Intervention de Loïc Prud'homme

Réunion du mardi 14 mai 2019 à 16h35
Commission du développement durable et de l'aménagement du territoire

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaLoïc Prud'homme :

Ce projet de loi ne répond pas à l'urgence : ni à l'urgence écologique, ni à l'urgence sociale et pas davantage à l'urgence sanitaire. Il ne permet pas de se déplacer moins, mieux et autrement pour préserver le climat, notre santé et les emplois.

Vous faites la part belle à la compétitivité, à la concurrence et au développement de nouveaux débouchés économiques pour les start-up. Vous nous parlez « voitures autonomes », « trottinettes jetables » et « mobilité » ; j'aurais préféré entendre « fret ferroviaire », « réseaux cyclables » et « transports écologiques ». Paradoxe unique au monde, nous finançons la route sur fonds publics à hauteur de 66 %, quand l'État ne finance le rail qu'à hauteur de 17 %. Il y aura plus de camions, moins de trains : c'est une ineptie en matière d'aménagement du territoire et de transition écologique. La suppression du train de primeurs de Perpignan à Rungis en est un exemple désolant : on annonce 20 000 camions de plus sur les routes. Heureusement, il semble que des gens plus clairvoyants que la majorité et le Gouvernement souhaitent investir pour sauver ce train. Vous continuez d'abandonner le ferroviaire : après que la SNCF a été mise en coupe réglée pendant plus de vingt ans par les directives européennes, c'est le tour des TER et de la RATP. Le choix du tout routier par les gouvernements successifs, dont le vôtre, est une faute politique majeure et une faute écologique, déjà irréversible.

Ce texte n'apporte pas non plus de réponse sociale. Mobilité des champs ou mobilité des villes, ceux qui trinquent sont toujours les plus fragiles. Les habitants des zones rurales sont oubliés ; l'aménagement du territoire ne répond pas aux besoins pour ce qui est du maillage fin ferroviaire ou des trains de nuit, outils pourtant essentiel de désenclavement.

En ville, la mise en place des fameuses ZFE relève d'un green washing, doublé d'un apartheid social. Vous culpabilisez ceux qui n'ont d'autre choix que de prendre leur voiture pour aller travailler. Vous pointez du doigt les voitures les plus polluantes, souvent celle des plus pauvres, sans même proposer d'alternative. C'est irresponsable et injuste.

L'urgence sanitaire n'est pas moins réelle. Selon une étude récente, la pollution de l'air serait responsable chaque année de 67 000 morts prématurées en France.

Il aurait fallu que ce projet de loi s'empare de ces enjeux de façon volontaire, et surtout globale. Il se réduit à la vision étriquée d'une mobilité 2.0 pour urbains privilégiés, alors que 40 % de la population vit dans une zone non desservie par les transports en commun.

Il faut aussi parler de la censure que vous avez organisée sur l'aérien : il est impossible de questionner l'organisation des transports et la transition écologique si l'on occulte la discussion sur le mode de transport le plus polluant qui soit.

Vous évitez de poser les bonnes questions, sans toutefois nous épargner vos mauvaises réponses. Vous nous faites perdre un temps précieux : il ne nous reste que deux ans pour changer entièrement l'organisation de notre société !

Aucun commentaire n'a encore été formulé sur cette intervention.

Cette législature étant désormais achevée, les commentaires sont désactivés.
Vous pouvez commenter les travaux des nouveaux députés sur le NosDéputés.fr de la législature en cours.