Intervention de Dominique Potier

Réunion du mardi 30 avril 2019 à 16h30
Commission des affaires économiques

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaDominique Potier :

Monsieur Pahun, je tiens à vous dire combien nous sommes fiers du travail que vous avez réalisé. Vous aviez sollicité mes conseils ainsi que ceux de mes collègues Anne-Laurence Petel et Jean-Bernard Sempastous, et nous avions été prudents en estimant que le projet de loi foncier, qui aurait pu contenir ces dispositions, n'était pas attendu à court terme. Nous avions raison. Il est heureux que vous ayez été pragmatique, précis et concret. Vous venez d'affirmer à nouveau votre humilité, ce n'est pas la solution magique, mais c'est une part de la solution au problème que vous avez parfaitement identifié et que vous réglez sans attendre une loi foncière, et c'est tant mieux.

En ouvrant ce chantier, vous éclairez les enjeux de la future loi foncière : se battre contre les logiques spéculatives qui détournent la terre de sa fonction nourricière et de son rôle dans la conservation de la biodiversité terrestre ou marine, et qui nous privent de ressources alimentaires précieuses et des valeurs ajoutées afférentes à ces activités. Il s'agit de choisir entre le court terme et l'économie au long cours, celle des ressources. Notre pays doit rester un pays producteur de biens alimentaires à forte valeur ajoutée. C'est une loi concrète pour des espaces précis, les littoraux, mais sa philosophie ouvre un chantier beaucoup plus vaste pour lequel nous nous battons.

J'échangeais à l'instant avec un ancien président de cette commission sur les perspectives de ce projet de loi annoncé par le Président de la République, et que le ministre de l'agriculture prépare pour l'année 2020. J'appelle solennellement l'attention de la commission des affaires économiques sur un enjeu que cette proposition de loi a dévoilé : lorsque nous annonçons un projet afin de lutter contre la spéculation, dans quelque domaine que ce soit, cela provoque immédiatement une accélération de cette spéculation. Vous avez, Monsieur le rapporteur, observé l'envolée des prix et l'existence de pratiques contournant la future régulation prévue dans cette proposition de loi. Ce texte est bienvenu bien qu'imparfait : le débat sur la montagne n'est pas réglé et a laissé une certaine amertume, le travail pourra être repris dans la loi foncière. Il y a des questions de délais : nous étions favorables à trente ans, la loi retient vingt ans.

Mais même imparfaite, cette proposition de loi a entraîné une accélération de la spéculation. Il y a une importante leçon à en tirer, j'ai alerté le ministre de l'agriculture à ce sujet, je le ferai solennellement dans l'hémicycle. Prévoir une loi foncière de la portée que nous envisageons impose de prendre du temps, d'écouter toutes les parties prenantes. Nous délibérons pour un demi-siècle, comme l'ont fait Messieurs Tanguy-Prigent et Pisani après la guerre pour créer le cycle de prospérité que nous avons connu dans l'agriculture. Il faut donc prendre son temps, mais sans être naïfs. Lorsque nous décidons de créer une nouvelle armature de régulation, il faut empêcher les désordres à court terme : dans l'agriculture et pour les sols, ils sont irréversibles.

Merci encore de ce travail, nous sommes très fiers de l'unanimité qui se dégage, et nous sommes surtout très fiers de nos conchyliculteurs qui vont trouver un outil de travail à la mesure de leurs ambitions et de leurs mérites.

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