Á l'inverse, mon fils n'a accepté que nous ne soyons famille d'accueil qu'à la condition que je n'accueille que des garçons, sans que je n'aie jamais su pourquoi. Nous emmenions toujours les enfants accueillis avec nous et il est vrai que, quand nous avons eu des petits-enfants, ils m'ont demandé : « Mamie, quand est-ce qu'on va partir en vacances tout seuls ? » – et je me suis permis de prendre dix jours sans les enfants accueillis, parce que, à ce moment-là, mes enfants aussi m'ont fait des réflexions, me disant : « On n'est jamais partis seuls avec vous ». Souvent, nos propres enfants ne parlent qu'une fois mariés et eux-mêmes parents. Alors ils nous disent un peu ce qu'ils ont vécu – pas toujours en mal puisque mes enfants ont toujours accepté ma profession et que ma fille est institutrice, ce qui n'est pas anodin.
Je reviens sur ce qui a été dit tout à l'heure : en effet, on ne sait pas toujours l'histoire des enfants qui arrivent chez nous, mais parfois l'ASE aussi ignore pourquoi des enfants sont placés. Je me souviens qu'une famille a accueilli un enfant dont la mère était séropositive, et on ne l'a su qu'après deux années d'accueil : un jour, elle l'a annoncé comme ça, en réunion, et personne n'était au courant. Il peut aussi arriver que l'on accueille des enfants qui ont été violés et qui sont devenus violeurs. Il est très difficile de travailler avec ces enfants-là, et quand on ne le sait pas, on fait des erreurs, parce qu'on travaille sur l'enfant qui a été abusé sans travailler sur l'enfant abuseur. Quand ils sont dans une famille, une très forte vigilance est nécessaire et, à un moment donné, on est obligé de faire le choix d'un enfant plutôt que d'un autre pour pouvoir protéger toute la famille et aussi l'enfant qui a la double pathologie.