuelle a donc été choisi sous de fallacieux prétextes – telle est la conclusion à laquelle nous devons aboutir – et semble conduire à un très fort désintérêt des Français pour cette échéance électorale.
Par ailleurs, je reviens sur ce que j'ai brièvement indiqué tout à l'heure : la nationalisation du mode de scrutin aboutit à une nationalisation des débats et des enjeux. Cette nationalisation, cette dramatisation, ce clivage artificiel voulu et installé par le chef de l'État entre lui et les extrémistes qualifiés, tantôt, de populistes, de nationalistes ou autres. Conséquence : un escamotage du débat européen, la disparition du débat contradictoire, l'évaporation de la confrontation démocratique des idées, des propositions, des projets européens ! C'est navrant, c'est dangereux pour la démocratie. À court terme, cela sert peut-être, certainement, les intérêts électoraux de tel ou tel, mais tout cela nous semble très préjudiciable.
Nous voyons bien que le chef de l'État joue de cette dramatisation…